Aussi paradoxal que cela puisse paraître, c’est en mai 1996 qu’est sorti le premier tome relié de MARS, shôjo de Fuyumi Soryo qui aura marqué à jamais les premières lectrices françaises de manga…
Quand Rei Kashino demande à une jeune fille la direction de l’hôpital, cette dernière préfère lui dessiner un plan sur un bout de papier. Au verso de celui-ci, se trouve le dessin d’une mère et de son enfant, qui fascine le jeune motard. Quelle n’est pas sa surprise, à la rentrée au lycée, en découvrant que l’artiste en herbe, Kira Aso, fait partie de sa classe ! Quand la jolie demoiselle se fait harceler sexuellement par leur professeur, Rei intervient aussitôt. Peu après, fasciné par le croquis que Kira lui avait remis sans le savoir, il lui propose de poser pour elle. Le loubard et la jeune introvertie se rapprochent peu à peu, et soignent mutuellement les plaies de leurs passés douloureux. Mais leur histoire d’amour ne plaît pas vraiment à leur entourage…
Si vous pensiez tout savoir du shôjo, MARS est fait pour vous ! Le manga de Fuyumi Soryo fait en effet voler en éclats tous les a priori qu’on pourrait avoir sur ce genre éditorial. Débutant comme une histoire d’amour pure, voire cucul-la-praline, MARS s’obscurcit page après page alors que se dévoilent les passés respectifs des personnages. Ici, on parle d’agression sexuelle, d’inceste, de pauvreté ou de suicide adolescent sans prendre de gants ! Tant et si bien que ceux qui veulent à tout prix étiqueter les œuvres ne sauront sur quel pied danser : a-t-on affaire à un shôjo ou à un seinen ? Techniquement, la réponse tendrait vers la première catégorie, puisque le manga a été prépublié dans le Bessatsu Friend, magazine shôjo mensuel de Kôdansha qui propose aussi bien des comédies (My lovely hockey club, Kiss him not me) que des titres plus matures (Peach Girl, Life). En revanche, sa date de sortie est unique : chaque 13 du mois.
MARS respecte les codes du magazine où il débute, puisque chaque tome du manga (ou quasi) sortira le même jour au Japon, du premier (13 mai 1996) qui fête son quart de siècle, au quinzième et dernier, qui débarque dans les librairies nippones le 13 décembre 2000. Pendant ces quatre années, le manga ne cessera de s’améliorer graphiquement : pour les premiers tomes, Fuyumi Soryo ne peut compter que sur une assistante, et doit apprendre à dessiner des motos en partant de rien ! Mais l’ambiance romantico-tragique digne d’un Roméo & Juliette dans le Japon en crise des années 90 suffit pour toucher le cœur des lectrices… y compris à l’international, aux Etats-Unis (Tokyopop) comme en France (Panini). Le manga inspirera ainsi un drama à Taiwan en 2004, puis au Japon en 2016, pour son vingtième anniversaire, la série étant couronnée par un long métrage conclusif ! Toujours aussi efficace malgré les années, grâce à son scénario particulièrement bien ficelé, MARS mériterait un retour en grâce pour une nouvelle génération de lectrices (et de lecteurs), d’autant plus que Fuyumi Soryo est désormais bien connue en France. La balle est dans le camp de son éditeur historique…
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