Polar mythique au Japon, Sanctuary n’a pourtant eu droit qu’à une maigre adaptation animée en OAV il y a 25 ans : l’occasion pour nous de militer pour un retour en force de ce titre aujourd’hui !
Selon Akira Hojo et Chiaki Asami, le Japon va mal. Les deux amis d’enfance, rescapés des camps d’extermination des Khmers Rouges, décident donc de réinitialiser son système pour le rebâtir sur de meilleures fondations. Pour cela, ils devront batailler séparément, chacun s’infiltrant dans un des organes de pouvoir majeurs de leur pays. C’est une partie de pierre-feuille-ciseaux qui répartit les rôles : Chiaki intègre la sphère politique avec pour objectif de devenir le plus jeune député de la Diète, pendant qu’Akira se fait enrôler dans la pègre, grimpant peu à peu les échelons de la hiérarchie yakuza. Travaillant conjointement dans l’ombre et la lumière, les deux amis indéfectibles feront tout pour parvenir à leur fin : faire du Japon leur sanctuaire !
Lancé en 1990, Sanctuary s’inscrit dans son époque, celle de la fin de la bulle économique spéculative d’un Japon qui voit son économie s’effondrer et, avec elle, la confiance du peuple envers des politiciens plus corrompus les uns que les autres. Au scénario, on retrouve Sho Fumimura, deuxième nom de plume de Yoshiyuki Okamura, plus connu en tant que Buronson. Après une première collaboration infructueuse en 1979, il retrouve le dessinateur Ryôichi Ikegami pour leur premier succès qui s’étalera sur 12 tomes jusqu’en 1995. Si Sanctuary est accueilli à bras grands ouverts par le lectorat du magazine seinen Big Comic Superior, c’est pour son réalisme, tant dans les dessins intégrant des décors photographiques (notamment de la Diète, le parlement japonais) que dans son intrigue qui explore les bas-fonds d’une politique mêlant sans scrupule corruption et nationalisme exacerbé fleurant le fascisme. On pourra d’ailleurs reprocher le manichéisme qui émerge, chapitre après chapitre, entre politiciens obscènes et notre duo de héros vertueux et irréprochables (des yakuza refusant de faire du trafic de stupéfiants, ça ne se voit que dans les mangas !). Pourtant, derrière leur vernis de chevaliers blancs, ils promeuvent eux aussi des idées litigieuses !
Ancrée dans le réalisme, la série de mangas engendre en toute logique un long métrage live, qui sort dans les salles obscures nippones le 21 janvier 1995 et offre à Hiroshi Abe (Chiaki) et Toshiya Nagasawa (Akira) leurs premiers grands rôles. Il aura droit à deux suites en direct-to-video, mais également à une OAV qui sort dans les bacs le 1er mai 1996. Conscient du potentiel de la licence, le studio PASTEL fait appel à deux pointures pour adapter Sanctuary, le scénariste Kenji Terada (les trois premiers jeux Final Fantasy, Dirty Pair, Kimagure Orange Road) et le réalisateur Takashi Watanabe (Slayers, Boogiepop Phantom). Le succès du manga est tel que ses auteurs collaborent à nouveau avec Heat et Strain, pour lesquels le scénariste reprendra son pseudonyme Buronson, deux autres polars dans la lignée réaliste de Sanctuary. Hélas, ce titre mythique est aujourd’hui quasi introuvable en France, suite à l’arrêt d’activité de son éditeur, Kabuto ! La première génération de lecteurs de manga s’intéressant désormais de près à la politique, les prochaines élections présidentielles seraient la parfaite opportunité pour rééditer ce titre mythique…
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