En plus des contenus exclusifs que vous pouvez trouver dans nos magazines, nous vous proposons du “Contenu +”, venant le compléter. Pour le numéro 213 d’AnimeLand, nous avons rencontré Pierre Séry, éditeur passionné et inspiré à la tête de Kotoji Éditions, qui a fait du manhua sa spécialité !
Pouvez-vous nous parler du contexte de la création de Kotoji ? Avez-vous toujours voulu faire du manga asiatique hors Japon ?
Si l’on revient aux racines de Kotoji, tout a commencé lorsque je suis arrivé à Nancy en 2005 pour raisons professionnelles. Je débarquais dans une ville que je ne connaissais pas. Pour me faire des amis, j’ai monté une association pour promouvoir le manga. Dans ce cadre, nous avions notamment créé un fanzine ou encore organisé plusieurs rencontres avec des auteurs français mais aussi chinois, en partenariat avec feu les éditions Xiao Pan (éditeur à l’origine de l’arrivée de la BD chinoise en France).
Lorsque les dessinateurs du fanzine m’ont demandé comment faire pour sortir des albums individuels, ma réponse a été « On crée une boîte » ! Je suis allé chercher mon vieil ami, Pierre-Nicolas TAILLARDAT, dont le métier était d’aider les créateurs d’entreprises, pour se joindre à moi dans cette aventure. On ne connaissait strictement rien au milieu du livre, du coup on s’est retroussé les manches et on a tout appris par nous-mêmes.
On a commencé par sortir les titres des auteurs du fanzine que j’avais créé, en format franco-belge et en vendant nos titres sur les salons. On a ensuite été repérés par un diffuseur qui nous a permis de proposer nos livres en librairie partout en France.
Dès le début, j’avais l’intention de me lancer dans l’aventure du manga asiatique hors Japon, du fait des expériences que j’avais eues avec les éditions Xiao Pan, qui m’avaient fait découvrir un paquet d’auteurs de talent. La liquidation judiciaire de cet éditeur m’a motivé pour essayer de reprendre le flambeau mais en tenant compte des raisons pour lesquelles ils n’étaient plus là !
Comment définiriez-vous les titres que vous publiez ?
Notre volonté est de publier le meilleur de ce qui se fait en Asie hors Japon. Pour le moment, nous éditons des titres en provenance de Chine continentale, Taiwan et Hong-Kong, mais nous regardons aussi ce qu’il se passe ailleurs, même si nous avons encore pas mal de boulot pendant quelques années avec ces trois territoires.
Lorsque nous choisissons un titre, nous nous intéressons bien sûr à l’histoire mais avons également de grandes exigences quant à la qualité graphique des titres.
Quel est le titre de votre catalogue qui vous tient le plus à cœur ?
Je vais tricher et vous citer deux titres : Crystal sky of yesterday et Blood & Steel.
Crystal sky of yesterday est le titre qui a inauguré le lancement de notre label ASIAN DISTRICT et Pocket Chocolate, son auteur, est tout simplement l’un des grands maîtres asiatiques de la couleur. En Chine, c’est une énorme star. Ce titre compte énormément pour nous, du fait du tournant qu’il représente dans notre catalogue. C’est aussi une histoire qui nous replonge dans la fin de l’adolescence et qui est d’une justesse incroyable.
Blood & Steel est pour moi le meilleur titre de notre catalogue. Je suis depuis ma plus tendre enfance un fan d’arts martiaux. Je n’ai jamais lu un manga qui décrit les arts martiaux d’une manière aussi passionnante et juste. Les scènes de combat réalisées dans cette série sont époustouflantes et rivalisent je pense avec les grands titres japonais du genre.
Bon et si je cite aussi ces titres, c’est aussi que les auteurs sont devenus de véritables amis.
Après la fermeture d’autres maisons d’édition françaises faisant du manga asiatique (non japonais), comment vous situez-vous sur le marché ?
C’est un phénomène assez inquiétant en effet, mais nous sommes très sereins sur notre avenir car nous ne dépendons pas de la maison d’édition pour vivre, ce qui est très confortable pour durer. Ce n’est pas toujours facile car un bide à Japan Expo comme nous l’avons vécu cette année nous met en difficulté sur plusieurs mois. Mais nous avons les reins très solides justement parce que nous ne vivons pas de l’édition et que nous développons une stratégie très prudente en ne nous lançant pas de manière inconséquente sur des séries à rallonge.
Nous ne représentons pas grand-chose sur le marché, mais nous prenons notre temps et la maison d’édition grandit d’année en année. Nous commençons à avoir des lecteurs qui achètent les nouveautés ASIAN DISTRICT les yeux fermés parce qu’ils nous font confiance et qu’ils ont aimé nos titres précédents. Petit à petit, et lecteur par lecteur, nous continuerons de grimper !
À titre personnel, vous êtes éditeur mais vous avez aussi une autre profession. Comment concilie-t-on les deux ?
C’est une question d’organisation et de caféine ! Je pense avoir trouvé le juste équilibre. Je vais un peu vous raconter ma vie mais bon, en général une journée classique se déroule de cette manière :
Le matin je me lève entre 5 h 30 et 6 h pour travailler sur mes projets Kotoji pendant mon petit déjeuner. Mes enfants se lèvent vers 7h et je m’occupe d’eux et les emmène à l’école.
Je commence ensuite ma journée de travail pour mon autre boulot. Pendant la pause déjeuner, en général, je ne mange pas pour pouvoir travailler à nouveau sur la maison d’édition ou faire du sport.
Je reprends ensuite mes activités l’après-midi. J’essaie le plus souvent possible de dîner avec mes enfants, mais ce n’est pas toujours évident parce que je rentre tard. Une fois qu’ils sont couchés, j’essaie de passer le plus de temps possible avec ma femme (quand je n’ai pas de sport). Lorsqu’elle se couche à son tour, je me remets sur Kotoji tout en me regardant un film ou une série en même temps, et puis je vais au lit entre 2 h et 4 h du matin selon les jours.
Je tourne à la caféine sans faire trop d’excès et puis on a la chance aujourd’hui (ou pas) d’avoir des outils informatiques connectés pour pouvoir travailler de n’importe où à toute heure. Et puis, on a encore les week-ends, jours fériés et congés pour encore trouver du temps pour bosser sur la maison d’édition. On optimise au maximum le temps disponible !
Merci à Pierre Séry pour sa sympathie et sa disponibilité. Nous vous invitons à suivre le travail de Kotoji sur leur site Internet et leur page Facebook !
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