Né en 1973, SHINKAI Makoto, après être sorti premier de l’Université de Chuo, en section littérature japonaise, obtint un poste dans… une entreprise de jeux vidéo ! Après cinq ans d’apprentissage de la plupart des logiciels 3D, il y travaillera essentiellement sur les séquences animées de jeu et le web-design. Se sentant trop à l’étroit dans cette société, il commence à créer des dessins animés sur son temps libre. C’est ainsi que naîtra Kanoujo to Kanoujo no Neko (Elle et son chat).
Diffusé au cours du festival des nouvelles images du Japon 2001, ce court métrage de 5 minutes aura marqué la mémoire des rares personnes qui visionnèrent la sélection du “Projet Team Dôga” au cours de laquelle il fut projeté. Tout en noir et blanc, ce dessin animé réalisé en 2000 relate la vie au quotidien, les joies et les peines d’une jeune femme, dont les faits et gestes sont relatés par son chat. A la fois intimiste et émouvant, Kanoujo to Kanoujo no Neko pose déjà les bases su “style SHINKAI”. Fortement influencé par les travaux de ANNO Hideaki (réalisateur d’Evangelion), SHINKAI adopte un montage haché, alternant longues scènes contemplatives et plans très brefs, donnant un rythme soutenu à un film dont l’animation semble quasi-absente. De même, l’insertion de “cartons” (écrans fixes contenant juste du texte) ne peut que faire penser à la série culte du studio Gainax, studio également responsable en 1998 d’une série nommée Kareshi Kanoujo no Jijo : la ressemblance entre les titres n’est que trop évidente.
Ayant obtenu des récompenses méritées pour ce coup d’essai, SHINKAI Makoto se fait alors remarquer par HAGIWARA Yoshihiro, qui lui propose de distribuer son titre. Ainsi, de copies gravées sur CD-ROM et vendues de la main à la main au cours de conventions, Kanoujo to Kanoujo no Neko devient un CD édité par Mangazoo. Une consécration pour ce dessin animé dessiné, monté, réalisé, doublé et bruité entièrement par SHINKAI ! (Pour l’anecdote, le bruit du néon qui s’allume a été effectué en tapotant une épingle à cravate contre un verre)
Après ce coup d’essai particulièrement réussi, SHINKAI souhaite pouvoir s’exprimer dans un format plus conséquent. Avec le support de Mangazoo, via HAGIWARA Yoshihiro, il décide de quitter sa société pour devenir réalisateur free-lance.Avec l’aide de quelques-uns de ses ex-collègues, il met alors en chantier Hoshi no Koe (les voix d’une étoile lointaine), son film le plus abouti actuellement.
Juillet 2046. Surpris par la pluie, Nagamine Mikako et son collègue Noboru se protègent dans un abribus. C’est là que la jeune fille apprend à son ami que l’United Nations Space Force (UNSF) l’a engagée pour partir à la recherche des Tarsiens, une race extra-terrestre qui a dévasté la flotte terrienne dix ans plus tôt.
Mars 2047. Aux commandes de son tracer, robot géant humanoïde, Mikako s’entraîne sur la planète Mars. Son seul moyen de communication avec Noboru, resté sur Terre, est son téléphone portable, qui lui permet d’envoyer des e-mails via le SMS.
Hélas, la troupe est prête, et il leur faut partir pour le nuage d’Oort, aux confins du système solaire. De là, il faudra six mois aux ondes électromagnétiques des SMS pour parvenir sur Terre.
Août 2047. Arrivés à destination, les Terriens se font attaquer par une flotte de Tarsiens. En sous-nombre, l’escadrille de l’UNSF décide de se réfugier en effectuant un saut dans l’hyper-espace. Désormais, il faudra un an pour que les messages de Mikako ne parviennent à son ami, elle qui est perdue dans l’espace, sans connaissance du chemin de retour vers la Terre.
Août 2048. Alors que Noboru n’espère plus recevoir de messages de son amie, il est surpris par la pluie sur le chemin de retour de l’école. Se réfugiant dans l’abribus empli de souvenirs, il reçoit alors un message sur son téléphone portable : “Nous partons pour Sirius. Il va falloir 8 ans et 7 mois pour recevoir mes mails désormais. Nous sommes comme des amants séparés”.
Arrivée sur Sirius, la flotte de l’UNSF doit affronter son plus grand combat contre les Tarsiens. C’est là que nos amoureux vont réaliser que malgré la distance qui les sépare, leurs sentiments se rejoignent et se répondent. Loin des yeux, certes, mais si proches du coeur.
S’il paraît évident en visionnant Hoshi no Koe que le budget dont disposait SHINKAI Makoto était limité, on ne peut qu’être stupéfait devant le résultat. Certes, les mecha en 3D sont mal intégrés dans le reste du dessin animé, mais on obtient ainsi des scènes de combat particulièrement bien animées. Mais les plans quasi-inanimés et d’une beauté plastique indéniables sont toujours là, “patte” caractéristique de SHINKAI. Celle-ci se retrouve également à travers les jeux de lumières, posant une atmosphère onirique et nostalgique, et surtout à travers sa vision du quotidien. Les actions toutes simples de ces héros, tels que composer un SMS, prendre le métro (événement récurrent de toutes ses oeuvres), deviennent alors des moments poétiques.
Qui plus est, si SHINKAI utilise à nouveau sa succession de plans lents et courts, et décline ses “cartons” à travers des gros plans sur les SMS, il expérimente de nouvelles méthodes pour émouvoir le spectateur. Par exemple, le discours d’un personnage illustre une scène apparemment sans aucun rapport, mais la combinaison de l’image et du son donne une saveur particulière à la scène. Comment ne pas verser une larme quand le vaisseau de Mikako disparaît lors de son passage en hyper-espace, alors que la voix de Noboru déclame “Je vais grandir tout seul” ?
Les Japonais ne se sont pas trompés et on su plébisciter Hoshi no Koe, dont le DVD s’est vendu à 50 000 exemplaires, soit un excellent score pour un dessin animé, qui plus est réalisé par un autodidacte, sans le soutien d’un grand studio derrière lui.
Depuis le début de l’année 2003, SHINKAI Makoto travaille sur un nouveau projet, intitulé Kumo no Mukou, Yakusoku no Basho (Cet endroit promis dans nos jours anciens). Si les thèmes qui y seront développés restent dans le domaine de prédilection du réalisateur (les relations entre une adolescente et des jeunes garçons, avec la guerre en toile de fond), la longueur de ce film, 50 minutes, est un vrai pari pour lui. Espérons qu’à travers ce nouveau format, SHINKAI réussisse à nous émouvoir comme il a su si bien le faire avec ses oeuvres précédentes. Alors, nombreux seront ceux qui écouteront sa voix parmi les étoiles de la japanimation.
Site officiel de SHINKAI Makoto (en japonais): http://www2.odn.ne.jp/~ccs50140/
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