Du récit et de l'art de conter

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Posté dans : Délire & Divers

  • Baklael
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    Baklael le #246461

    Citation (Le banquizz vous est présenté par les maisons closes “La glace bouillante”)
    – Papa ! C'est quoi un bon récit ?

    – PAPA ! C'est quoi un bon récit !?

    – PAPA ! C'EST QUOI UN BON RECIT ?!

    – Papa ! Comment on fait les bébés ?

    – Ecoute Baklael… Va te laver ; je t'emmène aux putes. (à lui même) 26 ans et ne pas savoir comment on fait les bébés… Faut vraiment tout lui apprendre à celui là ! Heureusement qu'il y a un établissement de La glace bouillante pas loin !

    Un, deux ! Un, deux !

    Test.

    Ok !

    Hum ? On est déjà en direct ?!! Les pubs sont déjà finies ?!!

    Diantre ! Quelle surprise…

    Euh… oui, donc nous sommes de retour dans notre émission, le Banquizz, qui a pour thème aujourd'hui le récit. Nous avons déjà passé au crible de notre expertise bien des sujets dans Banquizz, mais celui ci risque de faire couler beaucoup d'encre (plusieurs de nos invités étant des poulpes et des calmars).

    Avant la publicité nous avions abordés deux points importants : La suspension d”incrédulité (ou le réalisme et la crédibilité dans le récit) ainsi que l'importance de l'influence.

    Nous avions d'ailleurs un peu débordé sur les autres émissions, la notre étant en direct, mais nous voici dans notre créneau horaire et il est temps de faire parler la poudre en nous remémorant ce qui a déjà été dit.

    Concernant la suspension de la crédibilité nous avions plusieurs positions soutenues par plusieurs personnes.

    Le débat fut soulevé par votre humble serviteur si ses neurones fonctionnent encore correctement depuis qu'il fait de nouveau partie de la France qui se lève tôt -et qui se casse le dos…- quand il reprocha à Vinland Saga de Makoto Yukimura de prendre trop de liberté avec les caractéristiques physiques de ses personnages alors qu'il se déroulait dans un cadre ancré dans la réalité par son côté historique.

    Il lui fut répondu par Kuronoe qu'un auteur faisait ce qu'il voulait dans son récit.

    Intervient alors Lord Yupa qui estima que le contexte était la chose réellement importante quand on discutait crédibilité et réalisme.

    Ce fut à ce moment que surgit Bub (ou peut être avant) qui lui estimait que la force délirante des personnages ne posait pas problème car traitée sous l'angle du second degré. Position où il fut rejoint par Lord Yupa par la suite.

    N'oublions pas les interventions de Feanor qui n'était pas gêné par le caractère irréaliste des compétences physiques dans le récit et pour qui les interactions entre les personnages étaient ce qui prévalait.

    D'autres apportèrent leur pierre à l'édifice, mais ceci n'est que le résumé de la première partie. Vous pouvez d'ailleurs la retrouver intégralement ici.

    (On peut peut être remonter jusqu'au post de Lord Yupa en haut de page, en fait…)

    Notons aussi que deux réalismes furent abordés, le réalisme historique et le réalisme biologique. De même notons que nous avons rapidement dépassé la notion de réalisme pour parler de crédibilité (qui parfois inclus le réalisme selon moi) et de “suspension d'incrédulité”, terme dont je suis amoureux ! (Et que j'ai déjà utilisé plus haut)

    Ce débat est allé assez loin, mais je ne suis pas certain que nous en ayant vraiment fait le tour. Après tout, nous n'avons pas atteint le point Godwin ! 😂

    Toujours dans le première partie de l'émission, un débat est né sur les influences. Celui ci est encore jeune et c'est dans cette deuxième partie de l'émission que nous allons le poursuivre puisque nous avons commencé un peu trop tôt et que la première partie s'est déroulé en lieu et place d'autres émissions traitant de Vinland Saga et de Soul Eater et les (bons) manga de sorciers, magie, pouvoirs surnaturels.

    La première piste de réflexion fut lancée il y a longtemps de cela, par Feanor quand il rapprocha Harry Potter et Naruto. Une discussion s'était engagée à l'époque et il m'avait semblé peu probable que Kishimoto, auteur de Naruto ce soit inspiré de Harry Potter, quoique…

    Ceci fut relancé par ce même Feanor il y a peu quand il établissait une liste de titres ayant été inspirés par Harry Potter

    Sur les ressemblances entre Harry Potter et Naruto, votre serviteur ne pouvait que le rejoindre. Mais le débat déboula sous la forme d'Akiko qui estimait qu'il n'y avait aucun lien entre les deux, si ce n'est quelques clichés très répandus.

    Vous retrouverez cette discussion (assez courte) sur le lien ci dessus.

    Et je me permettrai de reprendre ici le débat en attendant que d'autres intervenants viennent participer.

    Previously by Akiko :

    Citation (Akiko)
    T'inquiète Feanor, de mon côté tout ça me fait bien marrer 😂 !! Je trouve simplement très vain de vouloir rapprocher certains titres de d'autres en oubliant ce qui fait précisément toutes leurs différences pour servir un argumentaire déjà arrêté dans tous les cas. Par exemple pour l'école de Ninja de Konoha, il serait facile de contrer en mentionnant le nombre incalculable de manga et d'anime se passant des des écoles de tout et n'importe quoi, les écoles de Ninja ne faisant pas exception (cf la bonne vieille Académie des Ninja que tu cites d'ailleurs). Quant au rôle politique d'un village caché, étant donné que les ninja sont par définition des mercenaires servant à des fins politiques d'espionnage, il me semble que ça coule de source. Mais bon je vais m'arrêter là car vous avez bien compris ce que je voulais dire 😛


    D'abord le détail. Nous aurions plutôt du parler de géopolitique, plutôt que de politique pour les ressemblance. Les situations sont les mêmes pour Konoha et Poudlard. (Je te renvoies à ce que disait Feanor, un village/une école par pays et rôle très approchant -dans les deux cas ils forment les jeunes combattants et participent activement à la défense du pays-)
    Pour le côté politique on le découvre plus tard dans Naruto (tout comme dans Harry Potter) et dans les deux cas, la politique est vue comme une ennemie.

