Peter Pan 2 : Retour au pays imaginaire

En 1953, Disney réalise Peter Pan, un des ses meilleurs longs métrages, basé sur l’oeuvre de Sir James Matthew BARRIE, publiée en 1911 sous le titre de ” Peter Pan and Wendy “. Le film est magnifique, le public l’adore, et tous les enfants se prennent pour le sautillant Peter (il est certain qu’à l’époque les ventes de collants verts ont dû monter en flèche). Près d’un demi-siècle plus tard, les studios Disney décident de réaliser une suite.
Wendy a grandi. Elle est à présent mariée à Edward et mère de deux enfants, Jane et Danny. Mais elle est toujours restée fidèle à ses paroles du premier film: ” Je croirais toujours en toi, Peter. “ Merveilleuse conteuse, elle captive ses enfants avec les aventures de Peter, de la fée Clochette, des enfants perdus, et du terrible capitaine Crochet. Mais les années passent et la seconde guerre mondiale éclate. Le mari de Wendy doit partir au front. Il fait promettre à sa fille, Jane, de prendre soin de la famille. Londres devient une ville dévastée par les bombardements allemands. Et Jane, par sa promesse et les évènements, mûrit trop vite, laissant disparaître cette enfance et cette innocence, que sa mère tente de préserver. Un soir de dispute avec son petit frère et sa mère, Jane se fait enlever par Crochet (qui pense avoir affaire à Wendy) afin de tendre un piège à Peter, vivant toujours au pays imaginaire. S’ensuivront le sauvetage de Jane, sa rencontre avec les enfants perdus et son terrible dilemme, croire ou ne pas croire aux fées; dilemme qui aura des répercussions sur ses nouveaux amis.
Que dire de ce film, sinon que Disney semble avoir perdu cette magie si présente dans l’oeuvre originale. Si Retour au pays merveilleux était sorti il y a cinq ans, la réaction aurait pu être différente. Mais il est évident que la politique Disney est devenue dorénavant excessivement commerciale, avec le flot de séquelles disponibles. Le Roi Lion 2, Pocahontas 2, La Petite Sirène 2, La Belle et le Clochard 2, Le Bossu de Notre-Dame 2 et bientôt, Mulan 2, ne peuvent en effet être considérés comme des oeuvres, mais plutôt comme des produits d’exploitation abusifs, et ce malgré les qualités de certains (La Belle et le Clochard 2 reste, à ce jour, le plus acceptable). Peter Pan 2, dont le titre Retour au pays imaginaire cache sa réelle origine, était initialement prévu pour une distribution directe en vidéo. Mais le personnage de Peter Pan étant un des plus célèbres de Disney, le saut au grand écran pouvait se révéler une bonne décision commerciale, tout comme Tigrou. Autre preuve de son origine, aucune voix célèbre ne participe au film et les chansons sont insipides.
L’animation, comme pour tout projet vidéo, est acceptable, mais bien loin de la qualité des projets cinématographiques. Même si le design des lieux et personnages, tout en étant légèrement modernisé, est respecté, Peter a parfois une bien laide figure, pendant ses dialogues en plan moyen avec Jane. L’utilisation intempestive des images de synthèse n’est pas toujours agréable à l’oeil. Il est évident que la scène du Jolly Roger, le bateau de Crochet, se frayant un passage entre les avions, au dessus de Londres, est une des plus réussies, mais les autres pêchent par un manque d’unité avec l’animation traditionnelle. Notons aussi le passage de notre monde à celui de Peter, par le biais d’un portail dimensionnel au look psychédélique coloré des plus honteux.En ce qui concerne l’histoire, nous sommes chez Disney, c’est à dire un éternel recyclage des mêmes thèmes : l’amitié, croire en ses rêves, la famille, l’amour, le respect, bla bla bla… Et pour ne pas changer la règle, Jane est une enfant dont la famille n’est pas complète (le père est parti se battre), comme la plupart des enfants-héros, chez Disney. De même, Peter Pan 2 n’amène aucun développement ou évolution de personnages. Peter reste l’éternel gamin facétieux et insouciant, plutôt effacé devant le personnage de Jane, Crochet rivalise de mimiques avec Mouche et ne décroche pas de son obsession pour Peter ou pour le trésor, tandis que les enfants perdus restent la même bande de petits tapageurs. Pire que tout, Clochette est limitée au simple rôle de sous-fifre jalouse et le crocodile se retrouve remplacé par une pieuvre colorée qui semble issue de La Petite Sirène (mais pour remplacer un crocodile, le choix semblait limité à une pieuvre ou un requin!). Il est aussi fort dommage de ne rencontrer aucun indien (où est donc Lili la tigresse?). Les enfants et les pirates semblent les seuls habitants de l’île. Enfin, Nana, la chienne de Wendy dans le premier film, est remplacée par une chienne identique, nommée Nana Deux (probablement la pire trouvaille de continuité entre les deux films).Donc, rien de nouveau au pays imaginaire. Si, peut-être un petit quelque chose dans la scène finale, qui effleure notre émotivité. Mais gardons un peu de surprise pour ceux qui iraient le voir.
Ce long métrage n’est toutefois pas si raté, puisque le but est de plaire aux enfants. Ceux-ci pourront plonger à nouveau, avec délice, dans les aventures de Peter Pan contre le capitaine Crochet. Mais ses qualités de budget restreint, et surtout son faible scénario, en font un produit qui aurait du suivre sa voie : sortir en vidéo et être ranger avec toutes les autres séquelles Disney. Ce qui est bien dommage pour un personnage tel que Peter Pan. Chez Disney, la poussière de fée n’agit plus.

©Disney/GBVI

Note :
Pour les curieux, rappelons que Régis LOISEL a créé un cycle de bande dessinée sur les origines de Peter Pan (5 tomes disponibles aux éditions Vents d’ouest). Son travail graphique et narratif est exceptionnel, et si l’ambiance est plus réaliste que merveilleuse, le développement y gagne en profondeur. Et comme, chez AnimeLand, on aime les liens curieux, en voici un de taille. LOISEL a travaillé pour Disney, pendant la production de Mulan, sans y être crédité, et curieusement, le prochain Disney, Lilo & Stitch, a pour personnage principal un clone du Fourreux, créature apparaissant dans la bande dessinée La Quête de l’oiseau du temps, scénarisée par LETENDRE et dessinée par… LOISEL !