Mondial de la maquette et du modèle réduit

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Qu’on le veuille ou non, le monde de la maquette fait partie intégrante de l’histoire de l’animation japonaise, mais surtout de tous les titres de fiction, télévision et cinéma. Quantité de modèles ont été réalisés depuis 50 ans (des collections impressionnantes de monstres à la Godzilla, de vaisseaux de Space Cruiser Yamato, des robots de Tôei) avec un âge d’or dans les années 80 et l’arrivée des robots Gundam. Ce juteux marché – plus grand encore que celui des Etats-Unis, pourtant prompt à proposer des maquettes de films de SF ou fantastiques -, semble pourtant échapper – sinon à l’Europe, du moins à la France, trop souvent limitée à des imports très irréguliers.

On ne trouve en effet que quelques maquettes distribuées par Mattel pour la collection Shogun Warrior en 1978, de nombreuses maquettes Arii et Imai (importées en 1984 par Soclaine incluant des modèles de Macross), la collection Robotech de Revell sur la même période ; et enfin, dernièrement, les maquettes Gundam de Bandai. Un bon moyen pour se rendre compte de l’évolution du marché déclinant de la maquette (et pas seulement dans le domaine de la fiction, SF et fantastique compris) en France, était d’assister au Salon consacré aux modèles réduits.

Un peu d’histoire

C’est en 1979 que débute le premier Salon Mondial de la maquette, au CNIT de La Défense. C’est déjà un ballet étrange qui se déroule sur plusieurs milliers de m2, où voitures radiocommandées, avions, bateaux, trains étonnent les visiteurs par leur variété, la qualité des décors ferroviaires, et plus généralement l’inventivité déployée pour les maquettes dites « statiques ». Plus de dix ans plus tard, le salon se déplace dans le Hall 1 du Parc des expositions de la Porte de Versailles, à Paris. Il attire alors plus d’une centaine de milliers de visiteurs. Cela place cet événement au top ten des salons du lieu. Mais étrangement au fil des années, c’est l’espace qui s’est réduit – tant pour l’exposition que les boutiques -, même si les espaces démonstration (aérienne, navales, quatre roues) ont nécessairement gardé un volume important.

Durant cette période, s’est esquissée une tendance, qui n’a pas inquiété outre mesure les représentants de ce monde de la maquette : le vieillissement inexorable de leur clientèle, et le départ significatif vers les jeux vidéos des plus jeunes. Le train n’attire plus guère que les retraités, les maquettes sont trop compliquées à monter, le modélisme naval ou aérien réclame non seulement trop de temps, mais aussi trop d’argent.

Au milieu de tout ça, difficile de faire se dégager des maquettes tout droit tirées de titres de fiction, quand bien même s’agit-il de Star Wars (malgré la présence récurrente de l’association Hobby Wan pendant plusieurs années), de 2001 l’odyssée de l’espace (magnifique exposition bienvenue en 2001 par Jean-Marc DESCHAMPS de Dixième Planète), ou encore moins d’anime. Bien que Bandai ait déjà pris le soin d’y présenter ses maquettes Gundam, faciles à monter, les robots ou monstres japonais, très appréciés Outre-Atlantique, n’ont visiblement pas droit de cité en France. Et qu’en est-il cette année ? La tendance s’inverse-t-elle ? Ou bien le maquettisme restera-t-il résolument une activité de retraités ?

Salon de la maquette 2004

Cette année, c’est toujours dans le Hall 1 (30.000 m2) qu’a eu lieu le salon, du 9 au 18 avril dernier. Dès l’entrée, les espaces de démonstrations impressionnaient autant que d’habitude, avec peu de nouveautés cependant, même si voir évoluer des montgolfières en milieu fermé a de quoi surprendre. Une reconstitution sur le plan d’eau était prévue pour le 60e anniversaire du débarquement en Normandie. Un stand Dassault était là pour défendre les couleurs de l’aviation civile et militaire française, à grand coup d’impressionnantes reproductions à échelle réduite (voir le site officiel). Présence remarquée également de l’armée, avec un espace reconstituant un terrain d’action pour un blindé contrôlé dans des cabines à l’aide de caméras : on s’y croirait. L’actualité aidant, on y faisait également une démonstration d’un robot démineur…

Les grands labels et sociétés intéressés par le marché de la maquette et du modélisme étaient évidemment présents : Revell, Tamiya, Jouef, Marklin, les importateurs comme Cocktail diffusion (Verlinden, Mr Hobby, Italeri…)… Mais mis à part des catalogues souvent payants, matériel et modèles n’étaient disponibles que dans de rares boutiques.

La visite se terminait par ces dernières, dont le nombre se réduit d’années en années. Particularité pour 2004 : au moins deux d’entre-elle proposaient des prix sacrifiés pour cause de faillite. Finalement, il y avait plus de choix concernant l’outillage, à tous les niveaux, avec de très bons prix et des outils très spécialisés. Le salon est à ce niveau le meilleur moyen de faire le plein d’outils performants – de la lime à l’aérographe, en passant par les pinces coupantes. On peut, à ce sujet, tomber sur d’improbables objets qui facilitent vraiment la vie, mais augmentent d’autant le budget nécessaire au maquettiste affirmé d’obtenir le meilleur résultat !

Enfin, le salon accueillait, le dernier week-end, un coin animé par et pour les collectionneurs, la Bourse aux échanges, où l’on pouvait trouver de petites merveilles parfois à petit prix, plus souvent à des tarifs prohibitifs. La plupart du temps, les maquettes proposées faisaient partie de collections de particuliers, datant de plus de 20 ans. L’intérêt de cette Bourse réside moins dans la trouvaille d’une maquette inédite ou ancienne, que dans la rencontre avec de vieux collectionneurs et le contact avec le passé et les vieilles boîtes aux illustrations délavées. Au milieu de tout cela, au moins un stand présentait exclusivement des maquettes japonaises, dont une collection complète des maquettes du Dr Slump.