    Sinon, il est au contraire très intéressant de rapprocher les titres qui utilisent les mêmes méthodes ou techniques. Et c'est ce qui nous intéresse ici. On ne parle pas plagiat façon Mashima sur Oda. On parle de technique narrative (créer un lieu caché, plus ou moins autonome et important ouvre d'innombrables perspectives narratives. Certaines sont d'ailleurs partagées par Naruto et HP).

    Que Naruto et HP soient similaires sur tellement de points, même en prenant en compte que ce sont tous les deux des récits initiatiques et tout en abordant des thèmes différents, de manière différentes, sur des supports différents mais avec des axes narratifs, des éléments de “décors” si proches tout en rencontrant autant de succès est quelque chose d'important.

    La question c'est “y a t-il une recette miracle pour toucher le plus de personnes possibles ?”

    Question qui en soulève tout en tas d'autres. Le public peut-il rester dupe pendant longtemps ? Est ce qu'on touchera toutes sortes de personnes où juste une majorité en laissant de côté toute une frange de la population qui n'y sera jamais réceptive ? Quelle place pour le talent ? Et qu'est ce que le talent quand on parle de raconter des histoires ? Bref, plein de questions.

    Et puis quelle est cette recette ? Qu'est ce donc qu'on bon récit ? Est ce un récit qui touche une majorité de personnes ? Où un récit qui n'en touche qu'une partie choisie d'avance (ou pas) ?

    Bon, il faut maintenant que je choisisse un angle d'attaque, sinon vu le nombre de trucs différents abordés personne ne pourra réagir…

    Essayons donc de découvrir cette recette. Nous n'y arriverons pas, c'est certain. Mais de nos réflexions nous pourrions tirer pas mal d'enseignements.

    Dans ma vision un récit doit se suffire à lui même. Il ne doit pas nécessiter de connaissances spécifiques. Il ne doit pas nécessiter l'existence d'une habitude. Par exemple, beaucoup de manga sont de mauvais récits parce que justement ils nécessitent la familiarité avec certains concepts. Les hectolitres de sang, les personnages cinglés mais seulement par moment (le reste du temps agissant de manière tout à fait normale), les enfants prodiges (trop prodiges), les capacités physiques absurdes, tout cela est normal dans certains manga alors que pour quelqu'un n'ayant pas ce bagage tout cela n'aura pas de sens et sera ridicule. Quand on s'appuie sur des clichés pour que son récit soit crédible, je considère que cela en fait un mauvais récit. Un bon récit devant pouvoir être vu/lu par n'importe quel quidam.

    Un exemple de titre qui se cache derrière des clichés pour maintenir une certaine crédibilité avec Mirai Nikki et son Sérial Killer de 4 ans

    Voilà le premier point selon moi. Voyons donc ce qu'en disent les autres intervenants… (Ils peuvent évidemment réagir sur ce qu'ils veulent, revenir sur les influences par exemple).

    Feanor-Curufinwe
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    Feanor-Curufinwe le #246462

    Je crois d'abord, concernant les clichés, qu'on ne peut pas s'en dépêtrer, il faut faire avec, le truc c'est de trouver la bonne alchimie, le bon mélange pour garder un bon équilibre. Tant de trucs ont été écrits à toutes les époques, tant de thèmes ont été abordés qu'il vaut mieux éviter de penser à être foncièrement original. Il faut savoir composer avec les attentes du public pour mieux l'amener par la suite à être surpris, en jouant avec les clichés justement, pour les détourner au moment adéquat.
    Je vais prendre comme exemple Harry Potter, puisque hein, y m'a compris?
    Dans Harry Potter, on suit l'histoire des yeux du héros, quand il quitte la salle, on le suit, même si les deux autres protagonistes ne le suivent pas (qu'est-ce qu'ils font pendant ce temps? Vivent les fanfictions!), pourtant il arrive que l'on assiste à une scêne dans laquelle Harry ne figure pas, par exemple le premier chapitre du tome 4 "La coupe de feu" raconte la mort du vieux gardien de la résidence des Jedusor. On pense qu'il s'agit d'une scêne d'introduction à l'histoire elle-même, comme dans le tome1 (avec la présentation de la famille Dursley, ce qui permet de situer le contexte, la mort de Voldemort, et d'amener par la suite le décalage Moldu/Sorciers) ou le tome 6 et 7 (qui mettent en situation les Mangemorts et permettent de donner un enjeu dramatique à l'histoire). Mais en fait on se rend compte que Harry a vécu la scêne principale du chapitre comme s'il en était l'instigateur.
    Puis il y a d'autres détournements de clichés avec la relation entre Ron et Hermione, le lecteur étant déconcerté par le jeu de montagnes russes auquel il assiste depuis le tome 4 (ou le troisième film), ce qui le frustre mais créé aussi un sentiment de dépendance pas dégeu, les jeux de l'amour en somme…
    Je pourrais continuer sur HP pendant des lignes mais il faut aborder d'autres thèmes non?

    Comme ce qui se rapproche des clichetons, les influences.
    Tout comme les clichés, on ne peut absolument pas les éviter, il s'agit de trouver le bon dosage. En restant quelques instants dans le monde du livre, on peut prendre pour exemple "Le Seigneur des Anneaux".
    Tolkien s'est beaucoup inspiré des légendes nordiques pour écrire sa Saga, Le Crépuscule des Dieux principalement (l'Anneau de pouvoir, les relations Homme/Immortels,…) mais aussi de Shakespeare, notamment avec MacBeth (Les trois sorcières et leurs prédictions, la forêt vivante…), bref, mais Tolkien était avant tout un amoureux des langues, le langage des Elfes, des Nains, des Orcs et le parler noir de mordor en sont une illustration parfaite…
    Son histoire (du Silmarillon aux Contes et Légendes inachevés de la Terre du Milieu) brasse un nombre hallucinant de références, mais la façon dont il les a agencés rend sa Saga unique, et en fait encore aujourd'hui une source d'inspiration et de référence primordiale dans plusieurs genres et supports (BD, Jeux vidéos, romans, Jeux de rôles, séries, films…).

