Personnalité de la semaine : Kaiji Kawaguchi

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Une exposition en Alsace, deux conférences (Guebwiller le 2 mai, Paris le 4 mai) : l’expérimenté mangaka Kaiji Kawaguchi gâte les Français et fait la une de l’actualité manga !

Après avoir gouverné un démineur durant la seconde guerre mondiale, son père se retrouve aux commandes d’un paquebot sur la mer intérieure de Seto, où il embarque souvent ses enfants avec lui. On comprend mieux pourquoi Kaiji Kawaguchi et son frère jumeau Kyôji se passionnent très jeunes pour la mécanique… et pas uniquement maritime. Avions de chasse, tanks, navires de guerre, les deux enfants nés en 1948 accumulent les modèles réduits. Et quand ils n’en ont pas sous la main, Kaiji s’amuse à sculpter des sous-marins dans des morceaux de bois. Cette passion quasi-obsessionnelle et exclusive les coupe des camarades de leur âge, encore plus quand Kaiji Kawaguchi découvre le manga Submarine 707, qui ne fait qu’augmenter cet engouement.

En grandissant, au collège, les deux frères subissent un nouveau choc en découvrant Yojimbo d’Akira Kurosawa. Kaiji envisage alors de se tourner vers le métier de scénariste, mais la lecture de Mangaka Kanzoku Monogatari de Shinji Nagashima modifie ses ambitions : il deviendra mangaka ! Quand il intègre l’université de Meiji, il s’inscrit au club de recherche sur le manga, et découvre la bande dessinée occidentale, qui le subjugue. Alors que les émeutes étudiantes secouent le pays en 1968, Kaiji Kawaguchi, âgé de 21 ans préfère s’isoler pour lancer sa carrière avec un premier manga, publié dans Young Comics. Une carrière qui manque de peu de s’arrêter, puisque Kaiji est supposé reprendre le business de son père. Mais finalement, son frère Kyoji sacrifie ses rêves de musique pour gérer la société… ce qui ne l’empêchera pas, jusqu’à sa mort en 2013, de dessiner des petits albums pour sa ville d’Onomichi, dont il dirige l’association culturelle.

Les premières années sont difficiles pour le débutant, qui s’associe avec divers scénaristes. Tout bascule au milieu des années 1980. Tout d’abord, le mangaka publie un titre consacré au mah-jong, qui lui permet enfin d’atteindre le succès, Mahjong Pro jankai no hikari to kage, qui fait la fierté du magazine Kindai Mahjong. Mais aussi, son éditeur lui conseille d’agrandir les yeux de ses personnages, et d’ainsi s’adapter un peu mieux aux goûts du lectorat. Ce stakhanoviste finit ainsi par percer en 1988, vingt ans après ses débuts, avec The silent service, ou la sécession du capitaine d’un sous-marin conçu conjointement par le Japon et les États-Unis. Écoulé à plus de 30 millions d’exemplaires, ce titre en 32 tomes impose le style Kawaguchi : des dessins réalistes, des intrigues de politique-fiction, un sens du découpage hérité de Kurosawa, et le plus souvent possible, des véhicules ultra-détaillés.

Parmi ses titres les plus connus, Eagle (1997-2001, 5 tomes) suit la course à la présidentielle d’un député nippo-américain, Zipang (2000-2009, 43 tomes) téléporte un vaisseau de guerre contemporain à la bataille de Midway, Spirit of the sun (2002-2018, 17 tomes) imagine les conséquences d’un séisme ravageur au Japon… Adapté à de nombreuses reprises en live, le dessinateur de 75 ans continue aujourd’hui sa carrière avec Kûbo Ibuki et sa suite Great Game qui imagine l’invasion du Japon par la Chine. Légende du manga, Kawaguchi viendra témoigner de ses méthodes de travail au cours de deux conférences à ne pas rater au début du mois prochain tandis que Seizon Life connait une réédition chez Panini !

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A propos de l'auteur

Matthieu Pinon