Associations et particuliers

Ce sont surtout des associations de modélisme ou de fous du monde ferroviaire qui se déplacent au salon pour y présenter leurs oeuvres. Les dioramas pour les trains sont particulièrement impressionnants, à tous les niveaux et quelle que soit l’échelle. Cette année, on y découvrait comment réaliser de petites figurines au 1/87 (appelée aussi échelle HO) en… papier ! L’auteur avait même réalisé un diorama d’une scène musicale avec Claude FRANÇOIS. Un peu plus loin, on nous présentait les méthodes pour fabriquer des arbres, ce qui semble facile à première vue, mais demande quand même de la pratique et de l’oeil.

Figurinistes et maquettistes ne sont pas en reste. De superbes figurines, réalisées à la peinture à l’huile (une technique qui demande du temps et plusieurs jours de séchage) étaient présentées, et des démonstrations étaient organisées régulièrement en journée. Les principales sociétés fabriquant et distribuant des figurines en « plomb » présentaient également de fort belles figurines, et le matériel nécessaire pour les monter et les peindre. Prince August, par exemple, présentait de nombreuses peintures acryliques vinyls (avec les teintes pour les collections « crèche » militaire, fantastique…) avec des peintures pour les pinceaux et d’autres traitées spécialement pour l’aérographe.

Côté maquettes, où visiblement le thème « réaliste » était de rigueur, le stand IPMS se différenciait avec les modèles proposés et fabriqués par Jean-Christophe CARBONNEL (www.modelstories.com ; si vous visitez leur site, pardonnez-leur les nombreuses fautes concernant le monde de l’anime !) sur la base de véhicules ou personnages de BD (Tintin, Caste des métats barons, Yoko Jino…). Mais pour voir d’autres sujets liés éventuellement au dessin animé ou à des films fantastiques, c’était du côté des vitrines remplies par les particuliers qu’il fallait se tourner.

Les concours

Le concours Gulliver était cette année séparé en plusieurs thèmes. Parmi les huit catégories, celle qui nous intéressait le plus était le coin Figurines, science-fiction fantastique et divers. C’est là que l’on pouvait apercevoir les (trop) rares modèles tirés d’anime ou inspirés par les manga… On y retrouvait des full-scratch (réalisations maison) de Saint Seiya et de Lodoss – que nous avions déjà apprécié ces dernières années à Cartoonist et Japan Expo -, une figurine de Ryo Saeba et d’Iria, et Bart des Simpson (maquette vendue par Revell). Mais il y en avait vraiment pour tous les goûts, notamment des personnages de comics ou de films connus (Indiana Jones, Alien, Star Wars…). Et même si le niveau n’était pas toujours le même quant à la qualité de réalisation, les prix étaient en général largement justifiés.

Si parfois, le manque d’expérience ou de compétence pouvait expliquer la qualité déplorable de certaines réalisations (notamment dans la catégorie Figurines), l’imagination et les trouvailles de certains maquettistes laissèrent pantois. Ces vitrines sont soit une source d’idées précieuses… soit d’exemples à ne pas suivre.

Salon du jeu

N’oublions pas, malgré ce quart de siècle passé au service du modèle réduit, la partie du salon consacrée aux jeux : le Salon du jeu fêtait, lui, son 16e anniversaire. Visiblement, le seul moyen que les organisateurs de ces deux salons aient trouvé d’avoir des représentants en figurines de jeux de rôle était de les lier au Salon du Jeu. On trouva donc, pêle-mêle, des jeux de société – très pratiques pour calmer les bambins en visite avec leurs parents -, d’inévitables jeux de cartes à la mode Yu-Gi-Oh !, un stand vendant uniquement des dés, cette année un coin simulateur de vol sur ordinateur, et de très intéressants stands pour rôlistes présentant les dernières nouveautés – voire des exclusivités comme ce fut le cas chez Rackham.

Et l’avenir…

Si l’amateur de maquettes et de modèles réduits statiques ou motorisés pouvait y trouver son compte, l’amateur de SF, de fantastique pouvait éventuellement faire le plein de bonnes idées au Concours Gulliver, acheter quelques modèles dans les rares boutiques spécialisées (Pulp’s par exemple), tiquer sur les produits guère en rapport avec le salon, au stand Atomic Club, et faire le plein de figurines pour jeux de rôles. Mais c’est bien tout. Un salon « mondial » qui ignore ainsi superbement un pan entier du maquettisme – sachant tout ce que le Japon a de magnifique à proposer – est toujours un brin décevant.

Cependant, le tableau n’est pas aussi sombre que le maquettiste aguerri pourrait le croire. Ce salon est devenu un véritable espace de rencontres – où de nouvelles générations découvrent et apprécient, tous domaines confondus, les magnifiques réalisations françaises. Créer des arbres, choisir la bonne peinture, utiliser un aérographe, voilà que même les filles s’y mettent, et que des pré-adolescents se penchent sérieusement sur tout cela !

La grande nouveauté en 2004 aura donc surtout été un public plus jeune et plus curieux que d’habitude, les représentants, n’en doutons pas, d’une nouvelle génération qui saura apporter, qui sait, sa « culture manga » dans ses bagages et ses futures réalisations.

A consulter :

www.salon-maquette.com

www.modelstories.com

www.hobbyforever.com

www.confrontations.com(Rackham)

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