    Reste qu'à mon avis, et je n'en démordrai pas, le premier point important est de trouver ses personnages, si on arrive à les développer de manière à ce que pour soi, c'est-à-dire l'auteur, on en vienne à les rendre vivant, à les aimer, à ce qu'ils commencent par vivre par eux-mêmes et nous surprennent dans leurs réactions (beaucoup d'auteurs, de manga, de bd en général, ou de roman, se sont étonnés de voir leur personnage changer le cours du scénario prévu par son caractère, c'est quelque chose qu'on ne peut comprendre qu'en ayant écrit soi-même…), on a alors fait 90% du boulot. Et c'est ainsi qu'on aura le plus de chance de toucher son audience.

    A mon avis, ce sont ces trois points qu'il faut prendre en compte avant tout pour réussir une bonne histoire.

    "With the first link, the chain is forged. The first speech censured, the first thought forbidden, the first freedom denied, chains us all irrevocably." -Jean-Luc Picard
    Star Trek - The Next Generation / The Drumhead

    Lord-Yupa
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    Lord Yupa le #246463

    Citation (feanor curufinwe @ 26/05/2010, 14:57)
    Reste qu'à mon avis, et je n'en démordrai pas, le premier point important est de trouver ses personnages, si on arrive à les développer de manière à ce que pour soi, c'est-à-dire l'auteur, on en vienne à les rendre vivant, à les aimer, à ce qu'ils commencent par vivre par eux-mêmes et nous surprennent dans leurs réactions (beaucoup d'auteurs, de manga, de bd en général, ou de roman, se sont étonnés de voir leur personnage changer le cours du scénario prévu par son caractère, c'est quelque chose qu'on ne peut comprendre qu'en ayant écrit soi-même…), on a alors fait 90% du boulot. Et c'est ainsi qu'on aura le plus de chance de toucher son audience.

    A mon avis, ce sont ces trois points qu'il faut prendre en compte avant tout pour réussir une bonne histoire.

    Tout à fait d'accord, Feanor, sur ce “premier point important”, et de la façon dont tu parles des personnages, il est clair que tu as tenté ou tente d'écrire (comme moi, et comme Baklael). Je dirais volontiers en plus que le personnage central – en général il y en a un – ne devrait pas être le substitut de l'auteur. Si mon perso est moi-même, je n'éprouverai pas le besoin de justifier son existence puisque c'est la mienne, et j'arriverai mal à le voir de l'extérieur ; puis, en me surprenant par une évolution propre, il m'apportera quelque chose d'énorme qui, tous les auteurs le disent, est tout proche de l'enfantement. C'est pourquoi je pense qu'on ne peut qu'aimer son personnage central, même s'il existe des romans ou oeuvres à anti-héros (je ne pourrais pas en écrire, moi, et en plus je ne lis ces oeuvres-là que par obligation).
    Pour le reste, je me situe entre vous deux : l'originalité est une autre nécessité absolue, elle doit être quelque part : dans l'atmosphère si ce n'est pas dans les péripéties, dans le ton, dans le style, et l'oeuvre ne peut pas être bonne seulement à l'intérieur des conventions de délire du nekketsu, par exemple (= Baklael). Mais d'un autre côté tu as raison de dire, Feanor, qu'on n'échappe pas à certaines conventions, il en existe toujours. Par exemple, il arrive souvent qu'un personnage se remémore le passé et le raconte à qqun d'autre, ou le revive en “flash-back”, restituant tous les détails et les dialogues de ce passé ; or dans la réalité, si l'on essaie cela, on ne parviendra absolument pas à se souvenir d'autre chose que de bribes rares d'échanges, jamais de dialogues entiers ni de scènes complètes ou longues. Pure convention donc, ce passé si bien conservé. Quant aux influences, elles jouent même inconsciemment, ce n'est pas douteux.
    Le débat n'est pas clos pour autant, et on a bien le droit de ne pas être d'accord avec moi. “Eh, Yupa, et Proust, son perso, c'est lui-même, non ?” ah ouais 😛

    Akiko_12
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    Akiko_12 le #246464

    Citation (Lord Yupa @ 26/05/2010, 21:41)
    C'est pourquoi je pense qu'on ne peut qu'aimer son personnage central


    Je pense qu'on ne peut qu'aimer son personnage central en effet, d'ailleurs je pense qu'on ne peut qu'aimer ses personnages tout court qu'ils soient bons ou méchants, dans la mesure où pour faire des persos qui sonnent vrai il faut se mettre un minimum à leur place dans leur psychologie et leurs motivations.

    Ensuite, à mon avis il est assez difficile d'écrire un véritable “substitut de soi” à moins d'écrire très vite, surtout si c'est un anti-héros car il/elle correspond à une partie de soi à un moment M de la vie, or les états d'esprits et visions de la vie peuvent changer assez rapidement. Je me suis essayée à cette expérience et m'étais lancée dans un projet d'ado assez démesuré, quelques années plus tard reprendre cette histoire non achevée est devenu un exercice quasi impossible car mes héros (trop imprégnés) et même le scénar ne me correspondaient plus (cependant, déjà, on pouvait constater des différences même avec mon “substitut”, qui au fur et à mesure avait pris un caractère bizarrement beaucoup plus lumineux que moi… Sans doute la volonté inconsciente d'améliorer la réalité, je suppose que les persos substituts permettent une certaine catharsis et réussissent là où soi-même on a échoué… Comme des enfants en effet).
    J'en parlais avec Tom (le chat, si tu passes pas là…) qui me disait qu'il avait commencé un truc à l'adolescence aussi et qu'aujourd'hui l'histoire ne lui correspondait plus vraiment non plus, qu'il verrait plutôt aujourd'hui un scénar plus “sadique”. C'est aussi mon cas par certains aspects, je trouve mon histoire parfois trop linéaire, trop “justifiée”, j'avais d'ailleurs commencé à changer ma vision de la fin en pleine écriture en me disant “et pourquoi xxx il devrait mourir comme ça, est-ce que ça serait pas plus intéressant de tuer yyy à la place là comme ça, bam sans “justification”, juste la fatalité ?” Je pense qu'entre temps, j'ai dû perdre en naïveté ou quelque chose comme ça.
    C'est assez intéressant la façon dont les expériences, la maturité, et peut-être les nouvelles préoccupations et hantises peuvent influencer un récit.

