Souvenirs souvenirs. C’est vrai que ça fait longtemps.
Personnellement j’ai découvert AL avec le N°6, ça ne nous rajeuni pas. Elevé avec Dorothée et Goldorak, je me délectai de ces dessins animés qui nous sortaient enfin du cadre trop polissé des Walt Disney. Je me revois encore faire sauter l’entrainement de foot du mercredi et aller regarder Goldorak en ville, à travers la vitrine du marchand de télévision. L’entraineur ne m’a pas souvent vu cette année-là. Puis ce fut capitaine Flam, Ulysse 31, Dragon Ball, les chevaliers du zodiaque, Juliette je t’aime. Je regardais tout ce qui passait.
La découverte d’AL je l’ai fait à travers un autre magazine dont j’ai oublié le nom. Je me rappelle juste qu’il décrivait ce fanzine en terme élogieux. Je me suis abonné sans hésiter, et je ne l’ai pas regretté.
Enfin je pouvais découvrir une description des animes et des mangas en provenance du Japon. Et surtout quel plaisir de trouver sur le papier des dessins de toute beauté, à l’esthétique si particulière.
AL ça a été une porte vers un autre monde, vers celui merveilleux de Myasaki, du studio Ghibli, des excellents Ghost in the Shell ou Cowboy Bebop, du monument Evangelion.
Cette passion m’a poursuivi pendant quelques années, mais je dois bien avouer qu’elle a fini peu à peu par s’atténuer. AL a réussi son pari, l’animation et les mangas ont envahi la France, prenant enfin la part qu’ils méritent dans notre paysage audiovisuel. Mais personnellement je me suis senti submergé par cette vague.
Au départ il fallait passer un temps fou pour découvrir ne serait-ce qu’un dessin dans un magazine, ou plus tard un lien bien caché sur Internet vers une des séries en vogue. C’était difficile mais on était récompensé par la qualité de ce qu’on trouvait. La rareté faisait que seuls les meilleurs sortaient du lot. Je me rappelle encore la claque que j’ai pris en découvrant Read or Die avant même qu’AL en parle.
Depuis quelques années le marketing s’est emparé du phénomène, et on se retrouve enseveli sous une tonne de dessins animés ou de mangas en tout genre, dont plus rien ne ressort. On passe maintenant dix fois plus de temps à trier le bon grain de l’ivraie, à se rendre compte que tout se ressemble.
C’est vrai j’ai vieilli, je n’ai plus autant de temps, et j’en ai tant vu que je suis peut-être blasé. Mais je ne peux m’enlever de l’idée que l’âge d’or est derrière nous. Il est bien rare aujourd’hui que je vibre en découvrant un manga qui sorte enfin du lot, et question anime c’est bien simple j’ai arrêté de chercher. Je préfère maintenant éduquer mes enfants en leur montrant ce que j’ai aimé, des vieilleries peut-être, mais avant tout des valeurs sûres. Bientôt ce sera leur tour de me faire découvrir ce qu'ils ont aimé.
Et AL dans tout ça ? Il n’a pu que suivre le phénomène à mon avis, se retrouvant étouffé par le nombre de sorties toujours plus grandissant, et par la pression des services marketing des maisons d’éditions. Notre relation s’est terminée au N° 134, soit plus d’une centaine de N° ensembles, une belle histoire quand même.
Il ne fait pas bon vieillir me direz vous. Et pourtant je suis bien content d’avoir vécu cette époque là. Je ne peux que souhaiter aux jeunes d’aujourd’hui, dans ce monde où tout va trop vite, de retrouver la même envie et le même plaisir de la découverte qu’était le notre en ce temps-là. Le problème, c'est que notre plaisir était accentué par notre frustration, ils n'auront pas cette chance.
Longue vie à AL, longue vie à tous.
