#TBT : Mother Sarah

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Traitant de féminisme et de collapsologie, Mother Sarah préfigurait les grandes causes de notre époque… il y a trente ans ! Retour sur un manga visionnaire.

La Terre ayant été ravagée par un holocauste nucléaire, l’humanité s’est réfugiée dans des satellites en orbite. Rapidement, un schisme violent sépare deux courants politiques. Les partisans du clan Époque souhaitent envoyer une nouvelle bombe sur la planète, afin de modifier l’axe terrestre et rendre habitable l’hémisphère Sud désertique, tout en  figeant dans les glaces l’hémisphère Nord irradié. En face, les adeptes de Mother Earth refusent toute intervention atomique supplémentaire, un désaccord menant à la guerre civile. Au final, Époque expédie la bombe, permettant à toute une population de quitter les satellites en conflit pour se réfugier sur Terre, sans attendre les trois ans nécessaires à sa transformation. Parmi ces migrants, Sarah est séparée de son mari et de ses enfants. Arrivée sur le globe, elle entreprend de retrouver sa progéniture, une quête qui prendra des années et des centaines de kilomètres…

Fresque d’anticipation post-apocalyptique, Mother Sarah brasse de nombreuses thématiques : écologie, féminisme, politique, importance de la science, pacifisme, religion… Pourtant, tous ces thèmes sociétaux semblent glisser sur l’héroïne, qui ne prend jamais partie : Sarah débarque dans un village, résoud les problèmes qui la mettent en cause et repart, sans avoir rien d’autre en tête que retrouver ses enfants. On est loin de l’aspect messianique de Hokuto no ken, pourtant indirectement lié à ce manga puisque son scénariste, Buronson, a travaillé auparavant avec le dessinateur de Mother Sarah, Takumi Nagayasu sur Dr Kumahige. Également connu pour son travail sur Ai to Makoto, histoire d’amour entre un voyou et une jeune fille de bonne famille inspirée par Roméo et Juliette au scénariste Ikki Kajiwara (Kyojin no hoshi, Ashita no Joe, Tiger Mask…), Nagayasu continue donc d’illustrer des scripts trois étoiles puisque c’est Katsuhirô Ôtomo, le père d’Akira, qui scénarise Mother Sarah !

Dès le premier tome, publié le 23 octobre 1990, Mother Sarah éblouit ses lecteurs par ses dessins, splendides et fouillés. De la moindre vignette aux doubles pages en couleur, du mecha-design aux personnages bigarrés qui parsèment le chemin de l’héroïne, tout confine à la perfection. Le manga cumulera au final onze volumes jusqu’en 2006, édités sporadiquement suite à une prépublication anarchique dans le Young Magazine de Kôdansha. Ce rythme chaotique nuira à la fin de l’œuvre, qui perdra peu à peu ses fans, bien qu’elle offre une conclusion originale au conflit entre Époque et Mother Earth transposé sur notre planète Terre – le manga y aborde en toute discrétion la religion musulmane, encore un sujet d’actualité ! Autant de raisons de se replonger dans cette pépite méconnue, publiée en France aux éditions Delcourt !

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A propos de l'auteur

Matthieu Pinon