    Globalement, les influences extérieures sont évidentes et on ne peut s'y soustraire, puisque ce sont les lectures, les films, la TV etc qui modèlent un peu l'univers de chacun, dans la mesure où on y découvre ici et là des choses, des thèmes etc qui nous intéressent et qu'on va retenir et/ou approfondir… Aller chasser les références d'un auteur peut-être amusant mais à mon sens juste dans l'optique d'approfondir ces thèmes qu'on a apprécié chez cet auteur. Après, essayer de “déconstituer” l'univers original/puzzle d'un auteur ne me parait pas très intéressant puisque c'est l'agencement de ces influences, de son vécu, de ses angoisses qui crée un univers original.

    Enfin pour faire un bon récit je pense aussi que les personnages sont le plus important, suit l'histoire bien sûr qui doit toujours tenir en haleine, ne dévoiler ses questions qu'au fur et à mesure, et distribuer les révélations au bon moment et intelligemment. Je préfère le schéma narratif du type “préparation->paiement” géant, soit lorsque la fin est connue de l'auteur et que des éléments intrigants sont introduits au fur et à mesure et tendent vers cette fin qui lève tous les mystères souvent de façon fracassante. On parlait d'Harry Potter et c'est justement la construction de ces romans, c'est aussi la construction de films comme 6e sens, l'Orphelinat et les Autres (d'ailleurs “préparation-paiement” c'est un terme de scénario, je ne sais pas si ça se dit en roman). Cette construction est ultra classique mais fonctionne remarquablement, en même temps tout est toujours préparation-paiement même à petite échelle, que ce soit pour distribuer des infos sur la psychologie, des détails matériels etc… (ex : Préparation : Indiana Jones dit qu'il déteste les serpents. Paiement : Une heure après dans le film, il se retrouve face à tout un tas de serpents)… Je sais pas si je suis très claire 😛 (*)

    Pour finir, j'ai envie de dire, même si ça peut paraitre con, qu'un bon récit à mon avis c'est un récit personnel car écrire dans un univers totalement différent du sien me parait quasi impossible, même en se documentant. Vouloir faire “comme machin” est aussi assez vain, c'est peut-être imposé par certains éditeurs mais à mon avis la personne qui s'y colle ne doit pas y éprouver grand plaisir, à part peut-être celui d'être payé et d'exercer sa technique en se livrant à cette figure de style. Il y a peut-être des gens qui appliquent une recette (surtout dans le shônen manga), mais je pense que chacun essaye de se démarquer en y apportant quelque chose de personnel. Quand aux autres, si rien ne les démarque, j'ai bien peur qu'ils ne sombrent assez rapidement dans les limbes de l'oubli 😂 !

    (*) Ah tiens, trouvé des définitions sur ce site, ça parle mieux que moi :
    Préparation/Paiement : procédé qui consiste à mettre en valeur, à insister sur un élément (préparation) qui aura une importance capitale par la suite (paiement).
    Avec la surprise, le mystère et l'ironie dramatique, on peut dire que ce sont les principaux ressorts d'une histoire. Ainsi que la sacro-sainte construction en trois actes sur laquelle se base la plupart des films, structure “traditionnelle” qu'on retrouve dans les contes par exemple.

    Edith : Pour ceux qui ont déjà essayé d'écrire un truc quelconque (scénar, roman, nouvelle, poème… peu importe), comment avez-vous vécu le fait d'imprimer ? Car pour ma part, je l'ai constaté plusieurs fois, en imprimant j'ai l'impression que ma chose m'échappe, qu'elle est devenue “réelle”. Sur le papier, je ne peux plus la modifier directement comme je veux, à la différence de l'ordinateur. Je considère toujours mes personnages comme de vraies personnes, mais tant que le fichier est virtuel tout reste maniable, sous contrôle. Imprimer c'est un sentiment hyper bizarre, voir son texte noir sur blanc, dactylographié donc propre et impersonnel, le tenir entre ses mains… Il vous a définitivement échappé pour de bon. Vous allez dire que je suis névrosée 😂

    Bub
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    bub le #246465

    Règle numéro 1 : ne pas, ne jamais, confondre l’histoire et le récit/scénario.

    On peut avoir une excellente histoire mais la raconter de façon catastrophique, au point de définitivement moisir tout ce qui faisait l’originalité de votre histoire.
    L’histoire, c’est justement le fond, tous ces trucs qui se bousculent dans votre crâne, que vous trouvez géniaux, super inspirés, originaux, passionnants, etc. Le récit, c’est ce moment précis où vous vous décidez de mettre de l’ordre dans votre tête et de coucher tout ça sur papier : tout d’un coup, bizarrement, le résultat sur papier ne correspond franchement pas à votre idée de départ. Et là c’est le drame. Soit vous n’insistez pas et vous renoncez à une brillante carrière d’écrivain international qui vous tendait les bras (surtout que vous trouvez que les autres n’ont pas plus de talent que vous, et bien souvent vous vous demandez même comment des éditeurs ont osé publier certains auteurs !) ; soit vous insistez et chaque paragraphe, chaque ligne pondue devient dès lors pour vous une épreuve, un chemin de croix (ou alors vous vous en foutez parce que de toute façon votre oncle est propriétaire d’une grande maison d’édition et en plus vous avez présenté la météo sur canal plus, c’est dire comme vous êtes quelqu’un d’exceptionnel).

