Chez Dargaud, la collection Kana a réussi à se tailler 10% du volume des ventes de la sacro-sainte maison d’édition de franco belge (près d’un million d’exemplaires vendus, soit 200 000 de plus que l’an dernier). Le succès assuré par des mangas tendance jeune public qui marchent toujours très fort (Saint Seiya, Détective Conan), a permis à Kana de tester dès la rentrée 2001 un nouveau marché. Les collections Dark Kana et Big Kana, à travers des titres sombres et plus adultes (Psychometrer Eiji, Monster ou Kyo) tentent de capter un nouveau public. S’il est encore trop tôt pour avoir un quelconque retour du public, ces manga reçoivent pour l’instant un accueil très favorable de la part des professionnels. Pour 2002, Kana compte développer toutes les nouvelles séries du catalogue (Basara se sentira peut-être un peu moins seul dans la collection “shojô”), et mise sur une croissance de 20 à 25%, grâce à des titres comme Inu-Yasha de TAKAHASHI Rumiko, Agartha de MATSUMOTO Takaharu et Naruto. Nouveauté : Kana se montre sensible au revival nostalgie, avec la publication de titres comme Albator de MATSUMOTO Leiji (prévu pour mai) et Lady Oscar. Malheureusement, des budgets limités empêchent Kana d’être présent sur toutes les conventions : si l’on a eu à déplorer son absence à Cartoonist Paris, on retrouvera l’éditeur à l’ISC au mois de mars et à Cartoonist Toulon en avril.
Malgré le départ d’une partie de l’équipe, dont son fondateur Dominique VERET, qui vole vers d’autres cieux avec Akata, Tonkam se porte bien et poursuit son objectif de “naviguer en marge des sentiers battus” selon Benoît HUOT, responsable des éditions à De 4 à 5 titres par mois en 2000 (pour un chiffre d’affaires de 17 millions de francs), Tonkam est passé à une publication mensuelle de 6 titres en 2001 (pour un chiffre d’affaires de 19 millions de francs). Les plus gros succès à ce jour sont I”s (un tirage de 12 000 exemplaires se vend en 6 mois) et Family Compo (tiré à 8000 exemplaires). Ayashi no Ceres, pourtant tiré à 6000 exemplaires, a dépassé Angel Sanctuary (tiré à 8000). Vagabond a démarré sur les chapeaux de roue en 2001, avec un retirage immédiat 15 jours après la sortie du 1er volume.
En prévision pour 2002 : la sortie de one shot (BD en un seul tome) comme Angel Dust, de romans (moins chers toutefois que celui de Vidéo Girl Aï, qui était proposé à 60 F, ils devraient plafonner à 5,35 ?, soit 35 F), de manga d’horreur et de manga historiques en couleurs (des titres comme Jeanne et Jésus, ou Kindaichi, qui seront proposés à 12 ?). La maison d’édition fondée en 1985 compte également s’attaquer à de nouveaux marchés à travers un réseau de distribution plus offensif : Tonkam compte en effet s’attaquer aux grands réseaux (FNAC, Extrapôle) en 2002. Dans un premier temps, ce seront essentiellement des retirages de masse qui seront effectués pour réussir cette implantation.
Afin de casser l’image « froide » que peut véhiculer une grande maison d’édition, Glénat souhaite quant à elle, renforcer sa présence auprès du lectorat : ainsi s’explique la présence de l’éditeur à une convention comme Cartoonist Paris. Malgré un chiffre d’affaires resté stable entre 2000 et 2001, le secteur manga représente 16% des ventes totales de Glénat (évolution de 15 à 20% par an suivant les années). Motivé par le succès de Kenshin (40 000 exemplaires par volumes, la plus grosse vente de 2001), l’éditeur a lancé fin 2001 un manga dans la même veine, Hôshin, reposant déjà sur une présence en français de la vidéo, intitulée Soul Hunter. Dans le souci de proposer une ouverture sur la culture japonaise à ses lecteurs, un supplément mythologique est disponible à chaque fin de volume, initiative qui pourrait se développer prochainement sur d’autres titres. Autre nouveauté 2001, Marmalade Boy a inauguré le secteur « purement shôjo » de Glénat : contrairement à Sailor Moon, le titre ne bénéficie pas cette fois de la renommée d’un animé en France.
L’appui d’un animé est en effet la garantie d’un succès pour toute publication papier. Ainsi, la diffusion de Sakura par M6 a boosté les ventes du manga chez Pika (17 000 exemplaires !), donnant naissance à deux nouveaux types de produits : l’animecomics et l’artbook. Des coffrets ont également vu le jour (Magic Knight Rayearth et Trèfle) à la fin du mois de décembre. Vous avez chouchouté également cette année GTO : le Great Teacher Onizuka caracole en effet en deuxième position des ventes chez Pika, avec 15 000 exemplaires vendus par volumes ! Vu le succès, GTO paraît à un rythme mensuel (contre le rythme bimensuel des autres parutions), et la même politique va être menée pour les premiers volumes de Love Hina. D’autres coups d’essai, comme Genzo le Marionnettiste, marchent plutôt bien (sur la lignée de 3×3 Eyes) ; ce n’est pas le cas pour tous, et des titres comme Le Voleur aux cent visages ou J’aime ce que j’aime n’ont pas eu le succès escompté. En général, les titres plafonnent à 10 000 exemplaires vendus : les ventes ont été multipliées par trois par rapport à l’an dernier, où Pika, il est vrai, proposait surtout des rééditions des titres parus chez MangaPlayer. En bref, une très bonne année pour Pika, qui brasse un chiffre d’affaires de 25 millions de francs. Et soyez encore un peu patients à le site de Pika devrait ouvrir d’ici 2 à 3 mois. Pour 2002, Pika nous promet des titres comme Tenchi Muyo de OKUDA Mitoshi, Gundam Wing (prévu pour mars), Escaflowne de KATSU Aki(pour avril), Chirality de URUSHIHARA Satoshi en mai.
