Oubliée par la majorité des Français, la série animée qui fête aujourd’hui ses 40 ans était pourtant une rare occasion de découvrir l’œuvre d’une pionnière du shôjo manga, Hideko Mizuno.
Vienne, 1907. Durant sa fête d’anniversaire, la princesse Ariane éconduit ses nombreux prétendants jusqu’à la remarque piquante du « prince de la fauche », Alex Dupin. Convoitant le joyau sur la bague de l’aristocrate, il prétend qu’elle ne serait pas si belle sans son bijou. Vexée, Ariane ôte sa bague, la fourre dans un poisson rôti du buffet qu’elle jette par la fenêtre. Lilas, la petite chatte de la serveuse Pollen, bondit alors sur l’occasion, dévore l’animal… et gobe la bague ! Pollen et sa chatte se retrouvent alors poursuivis par un soldat français, un Indien, un émir arabe et un policier allemand (non, ce n’est pas une blague) qui n’ont qu’une idée en tête : obtenir la main de la princesse promise à qui lui restituera sa bague ! Durant son périple à travers l’Europe, Pollen se rapprochera peu à peu de son plus grand adversaire, Alex Dupin…
À l’origine des Aventures de Pollen se trouve le manga Honey Honey no sutekina bôken, publié de septembre 1966 à août 1967 dans les pages du mensuel shôjo de Shueisha créé une dizaine d’années auparavant, Ribon. Son autrice est une petite prodige du manga ! Hideko Mizuno a en effet envoyé ses premières planches en 1952, à l’âge de 12 ans seulement, pour un concours chapeauté par son idole absolue, Osamu Tezuka, qui lui a donné l’envie de devenir mangaka. C’est sous son aile qu’elle deviendra professionnelle dès l’âge de 16 ans, en intégrant la pension Tokiwa où elle sera la seule fille, aux côtés d’autres futurs grands noms du manga comme Shôtarô Ishinomori ou Fujio Akatsuka, deux complices avec qui elle signera des œuvres à six mains sous le pseudonyme U Mia. Après avoir adapté en manga des comédies romantiques américaines comme Sabrina, Mizuno met ce genre à l’honneur avec Honey Honey no sutekina bôken, qui s’étalera sur deux petits volumes.
C’est donc à partir de ce maigre matériel que les équipes d’Enoki Films doivent développer une série TV quinze ans plus tard. On comprend donc mieux pourquoi cette adaptation, diffusée entre le 17 octobre 1981 et le 1er mai 1982, ne comporte que 29 épisodes ! C’est l’occasion pour un cador du shônen humoristique, Yoshitaka Nitta (Paul le Pêcheur, Gu Gu Ganmo), de se frotter à un titre conçu pour filles… mais pétri de gags tout aussi absurdes et décalés. Une ambiance que la version française d’excellente facture (comme souvent avec les dessins animés importés par la société IDDH) a su restituer avec ses jeux de mots et les noms des personnages. Néanmoins, les quinze ans d’écart entre manga et anime font que la série semblait déjà vieillotte à sa sortie avec son scénario gentiment suranné. Quarante ans plus tard, cette désuétude est encore plus flagrante ! Pourtant, si l’on est prêt à accepter cet état de fait, Les aventures de Pollen est un merveilleux témoin des premiers shôjo, moins niais qu’on ne pourrait le croire, et de la vision que le Japon des sixties avait de l’Europe !
Vous devez vous connecter pour laisser un commentaire.