    Pourquoi ?

    Il y a bien pire : vous êtes assez doué à la base pour l’écriture, mais – horreur ! – tout ce que vous essayez d’écrire devient fade à pleurer alors que votre histoire semble pourtant tenir la route.

    Pourquoi diantre ?

    Et pour finir de vous achever, pour que votre bouquin ait un semblant de cohérence, vous avez du renoncer à tout un tas d’idées géniales, de rebondissements de folie, de personnages secondaires potentiellement cultissimes, ou – impensable fatum de tout scribouillard en herbe – cauchemar absolu, la fin vers laquelle vous vous dirigez n’a ABSOLUMENT plus rien à voir avec ce qui était prévu.

    Pourquoi fichtre ?
    Pourquoi tant de haine ?
    Pourquoi écrire est-il une guerre sans merci contre nos incomblables lacunes ?

    Allons, allons, ne perdons pas espoir nom d’un kikoolol ! Et faisons appel au plus grand de tous les génies de la littérature, oui, c’est bien lui, celui que vous attendez tous :

    Monsieur le Baron de la Motte Drue et son fidèle valet Fulbert Anastase !

    On applaudit bien fort. *clap, clap, clap*

    Ah ah ah mon fidèle Fulbert, que fais-tu donc caché derrière ce pupitre ? Aurais-tu quelques plaisantes illustrations à faire partager à ton bon maître mon coquin ?
    – Ah Monsieur le Baron vous me trouvez fort bien contrit. J’essaye de mon mieux de narrer les aventures extraordinaires de Monsieur, mais j’ai toutes les peines à mettre en image les tableaux merveilleux de Monsieur mon Maître qui trônent – et que je chéris plus que tout – au fond de mon esprit encore embrumé par une nuit inachevée. Las ! Voyez, la plume est mon bourreau.
    – Oh oh mais je lis que tu veux narrer nos aimables péripéties survenues lors de ce complot hourdis par ce fourbe mandarin contre Sa Majesté l’Empereur, notre bienaimé cousin ?
    – Ah si fait, si fait Monsieur, mais je ne parviens pas à décrire tout le génie et toute la bravoure dont vous fîtes preuve lors ce jour, votre dévoué courage qui m’a tant chamboulé et ému.
    – Vois-tu Fulbert, un gentilhomme de bonne éducation doit maîtriser les arcanes les plus subtils et éthérés de l’art plurimillénaire de l’écriture. Ecoute donc mes conseils avisés et voyons si nous pouvons tirer quelque diamant de ton épais goudron. En premier lieu, as-tu une idée précise de ce que tu veux narrer ? Et en second lieu, sais-tu quelle forme va prendre ton récit en conséquence ? As-tu choisi le conte, pour retranscrire le côté merveilleux et moral de ton histoire ? Ou as-tu choisi la nouvelle, pour donner plus d’importance à l’événement proprement dit et donner plus d’impact à l’action ? As-tu pensé à la forme policière, plus familière à ce type d’intrigue ? Ou vas-tu romancer notre histoire, y introduire mille détails et intrigues supplémentaires, nous inventer des relations amoureuses, dresser un portrait réaliste ou iconoclaste de la société de notre bienaimé cousin Sa Majesté l’Empereur (ce que je te déconseille au plus haut point si tu veux garder ta tête) ? A moins tout simplement que tu n’ais choisi la biographie, au profil plus documentaire, mais au moins plus riche car « dense de l’épaisseur réelle de la réalité » ? Alors ?
    – J’avoue n’y avoir pas songé une seule seconde Monsieur le Baron, à ma grande honte. Je pensais tout simplement me lancer dans un récit sans trop réfléchir à sa forme, mais je conçois dorénavant que ce serait une grossière erreur de ne point prêter attention à ces règles élémentaires, tout du moins, je ne pense pas avoir le talent nécessaire pour m’affranchir de pareilles conditions essentielles.
    – Fort bien Fulbert, car vois-tu, de la forme dépend le fond, et vice-versa. Tu ne brosseras pas le même personnage selon le type de récit auquel il appartient. Pour l’un il doit être simple, à la limite de la caricature ; pour l’autre il doit être complexe, profond, bien plus que tout ce que tu pourras décrire sur lui au cours de ton récit. Pense à la forme pour déterminer quelles seront les limites que tu pourras fixer à ton récit et à tes personnages. Si tu veux être le plus libre possible dans ton écriture, choisis donc le roman ; si tu veux aller droit au but, choisis donc la forme la plus judicieuse entre la nouvelle, le conte ou autre. Ne vois pas la longueur de ce que tu compte écrire en premier lieu, mais saisi d’abord quelles libertés tu veux t’accorder dans ta façon d’écrire. Mais gare, car plus l’écriture sera libre, plus tes personnages prendront de l’épaisseur, et plus il sera difficile alors de parvenir à rester cohérent du début à la fin de ton histoire. Tes personnages risquent même de t’échapper, et ton récit prendre une direction non souhaitée. A moins d’être expert en anticipation, je te souhaite bien du courage.
    – Je vois Monsieur, je vois. Mais alors, tout est question d’équilibre perpétuel, il ne faut absolument pas se louper. Je comprends mieux maintenant ce que l’on entend par « récit chargé », il faut prendre garde à ne pas faire pencher la balance, sinon l’alchimie ne prendrait pas et le lecteur aurait toutes les peines du monde à passer d’un paragraphe à l’autre. Oh ! Je n’ose imaginer qu’il puisse ne pas apprécier Monsieur si jamais je n’avais point su rendre cette parfaite alchimie ! Quelle abomination étais-je sur le point de commettre ? Ah ! Je ne me le pardonnerai jamais !
    – Fu fu fu mon brave et loyal Fulbert, je vois que tu commences à entrevoir les obstacles insensés qui jalonnent le parcours de l’écrivain. Tu n’as ouvert qu’une fenêtre pour l’instant, à toi d’aller au-delà, d’arpenter cet univers de création infini qui se trouve entre tes deux oreilles, mais qui est régis par des lois plus terribles encore que les lois naturelles. Mais un jour, oui, un jour peut-être, tu tutoieras à ton tour les muses, comme ton bon Maître, et tu te permettras même de faire des figures de style pour entrer de plein pied dans l’essence même du processus créatif, le génie de l’écriture, l’éternelle œuvre offerte à l’humanité reconnaissante. Allons va, je te laisse, c’est l’heure pour ton Maître d’aller rendre une petite visite à l’exquise Duchesse du Maquis Trop Long.

