Réveil difficile. C’est pire que d’habitude à cause du décalage horaire. Mais après 30 secondes de réflexion (le temps de connecter mes deux neurones), je me suis dit : « Waou ! Je me réveille à Tôkyô ». Bon, ok, j’arrête de vous faire enrager.
Toujours aucune nouvelle de nos valises volatilisées depuis Frankfort. Mais les Japonais sont des professionnels de l’organisation prêts à pallier tous les problèmes. Non seulement ils ont réussi à trouver un costume de rechange (Prince of Tennis), mais aussi plein d’accessoires pour faire « vrais » : des tennis, des chaussettes blanches, casquette, bandana, et des raquettes. Cela n’a l’air de rien, pourtant c’est loin d’être inutile car les deux cosplayeuses françaises n’ont que des collants et des chaussures à talons hauts. Et heureusement que nous sommes allées faire du shopping la veille car sinon il n’y avait pas non plus de sous-vêtements de rechange…
Lena incarne Eiji Kikumaru et Anne-Cécile doit se mettre dans la peau de Kaoru Kaidoh. Dans la salle du Tôkyô Anime Center, les derniers préparatifs sont effectués devant les caméras et les journalistes qui interviewent les cosplayeurs. Les Françaises répètent dans les habits qu’elles n’ont pas choisis, mais font de leur mieux pour improviser quelque chose de correct à la dernière minute.
À leurs côtés, il faut reconnaître que les autres équipes assurent. Les Allemandes ont un cosplay qui reprend des personnages de jeu vidéo. Les Brésiliens représentent deux personnages de Trinity Blood. Quant aux Chinois, ils sont habillés en personnages de Saiyuki. Les trois équipes ont des costumes très efficaces et les filles sont particulièrement jolies dans leurs tenues plus ou moins déshabillées. La France perd d’emblée un point pour le critère « sexy » et un autre pour celui de la crédibilité. Mais qu’à cela ne tienne, il faut que le show commence.
Devant une assemblée de photographes et de caméramen, chaque équipe fait une mini mise en scène avant de répondre aux questions de la presse. Vous retrouverez le portrait de chaque équipe prochainement dans AnimeLand. La plupart des journalistes se demandent quel est l’impact de l’animation japonaise et du manga dans chaque pays pour que le cosplay se développe ainsi. La plupart des Japonais sont surpris de voir des « Gaijin » s’enthousiasmer pour une pratique qui n’est pas vraiment à mettre sur le même plan que l’ikebana (composition florale de fleurs coupées) ou la calligraphie. Même s’ils savent que les autres pays apprécient le manga et les anime, c’est par le biais des cosplayeurs étrangers qu’ils peuvent se rendre compte de l’impact de la culture populaire nippone dans le monde.
Après la conférence de presse de 13h, les cosplayeurs font un défilé dans les rues d’Akihabara, réputé pour ses boutiques d’électronique et de jeux vidéo. La masse des journalistes enfle avec celle des badauds qui photographient et filment eux aussi cette attraction inhabituelle dans les rues d’un quartier qui en a vue d’autre. Il est en effet réputé pour ses jeunes filles habillées en maid (servante) distribuant des publicités aux passants. Mon mètre cinquante a du mal à résister à la foule d’hommes qui bien qu’ils soient Japonais (et donc en moyenne plus petits que les Occidentaux) me dépassent largement en taille. C’est curieux, à chaque fois que j’essaie de faire une photo, je me retrouve avec un crâne ou une épaule dans le champ.
Ce petit bain de foule à peine achevé, les cosplayeurs rentrent au Tôkyô Anime Center pour reprendre leurs affaires et manger un petit sandwich avant de repartir pour une autre conférence de presse. Visiblement Andy Wharhol s’est légèrement trompé. Certains bénéficient de plusieurs quart d’heure de célébrité.
Après la présentation à la presse et à la rue, les cosplayeurs sont attendus au très sérieux Ministère des Affaires étrangères. Pendant que certains négocient la paix, d’autres rencontrent des gens déguisés venus de tous pays. À 16 heures, l’entrevue débute par un long discours du Senior Vice-Minister for Foreign Affairs, Monsieur Katsutoshi KANEDA. Il est particulièrement fier d’accueillir les représentants de la jeunesse de tant de pays et les félicite pour leur exaltation et leur travail dans l’élaboration des tenues. Les questions et la conversation s’orientent sur des thèmes plus généraux que ceux du Tôkyô Anime Center. On demande aux cosplayeurs quelle était leur image du Japon et ce qu’ils y apprécient à présent qu’ils ont la chance d’y être. Les Allemandes qui mentionnent leur intérêt pour les temples remportent l’adhésion de Monsieur KANEDA.
L’entrevue se termine par la traditionnelle photo de groupe où les cosplayeurs s’exclament en coeur « Japan is cool ! », ainsi qu’une série de poignée de main. Très professionnel, Monsieur KANEDA est le seul capable de garder la même pose avec chaque cosplayeur. Ces derniers manquent encore un peu de pratique et ne regardent pas toujours là où sont les caméras, mais ils réussissent tout de même assez bien cet exercice.
Les conférences de presse ne sont pas achevées pour autant. C’est au tour des journalistes du site Web du Ministère des Affaires étrangères d’interviewer chaque équipe. Qui a dit qu’être star était un métier facile ? Il faut répondre à des questions très similaires avec un large sourire comme si c’était la première fois qu’on la leur posait. À ce petit jeu, on reconnaît immédiatement les novices. Lorsque le journaliste leur demande s’ils apprécient la nourriture japonaise comme les sushis, Lena clame son amour des gyoza (ravioli revenu à la poêle). Le journaliste acquiesce, mais précise qu’il s’agit d’un plat chinois. Oups, « social faux pas ».
La journée de travail n’est toujours pas finie car il faut à présent faire le tour des bureaux du Ministère des Affaires étrangères et répondre aux questions des employés qui ne manquent pas de se faire prendre en photo avec les cosplayeurs.
Imaginez-vous au bureau, en milieu de semaine, bien loin du week end, vous concentrant comme vous le pouvez sur un mémo interminable devant l’écran de votre ordinateur quand, soudain, une troupe bigarrée passe la porte avec une horde de journalistes prêts à immortaliser l’instant. Que se passe-t-il ? Les extraterrestres ont envahi la Terre ? Non, non, juste des fans déguisés en personnage de manga, d’anime ou de jeu vidéo.
Lorsque le tour complet des bureaux est accompli, les cosplayeurs peuvent enfin profiter d’une soirée de libre. Direction shopping dans le quartier « fashion » d’Harajuku. Puis un repas dans un restaurant de sushi s’impose. Les assiettes s’empilent rapidement pour édifier une immense tour branlante. La table des cosplayeurs rivalise avec celle des Japonais qui ont eux aussi fait une unique pile avec toutes leurs assiettes. À ce petit jeu idiot, nous avons gagné. Il faut dire que la French Team est doté d’un solide appétit. Nous sommes ensuite rapidement parti payer avant que les deux tours s’écroulent.
En pleine forme pour leur dernière journée à Tôkyô, les cosplayeurs repartent pour une série de photos miniatures : les Purikura. Dans des photomatons spécialisés, nous réalisons une suite de photo plus ou moins rigolotes que nous modifions ensuite à coup de petites étoiles, coeurs et autres détails kawaï. Enfin, les plus résistants s’embarquent dans un karaoké, tandis que d’autres rédigent des articles pour justifier leur présence sur le sol nippon.
Demain départ pour Nagoya et arrivée des dernières équipes !
Il n’y a plus qu’à espérer que nos bagages soient aussi au rendez-vous.
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