McDull est un enfant né sans grand talent, au grand désespoir de sa pauvre mère McBing, pour qui la réussite est une fin en soi. Il promène des yeux grands ouverts sur ce monde étrange qui est celui des adultes, et nous fait ainsi partager quelques-unes unes de ses aventures. McDull nous emmènera dans son école, où nous ferons la connaissance de son professeur, Miss Chan, aussi excentrique que son directeur. Nous verrons quelles très originales recettes Mme McBing prépare pour son site internet. Nous suivrons la mère et le fils lors d’un périple rocambolesque aux îles Maldives, et ferons la connaissance de Logan, spécialiste de la “capture de la brioche”, art bien obscur qu’il enseignera au petit cochon.
McDull est un personnage tiré d’une BD locale à grand succès, intitulée McMug et parue en 1991. Dans la bande dessinée, McDull est un petit cochon parti de sa campagne et adopté par une famille hongkongaise. Scénarisé par Brian TSE et dessiné par Alice MAK, la BD se singularise par une lecture à plusieurs niveaux, s’adressant à la fois aux adultes et aux enfants. On dit ainsi le scénariste influencé par le dessinateur Raymond BRIGGS (Les vacances du sacré Père Noël), alors que la dessinatrice aurait subit l’influence du personnage japonais Hello Kitty. Nous autres français reconnaîtrons effectivement une saveur typiquement anglaise dans ce récit un peu décalé et ironique. Graphiquement parlant, si on retrouve de nouveau le trait anglais typique des productions pour enfants,le film se distingue par une “patte” qui évoque immédiatement SEMPE ! La surprise est de taille, et même du point de vue de l’histoire, McDull a quelque chose du Petit Nicolas : ce sens du merveilleux et de l’étonnement, mais à la mode de Hong Kong !
Et c’est peut-être à ce niveau que le public aura le plus de mal à faire un bon accueil au film. Si, à n’en pas douter, petits et grands seront charmés par l’aspect visuel particulièrement réussi de cet animé (1), il n’en sera sans doute pas de même en ce qui concerne son histoire. McDull est un enfant de Hong-Kong qui vit avec des références culturelles bien hermétiques pour le spectateur français lambda. Ainsi, il est quelque peu difficile de prime abord, d’apprécier Madame McBing. Cette dernière, en bonne mère asiatique, veut absolument que son fils fasse de brillantes études, et n’hésite pas pour cela à écrire le nom des universités les plus prestigieuses sur son dos ! Plus gênante, cette scène dans laquelle elle lit une histoire moralisatrice à McDull pour qu’il s’endorme. Ce dernier, agacé par le récit, demande à sa mère de le laisser dormir : cette dernière donne alors à l’histoire une conclusion agressive pour le punir. Il faudra ainsi un moment pour que le spectateur comprenne qu’au-delà des apparences, McBing aime sincèrement son fils. Par la suite, les relations mère/fils ne manqueront pas de se réchauffer. De même, comment comprendre la fascination exercée par ces fameuses brioches dont parle si souvent McDull, et dont Logan lui enseignera l’art de la capture (sic) ? Si ces friandises, constituées d’une grosse boule de riz fourrée, jouissent d’une popularité extraordinaire à Hong-Kong (2), en France on connaîtrait plutôt le pain au chocolat ou le croissant. Ces problèmes de compréhension sont poussés à l’extrême à travers le personnage de Logan. Quel spectateur goûtera le fait qu’il faille apprendre le Kung-Fu pour attraper des brioches ? Quel parent ne sera pas interloqué par ce personnage de maître à la fois drôle et dur, élément classique bien connu des amateurs de Comédie Kung-Fu (3).
Et puis, le film refuse aussi la facilité : ainsi n’apprendra-t-on jamais ce qu’il est advenu du père de McDull. De même, lorsque McBing fait croire à son fils qu’elle l’emmène aux îles Maldives, quel enfant saisira qu’ils ne sortent en fait pas de Hong-Kong, et qu’elle lui ment sciemment parce qu’elle n’a pas d’argent ?
Au-delà de cet aspect culturel peut-être trop hermétique, le film a la force de proposer une histoire qui s’adresse aussi bien aux enfants qu’aux parents ; aux enfants, car le film est entièrement tourné de leur point de vue. A l’instar de Calvin et Hobbes ou de Titeuf, McDull s’inscrit dans cette récente vague d’oeuvres pour la jeunesse, qui ne se veut pas moralisatrice, mais qui s’adresse à elle avec son langage et ses références. A l’instar de Richard BERRY, qui expliquait que pour son film Moi César 10 ans ½, 1m39, il avait décidé de placer sa caméra à hauteur du regard de son héros, McDull est le récit de la vie d’un enfant qui découvre le monde qui l’entoure avec surprise.
Cependant, les parents ne sont pas pour autant délaissés. Dans le monde de ce petit cochon, les grandes personnes sont des êtres étranges et décalés qui, en dépit de leur esprit cartésien, ne comprennent pas quels sentiments agitent l’âme de leur progéniture. McDull quant à lui, et bien que faisant souvent preuve d’une naïveté confondante, n’en possède pas moins un solide sens moral. Sa mère est finalement tout pour lui, et bien qu’il ne soit qu’un enfant, il essaiera de lui faire plaisir : il travaillera dur sous l’égide de Logan, bien qu’il n’aspire qu’à la tranquillité. Le film prend d’ailleurs un ton beaucoup plus grave, voire mélancolique, lorsqu’on retrouve McDull devenu adulte. Tête basse, ayant grossi, il est filmé marchant sous la pluie. Il se remémore ses souvenirs d’enfance, avec cette pointe de regret que nous éprouvons tous. Nous avions beau nous plaindre d’être “trop petit”, nous réalisons, à l’instar de McDull adulte, le bonheur que nous a apporté cette période.
McDull dans les nuages est un film étrange. Lors de sa projection, et malgré un aspect technique séduisant, on peut éprouver du mal à rentrer dans l’histoire, la trouvant mal construite et ennuyeuse. Mais étrangement, le film reste dans l’esprit, le pénètre… et on se surprend à réellement aimer cet anime, à la réflexion : il y a quelque chose de touchant et de tendre dans ce très beau film, qui méritait qu’on s’y attarde. McDull parle à notre âme d’enfant, mais pour qu’il nous touche, il faut lui laisser la porte ouverte. Il serait bien dommage de bouder son plaisir et de d’ignorer les tribulations de ce drôle de petit bonhomme. Après tout, comme dit le dicton : tout est bon dans le cochon !
McDull dans les nuages dure 75 minutes et connaîtra une sortie nationale le 2 juillet. Le film sera visible à la fois en version française (réussie) et en version originale sous-titrée. Notez tout de même que la partition originale des chansons a été supprimée de la version française pour être remplacée par celle de David LOWE (plus accessible à l’oreille du grand public).
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