Gérer à la fois les catalogues de la MGM (Tex AVERY), de la Warner (Looney Tunes, Merry Melodies) et d’Hanna Barbera (Tom et Jerry, Scooby Doo…), tout programmateur en eut rêvé, c’est le tour de force qu’a réussi Cartoon Network. Fort de l’acquisition du catalogue Hanna Barbera en 1991, le magnat Ted TURNER (à la tête du groupe Turner Broadcasting News, qui gère notamment CNN, TNT…) défriche la voie et crée en 1992 la première chaîne entièrement consacrée à l’animation : Cartoon Network US. Quatre ans plus tard, la fusion TBS / Time Warner ramène les droits de la MGM et de Warner à la chaîne câblée. Forte d’un succès mérité, la chaîne essaime un peu partout dans le monde, et c’est ainsi que naît en 1999 Cartoon Network France.
Deux ans plus tard, Cartoon Network émet dans 138 millions de foyers à travers 145 pays différents, essentiellement concentrés en Europe, Afrique, Israël et Moyen Orient (27 millions de foyers). Une chaîne pour l’animation, c’est bien ; une chaîne d’animation qui s’adresserait à toutes les générations, c’est encore mieux ! La même année, une enquête Mediacabsat / Mediamétrie révèle que “4 spectacteurs sur 10 ne sont plus des enfants” : en effet, si les 4/14 ans représentent toujours la majorité du public (61%), les adultes sont maintenant presque tout aussi assidus aux aventures de Capitaine Caverne et consorts (39%) !
Dès ses débuts en effet, Cartoon Network s’est démarquée d’une simple chaîne “pour enfants” ; le canal ne se présente pas comme “la chaîne du dessin animé”, mais comme “la chaîne de l’animation”. La nuance est importante pour Valérie LERIDON, chargée des relations presse de la chaîne française : “Comme son nom l’indique, le catalogue de base de Cartoon Network concerne les “cartoons” : c’est un style en lui-même, qui n’est pas du “dessin animé”. Les premiers cartoons comme Bugs Bunny, Daffy Duck… étaient des produits pour adultes, diffusés en première partie des films au cinéma. Ils étaient souvent délirants et déjà décalés : on y voyait par exemple Bugs Bunny en jupette qui embrassait Elmer sur la bouche…”. Ces cartoons donnent le ton, et confèrent à la chaîne son esprit, à mi chemin entre la créativité et la spontanéité enfantine et un mordant tout adulte. Bonne pioche : aujourd’hui encore, Tom et Jerry se placent dans le top 10 des programmes les plus regardés de la chaîne.
Avec le temps néanmoins, Cartoon Network a su ne pas s’enfermer dans ce catalogue aux références imposantes, mais se nourrir de son esprit pour expérimenter de nouveaux terrains.
De nouveaux produits viennent enrichir la programmation : certains, comme Beetlejuice tiré du film de Tim BURTON, ou encore The Mask, font toujours explicitement référence aux derniers succès américains. Mais bientôt aussi vient le temps de l’expérimentation pure. Le site de Cartoon Network US a ainsi proposé un temps des programmes courts de 7 min, réalisés par de jeunes auteurs : “Ces pilotes développés pour le web proposaient des parodies comme Hong Kong Fou Fou déguisé en Samouraï Jack ; ils n’existent plus pour l’instant”, nous explique Valérie LERIDON. Présentés ensuite dans l’émission américaine “What a cartoon show !”, les plus convaincants ont eu droit à des coproductions, comme Powerpuff girls, Le laboratoire de Dexter ou encore Johnny Bravo, qui ont rencontré le succès qu’on leur connaît aujourd’hui… Depuis peu également, la chaîne exploite le créneau action / aventures pour les générations nostalgiques avides de nouveautés : ainsi, des séries comme Batman, la relève ou encore The Big O, font appel aux comics des années 70, revus et corrigés par les influences nineties.
Ce brassage judicieux de plusieurs générations a fait de Cartoon Network la première chaîne jeunesse de Canal Satellite : ” la chaîne la plus regardée, mais aussi le plus longtemps et par le plus grand nombre d’enfants de 4 à 10 ans (9,1% de part d’audience chez les 4/10 ans ; 13min 28sec d’écoute par jour et par individu)”, selon les sources de Médiamétrie / Mediacabsat, datant de décembre 2001 – juin 2002. Les générations biberonnées aux Tex AVERY semblent avoir donné naissance à des enfants qui n’acceptent plus qu’on bêtifie. Qui va s’en plaindre ?
Merci à Valérie LERIDON
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