Avec 460 000 exemplaires vendus en 2001 (soit 60 000 de plus qu’en 2000), le secteur manga de J’ai Lu se porte bien.
L’éditeur a sorti 24 volumes cette année : pas de nouveaux titres, mais la poursuite de deux séries à succès, Ken (la série, qui s’est achevée en novembre, représente à elle seule quasiment la moitié des ventes 2001 avec 200 000 exemplaires vendus) et Captain Tsubasa. Si les plus grosses ventes sont toujours assurées par les nouveautés (15 000 exemplaires pour chaque nouveau volume de Ken, et 8 500 pour chaque nouveau volume de Captain Tsubasa), la vente des exemplaires en stock n’est pas négligeable (170 000 exemplaires pour l’année 2001). Un titre en stock se vend en moyenne à 2000 exemplaires par volume, mais certains titres se détachent toutefois : signalons ainsi l’époustouflante progression de Fly, dont les ventes ont presque doublé en un an (80 000 en 2001 contre 48 000 en 2000), et la toujours excellente santé de City Hunter, dont les volumes se vendent à une moyenne de 25 000 exemplaires ! Aujourd’hui, le secteur manga représente 6,25% de la maison d’édition J’ai Lu (excepté les titres Librio à 10F et la collection grand format Edition 84). Après le boom du début des années 90, Benoît COUSINT responsable éditorial des éditions manga, estime que le marché s’est stabilisé à un niveau assez important. Cela permet à l’éditeur d’innover pour 2002 : si jusqu’à présent, les mangas publiés chez J’ai Lu s’appuyaient sur des succès télé retentissants (Captain Tsubasa / Olive et Tom, Ken, Orange Road/ Max et cie, City Hunter), l’éditeur ose à présent emmener son lectorat vers d’autres horizons avec la publication de deux titres moins connus : Jojo’s Bizarre adventure, seulement connu des fans spécialisés (le manga est publié depuis 8 ans au Japon), et Racaille Blues, de MASAMORI Morita (le mangaka de Rookies chez Tonkam), tourné vers la boxe.
Pas beaucoup d’infos du côté de chez Dynamic Visions : l’éditeur ne désire communiquer aucune information ou point de vue sur leur année éditoriale, ce qui est assez décevant en regard des autres éditeurs. Dynamic reste néanmoins le seul à travailler paralèlement le support papier et le support vidéo, ce qui implique diverses orientations de leur stratégie. Il est aisé de comprendre que, axé en 2001 sur les sorties de ses DVD, Dynamic n’a pas connu de grosses sorties papier, on ne peut être au four et au moulin. Gageons néanmoins que son fond BD s’est bien vendu, Cobra, Golden Boy ou encore Devilman étant des titres de qualité. Dynamic cherche à travailler sur ses plannings de sortie pour 2002. Des titres comme Lodoss (dont le succès vidéo promet des ventes assez confortables), Trigun et Berserk sont confirmés pour 2002, et Dynamic prévoit de rajouter des suppléments sur ses produits (interview des créateurs par exemple). 2002, sera également l’année où s’achèvera la publication de Space Adventure Cobra.
D’autres maisons d’éditions sont apparues dans le paysage manga français : ainsi, Génération Comics, qui a déjà lancé plusieurs séries, Semic (Batman), ou Ego comme X (La Nouvelle Manga de BOILET) se sont lancés dans l’aventure avec des titres originaux, et seront suivis en 2002 par Vegetal Manga ou Vertige Graphic (qui annonce Gen d’Hiroshima). On murmure pour l’année 2002 qu’un éditeur comme Soleil serait également tenté de lorgner vers le Japon, tandis que d’autres comme Delcourt – peut-être poussé par l’expérience Kana chez Dargaud – ont d’ores et déjà sauté le pas en s’associant à Akata pour proposer une collection manga (à partir de juin 2002).
Fortes de l’assurance d’un succès constant, et bien stabilisé, les maisons d’édition multiplient les offres pour 2002. On risque alors de se confronter rapidement à une saturation du marché : le lectorat manga, certes maintenu à un niveau de consommation fort honorable, ne pourra répondre à toutes les sollicitations si les offres ne se diversifient pas davantage. On décèle déjà certaines orientations éditoriales pour 2002 (shôjo chez Pika, nostalgie chez Kana), mais rien finalement pour l’instant de très neuf, si ce n’est chez Ego comme X, qui prend résolument le parti de s’adresser à un autre public avec La Nouvelle Manga. Mais le manga se capitalise toujours autour d’un lectorat d’initiés. Pour que les nouveaux venus trouvent leur place sur le marché manga, il s’agira donc pour 2002 de diversifier les zones de chalandises, avec des propositions éditoriales différentes, de faire connaître le manga au plus grand nombre à travers une démarche de communication offensive : on attend donc avec impatience le positionnement d’un Delcourt dans la course éditoriale. Tous nos chiffres sont de source éditoriale, nous remercions à ce titre l’ensemble des éditeurs pour avoir accepté de nous les communiquer.
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