Mondo Mulloy

0

Conformément au principe des cartes blanches que le Forum des Images offre tous les mois à des réalisateurs d’animation, Phil MULLOY présentait dans une première partie (à 19h) des films ayant eu une influence sur son travail, puis (à 21h) ses propres films. Ayant étudié la peinture au Royal College à Londres, il se consacra pendant 15 ans à la réalisation de moyens et longs métrages en prise de vue réelle, avant de revenir au dessin à la fin des années 80. Les films qu’il présenta en première partie de soirée s’apparentaient à des coups de coeur plutôt qu’à des influences, le réalisateur avouant être « très mauvais public » en matière d’animation.

Rude épreuve

Le premier, Sub (2001), de Jesse SCHMAL, avait été choisi pour son humour singulier, et le second, Mid-Air (1986), rendait hommage à Eva NEUBAUER, épouse de MULLOY et sa « seule véritable influence ». Ce film troublant mettant en scène une sorcière, mélange de marionnettes et de prise de vue réelle, déclencha plusieurs réactions de rejet dans la salle. Après le foutraque Panique au village de Vincent PATAR et Stéphane AUBIER (1) (animation image par image de figurines en plastique cow-boy, indien, animaux de la ferme…), les films suivants soumirent les yeux et les oreilles des spectateurs à rude épreuve. Docteur Jekyll and Mister Hyde (2001) de Paul BUSH était une relecture du roman de STEVENSON, utilisant la prise de vue image par image de manière ingénieuse : le personnage principal se dédouble en permanence, joué alternativement par deux acteurs. À déconseiller aux épileptiques. Hôpital brut (1998-99), du collectif « le Dernier Cri », était un déchaînement d’images éprouvant (sur l’heure que dure le film, seules 10 min ont pourtant été projetées…), tandis que Heart of the world (2000) de Guy MADDIN reprenait l’esthétique outrancière des films de propagande russes. Alone. Life wastes Andy Hardy (1999) de Martin ARNOLD détournait des extraits des vieux films hollywoodiens en multipliant les retours en arrière et les ralentis suggestifs, transformant ainsi notamment une innocente étreinte maternelle en fougueux préliminaires.

« On ne m’arrêtera pas »

La seconde partie de soirée a consisté en une avant-première de Mondo Mulloy, un programme reprenant 11 de ses courts métrages, et qui sera proposé en salles le 28 avril. Parmi ceux-ci, une majorité appartient aux séries satiriques Cowboys (1992), The Ten commandements (1994-96) et Intolerance (2000-03), tandis que The wind of changes (1996) notamment, fondé sur les souvenirs du violoniste roumain Alex BALANESCU, explore une veine plus émouvante. Pour la plupart auto-produits et rapidement exécutés, les films de MULLOY usent avec force d’un graphisme minimaliste faisant apparaître les humains sous la forme de pathétiques squelettes aux dents saillantes pour mettre en valeur des messages politiques et/ou métaphysiques. La plupart des questions du public en fin de séance ont porté sur la réception de ces films. À propos de The Ten commandements, MULLOY déclare : « Mon but n’est pas de faire des films anti-religieux. C’est l’hypocrisie de ces commandements, qui imprègnent les sociétés occidentales, qui me gêne, ainsi que l’utilisation de la religion à des fins politiques ». Ou encore : « Ce ne sont pas les êtres humains que je critique, mais les structures qui les régissent. Se lever le matin pour aller travailler, ça n’a aucun sens. Je fais la même chose, mais ça n’en n’est pas moins absurde ». Inévitable question : « Arrivez-vous à vivre de vos films ? » Réponse : « Je suis toujours là aujourd’hui, non ? C’est de plus en plus difficile, mais on ne m’arrêtera pas ».

Mondo Mulloy, 11 courts métrages de Phil MULLOY, en salles le 28 avril.

A voir : des photos et des extraits des courts métrages de Phil MULLOY sur le site de Ed Distribution.

Parlez-en à vos amis !

A propos de l'auteur