    Feanor-Curufinwe
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    Feanor-Curufinwe le #246466

    C'est clair qu'il y a des pièges à éviter, plus ou moins identifiables, comme le cynisme par exemple. On peut arriver avec une idée du tonnerre et les meilleurs intentions du monde, puis en venir à se lasser, et commencer à détruire son univers, vouloir faire souffrir son ou ses personnages sans aucune raison valable, même pas par pur plaisir sadique.
    C'est pourquoi il est vraiment important de définir son ou ses personnages avant même l'ébauche d'un début de récit, de lui fixer ses limites morales et physiques (le caractère du récit peut ainsi s'adapter). J'ai lu beaucoup d'interviews de J K Rowling, et il se trouve que l'idée de Harry Potter lui est venue lors d'un voyage en train, le principe à la base de Harry Potter étant l'histoire du voyage d'un enfant seul, dans un train, tout le reste s'est construit autour, avec à la base l'idée de raconter une histoire pour enfants. De plus pour revenir sur l'importance d'aimer ses personnages, Rowling considère Harry comme son propre enfant, elle insuffle quelques traits de son caractère dans le personnage d'Hermione telle qu'elle était enfant. D'ailleurs on sent bien quelques fois dans l'oeuvre une éspèce de filiation, Harry, l'enfant de JK R, se trouve tiraillé entre la raison (toujours Hermione/Rowling) et l'envie (Ron), sa mère et son père. Parce qu'il y a aussi cette relation entre ces trois personnages, Harry au centre devant maman Hermione qui le couve et papa Ron qui l'encourage à plus d'indépendance. Le thème de l'absence du père est aussi l'un des thèmes principaux de l'oeuvre, mais je me rends compte qu'on n'est pas dans un topic sur Harry Potter (à créer?), aussi je retourne sur les rails…
    Bref, une fois que l'on a donné naissance à nos personnages, le point suivant qui a aussi toute son importance, c'est évidemment, bien avant un scénario, de construire son univers, ses lois physiques, sa géographie, son Histoire (la fameuse Mythologie). Bien sûr, on peut se contenter de notre monde tel qu'il est, ou bien en partie, et lui ajouter selon son désir quelques éléments fantaisistes, c'est là qu'on se sent Dieu tout puissant. En clair, on retourne à notre enfance et nos constructions Lego. Avoir le plan en tête, surtout quand on s'attaque à de la Fantasy, est primordial, y faire vivre ses enfants peut changer du tout au tout les idées d'histoire qu'on avait en tête, il faut rester cohérent. C'est bête à dire mais il arrive qu'on ne puisse plus trouver que raconter dans ce monde, il faut donc rester simple et ne pas oublier à qui l'on s'adresse. Les lecteurs n'ont pas à savoir tous les secrets que recèle votre univers, il faut toujours garder un atout dans sa manche, c'est là que la Mythologie est importante (conflits passés qui expliquent certaines relations entre certains peuples par exemple…)
    Le truc à garder systématiquement en tête, c'est la simplicité. Il faut s'en tenir d'abord au point de vue de son ou ses personnages principaux, et ainsi au fur et à mesure on peut étendre la perception de l'univers (la fameuse aventure, comme le voyage de Bilbo le Hobbit, ou de Son Gokû dans Dragon Ball, ou de Conan le fils du futur…), l'univers qu'on a créé avant la mise en place donc du récit et du scénario, il faut s'étendre et non se rétrécir, comme une pyramide inversée.

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    Akiko_12
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    Akiko_12 le #246467

    Citation (bub @ 27/05/2010, 11:38)
    En premier lieu, as-tu une idée précise de ce que tu veux narrer ? Et en second lieu, sais-tu quelle forme va prendre ton récit en conséquence ?


    J'ajouterai en troisième lieu : As-tu défini avec précision l'âge des lecteurs que tu vas cibler ?
    Car on ne s'adresse pas à un adulte comme à un enfant, enfant qui lui-même selon s'il a 10 ans ou 4 ne peut entendre le même texte…

    La cible est une très grosse contrainte, dans la mesure où il faut modeler les phrases et le vocabulaire selon, l'action aussi car pour un roman pour les 8-10 ans par exemple il vaudra mieux éviter la surenchère de gros bains de sang, sciages de membres et autres fracassages de crânes 😂…
    Je rigole mais si les éditeurs sont aussi psychorigides que les producteurs de séries d'animation, mieux vaut savoir cibler son public quand on écrit pour la jeunesse. En plus, mal présenter son projet dans la lettre d'introduction est synonyme d'amateurisme et donne d'office un mauvais point.
    Mais la politique des éditeurs et décisions des comités de lecture est assez obscure : sur quels critères se basent-ils vraiment (hors les élémentaires, type français et orthographe corrects) ? Certains genres sont-ils préférés pour tel et tel public ? Rejettera-t-on plus facilement tel autre type de récit, par effet de mode par exemple, parce que ce n'est pas “bankable” ? Et puis il y a les lignes éditoriales, dont les arcanes secrètes sont propres à chaque maison d'édition…

    Ce pauvre Fulbert n'est pas sorti de l'auberge : rédiger ses idées puis les diffuser au plus grand nombre sera surement pire que l'ascension du Golgotha ! (heureusement qu'il ne donne pas dans l'autobiographie. Car parait-il que si on s'appelle Tartempion au lieu de Sarko ou Loana, on n'a aucune chance…).

