Assez peu de personnes étaient présentes dans l’auditorium pour cette séance d’ouverture. Une séance d’ailleurs assez épique, puisqu’il s’agissait, en préambule à la diffusion du long métrage, de replacer l’oeuvre dans son contexte pour les néophytes. En effet, de La légende du géant Ideon, seul le deuxième film a été projeté : il était donc difficile de suivre l’action sans avoir préalablement vu le premier film.
Néanmoins, la diffusion de ce long métrage a permis de donner un aperçu d’une
série encore inconnue en France (les films sont des « compilations » de la série),
série qui a fait date au Japon, puisqu’elle y a obtenu l’Anime Grand Prix au début
des années 80. Toutes deux réalisées par TOMINO « Kill’em all » Yoshiyuki (pseudo
hérité de sa propension à faire s’entretuer ses personnages), Ideon se
présente un peu comme la deuxième grande série de robots après Gundam,
observant un traitement du genre similaire.
Open Art : une sélection de courts sur le net
Le festival des Nouvelles Images du Japon se distingue notamment par la projection
de programmes courts, souvent inédits en France. Samedi à 18h, place était faite
à l’association Open Art, portail qui propose depuis 1999 des courts métrages
diffusés gratuitement sur le Net. Comme le commenta ce spectateur à l’issue de
la séance, “il y eut du bon, du très bon et de l’excellent” parmi la
sélection opérée par le festival. Au programme : dix programmes courts proposant
de l’animation en volumes, des délires syncopés sur des scènes film live, du dessin
minimaliste, de la poésie, de l’absurde, de la performance… et toujours un gros
effort porté sur la bande sonore (musique et bruitages) pour soutenir le tout.
Lisez nos 8 questions à Open Art dans la suite du dossier.
Pour voir les films en ligne : http://www.nifty.com/eArtist/openArt/
Tokyo Godfathers
L’événement enfin de la soirée, c’était la projection de Tôkyô Godfathers, présenté par KON Satoshi en personne. Cette avant-première constituait en effet un événement tout particulier, puisque le dernier film du réalisateur est sorti il y a tout juste un mois au Japon. Pour ce troisième opus, KON s’affranchit des thématiques du double, de la réalité et du fantasme, qui constituaient le corps de Perfect Blue et de Millenium Actress.
Trois exclus errent dans les bas fonds de Tokyo, se serrant les coudes dans leur
détresse. Il y a Gin, le clochard bourru et alcoolique, Miss Hana, alias Uncle
Bag, un travesti ex-chanteuse de cabaret, et Miyuki, une jeune fugueuse. Lors
d’une soirée avinée, comme tant d’autres, ils trouvent parmi les poubelles un
nourrisson qui semble bien avoir été abandonné… Trouvant là un sens temporaire
à leur vie, les trois SDF se mettent alors à la recherche des parents du bébé
; une quête qui va mettre chacun des trois exclus face à sa blessure interne,
tous ayant un jour été confrontés à l’abandon. Cette aventure sera donc l’occasion
de crever des plaies, panser des abcès, à moins que ce ne soit le contraire…
Humaniste et onirique comme un bon Capra
KON Satoshi explore les tourments de l’âme et s’amuse encore une fois à balader
son spectateur : de coups de théâtre en évocations douloureuses, une étrange
édifice se bâtit.
Prenant comme cadre le Tokyo des exclus, Tôkyô Godfathers
s’inscrit définitivement dans une veine réaliste. Plus que jamais, l’aspect photo
réaliste des dessins de KON, et son attention portée au layout, prennent leur
sens, à travers une description minutieuse des bas fonds de la ville, la restitution
d’ ambiances parfois moites (ruelles étroites, vieux immeubles délabrés…). KON
s’attache à esquisser des scènes délicieusement réelles, communes à toutes les
mégalopoles ; ainsi, cette évocation tordante du métro, avec ses visages anonymes
écrasés contre les vitres, ses usagers à l’air absent qui pianotent agilement
sur leur portable, ou encore qui se bouchent le nez en détournant les yeux quand
des clochards entrent dans la rame…
KON s’attaque à des sujets brûlants et délicats, traités avec humour et sensibilité,
sans tomber jamais dans la mièvrerie : Miss Hana, travesti, tente de combler son
envie d’enfants ; Miyuki, petite fille riche et obèse étouffée par un père policier,
tente de s’affranchir de codes sociaux trop lourds ; Gin a abandonné épouse et
fille pour avoir sombré dans l’alcool et la drogue… Un traitement tout en douceur
pour un film qui traite de problématiques adultes et universelles. De situations
rocambolesques en happy end, KON nous offre un conte de Noël dans la plus pure
tradition hollywoodienne : si le dossier de presse nous parle de John FORD et
de son Fils du désert (Three Godfathers, un western aux relents
évangéliques, dans lequel trois brigands recueillent et s’occupent d’un bébé en
plein désert), on pense aussi à du CAPRA (La vie est belle) pour l’humanisme,
la simplicité et la générosité du propos, teinté d’onirisme. On ressort de Tôkyô
Godfathers revigoré et philanthrope.
Voilà donc pour la journée de samedi ; dans la suite de nos compte-rendus, retrouvez
les propos de KON Satoshi durant sa conférence publique du dimanche matin.
Remerciements à YWL et Olivier FALLAIX.
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