    Tom-Le-Chat
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    Tom Le Chat le #246468

    Beaucoup de choses intéressantes ont été abordées ; par où commencer ?

    Citation (akiko_12 @ 27/05/2010, 00:07)
    J'en parlais avec Tom (le chat, si tu passes pas là…) qui me disait qu'il avait commencé un truc à l'adolescence aussi et qu'aujourd'hui l'histoire ne lui correspondait plus vraiment non plus, qu'il verrait plutôt aujourd'hui un scénar plus “sadique”.

    En fait, j'ai plutôt dû employer le terme “cruel” ; cruelle car la mort d'un personnage n'est que plus tragique si ce personnage a beaucoup à y perdre. Si vous voulez tuer un personnage et faire pleurer dans les chaumières, tuez le type qui est père de famille et envoyez le héros qui-n'a-pas-peur-de-la-mort annoncer la nouvelle à sa femme et ses enfants…
    Après il y aussi la façon dont vous raconterez la mort : une mort n'est que plus cruelle si elle est absurde ; comme un héros de guerre ayant vaincu les plus forts adversaires et se faisant descendre lors d'une mission de routine par une patrouille ennemie quelconque ou un type dont le sacrifice héroïque n'aura servi à rien.
    D'un autre côté, j'aime bien aussi les séquences épiques où un personnage en prend plein la gueule et continue à se battre même s'il doit en mourir ; mais là on est dans un autre registre d'émotions où l'on verse des larmes viriles devant la beauté du geste (voir le sacrifice de Mr. Patate dans Dai Maho Toge 😂 ).

    Sinon, je suis complètement d'accord avec ce qui a été dit sur l'importance des personnages ET du récit. Prenez Final Fantasy X ; l'histoire est riche et potentiellement passionnante mais les personnages sont tellement énervants et la narration insipides que la véritable motivation pour avancer se réduit presque à progresser dans le sphérier. J'ai même tendance à penser que de bons personnages et une narration réussie suffisent à contrebalancer une intrigue convenue ; par contre si l'histoire est vraiment mauvaise, il sera difficile de faire des miracles.

    Concernant les influences, il est impossible d'y échapper ; que ce soit les récits qu'on a vus ou lus, des faits divers, les événements géo-politiques du moment, on sera forcément amené à piocher des éléments ici ou là. L'important ce n'est pas de se démarquer de toute influence mais de pouvoir tirer quelque chose de nouveau de tout ce qu'on a ingurgité, pensez au cas des remake ou des adaptations.

    [Insérez une citation qui donne l'air intelligent ici]
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    Lord-Yupa
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    Lord Yupa le #246469

    Citation (akiko_12 @ 27/05/2010, 00:07)
    Je préfère le schéma narratif du type “préparation->paiement” géant, soit lorsque la fin est connue de l'auteur et que des éléments intrigants sont introduits au fur et à mesure et tendent vers cette fin qui lève tous les mystères souvent de façon fracassante. On parlait d'Harry Potter et c'est justement la construction de ces romans, c'est aussi la construction de films comme 6e sens, l'Orphelinat et les Autres (d'ailleurs “préparation-paiement” c'est un terme de scénario, je ne sais pas si ça se dit en roman). Cette construction est ultra classique mais fonctionne remarquablement, en même temps tout est toujours préparation-paiement même à petite échelle, que ce soit pour distribuer des infos sur la psychologie, des détails matériels etc… (ex : Préparation : Indiana Jones dit qu'il déteste les serpents. Paiement : Une heure après dans le film, il se retrouve face à tout un tas de serpents)… Je sais pas si je suis très claire 😛 (*)

    (*) Ah tiens, trouvé des définitions sur ce site, ça parle mieux que moi :
    Préparation/Paiement : procédé qui consiste à mettre en valeur, à insister sur un élément (préparation) qui aura une importance capitale par la suite (paiement).

    Juste pour dire, Akiko, qu'en littérature on préfère parler d'”effet d'attente” au lieu de “préparation-paiement” (expression que je trouve assez laide) ; et que c'est quand même devenu un tel cliché du film et du roman disons “grand public” que cela doit filer avec discrétion dans le récit, sinon le lecteur se dit “Je te vois venir avec tes gros sabots”. Mais il est à mon avis un cliché inverse tout aussi irritant s'il est mal manié et abusif, c'est l'”effet de choc”, qui procède par coups de poings inattendus, en général dans des romans écrits en phrases courtes, sans adjectifs sentimentaux, sans “émotivité”, avec juste des points, bref en copiant “L'Etranger” de Camus et rajoutant des scènes-chocs. On a l'impression qu'en France un peu tout le monde écrit comme ça, c'est la mode actuelle : la “littérature à l'estomac” comme on l'appelle (donc à éviter à tout prix !). Les vrais auteurs remarquables actuels écrivent autrement, et avec de discrets “effets d'attente” (Sarah Waters, par exemple – je viens d'en lire un).
    Bravo Bub, quel talent ! et comme c'est vrai ! 😂

    Akiko_12
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    Akiko_12 le #246470

    Citation (Lord Yupa @ 01/06/2010, 09:19)
    Juste pour dire, Akiko, qu'en littérature on préfère parler d'”effet d'attente” au lieu de “préparation-paiement”
    (…)
    c'est l'”effet de choc”, qui procède par coups de poings inattendus, en général dans des romans écrits en phrases courtes, sans adjectifs sentimentaux, sans “émotivité”, avec juste des points, bref en copiant “L'Etranger” de Camus et rajoutant des scènes-chocs. On a l'impression qu'en France un peu tout le monde écrit comme ça, c'est la mode actuelle : la “littérature à l'estomac” comme on l'appelle


    Merci pour la précision !! En effet je ne connaissais pas le terme, et oui les mots en scénario sont simples (et parfois un peu moches du coup) mais ils vont droit au but, c'est ce que j'aime dans ce style d'écriture <img src="style_emoticons//happy.gif” style=”vertical-align:middle” emoid=”^_^” border=”0″ alt=”happy.gif” />

    Comme je ne lis plus depuis belle lurette, je ne connaissais pas “l'effet de choc” mais ce que tu dis m'intéresse. A un moment j'essayais d'écrire des nouvelles (en fait j'ai toujours des idées, mais la flemmingite de les écrire…), et j'avais tendance à écrire au présent, phrases courtes voire nominales, points et virgules, bref c'était souvent assez haché, un truc assez visuel comme un montage violent avec des plans courts en fait (montage audiovisuel, oui j'en reviens à ce que je connais 😛). Du coup, je me demande si ça correspond à cette tendance actuelle que tu décris ? (non, je n'ai pas lu l'Etranger de Camus et je risque pas de le lire, alors j'ai un peu de mal à visualiser ^^°).

    Citation (Tom le chat @ 01/06/2010, 02:30)
    Après il y aussi la façon dont vous raconterez la mort : une mort n'est que plus cruelle si elle est absurde ; comme un héros de guerre ayant vaincu les plus forts adversaires et se faisant descendre lors d'une mission de routine par une patrouille ennemie quelconque ou un type dont le sacrifice héroïque n'aura servi à rien.


    Ca me rappelle Lawrence d'Arabie. J'adore ce film, je ne connaissais pas du tout le personnage historique avant d'avoir vu le film, qui fut une grande claque pour moi à l'époque. Je trouvais débile qu'un héros pareil puisse mourir d'un façon aussi naze, comme le premier gus venu. Je le citais souvent en exemple dans les disserts sur la mort en philo d'ailleurs tellement ça m'avait marqué.
    Puis en revoyant le film par hasard à la TV y'a un ou deux ans, j'avais changé d'avis. Vers la fin du film, le héros est dégouté de ce qu'il fait, il devient à moitié cinglé et sanguinaire, ses idéaux sont dépassés par la politique et la manipulation, il se rend compte que ses actes servent des types en costard qui eux ne bougent pas de leur bureau. Sa mort de “pauvre naze lambda”, au lieu d'une mort flamboyante sur le champ de bataille, est finalement tout ce qu'on pouvait lui souhaiter car il meurt justement comme tout le monde, loin de cette image de héros qu'il s'était forgée et qu'il vomissait au final.

    J'ai aussi vu dans Infrarouge un docu sur les kamikaze de la seconde guerre mondiale, l'embrigadement à coup de valeurs qu'on retrouve facilement dans le shônen (c'est beau de se battre, aller jusqu'au bout, pas peur de la mort etc, sacrifice de soi pour les autres…) aurait fait une super BD avec moult larmes viriles et morts héroïques. Et quand on voit le résultat avec la défaite, Hiroshima et compagnie, le sacrifice héroïque en prend un coup et devient complètement inutile et débile, il a juste réussi à briser une famille.

    Dernièrement je regarde plutôt des “nouveaux-shônen”, de ces shônen plus sombres et faits par des femmes. Les héros ont pour beaucoup perdu leur caractère héroïque, ils se battent moins par conviction et grands sentiments que par intérêt personnel ou pour tout simplement sauver leur peau. J'ai décidé de me remettre à Naruto (un bon gros shônen donc) suite aux opening qu'on a vu à l'Epita et qui m'ont vraiment donné envie de voir la suite, mais en sortant de Nabari le retour est difficile. L'histoire est très similaire dans le fond (des ninja, un héros qui renferme un super pouvoir) mais traitée si différemment que le choc est très rude. Dans Nabari justement (nouveau shônen), les combats sont très rapides, ils ne durent parfois que quelques secondes, mais certains sont incroyables de violence. Le tout est très réaliste, un coup de sabre est un coup de sabre, une balle est une balle, et tout le monde peut y passer à n'importe quel moment même si il/elle met toute la volonté du monde à se battre et à s'en sortir (quand untel est plus fort, les héros ont beau crier et se débattre, ils se font mettre KO en trente secondes). Dans D.Gray-man, les victoires des héros sont tellement peu héroïques qu'on se demande souvent quel intérêt ils ont de se battre (comme pour une vraie guerre bête et absurde, quoi qu'ils fassent, il sont des soldats et sont toujours amenés à être confrontés à leurs ennemis. En fait, leur seul intérêt de gagner est de se sauver eux-mêmes…), certains combats comme celui de Lenalee vs l'akuma de niveau 3 ou encore cet horrible passage avec Allen-kun vs Tikki dans la forêt laissent les héros complètement détruits, hagards, physiquement amputés (même si Lenalee n'a perdu “que” ses cheveux qui ont littéralement brulé, le symbole est fort car elle laisse une partie de sa féminité et de son visage mignon et enfantin)… Un bien triste retour pour les “héros”. La page est tournée avec Kuroshitsuji, où Ciel fait carrément appel à un démon en renonçant à tout ce qui a (ou plutôt, n'a plus), car toute la passion ou le nekketsu du monde ne pourront changer sa faiblesse de base (sans son majordome, il n'est plus qu'un pauvre gosse sans défense qui ne sait même pas s'habiller tout seul, et en est très conscient).

    Bref, la tendance nouveau shônen me semble bien plus sombre certes que les “anciens” bon gros “shônen de base”, ils tendent plus vers le réalisme et de ce fait certaines valeurs ou messages comme “le dépassement de soi permet tout/si tu te donnes à fond tu atteindras ton but”, ou encore “c'est beau de se battre/se sacrifier pour ses idées” sont un peu en perte de vitesse. Du réalisme nait aussi une certaine violence car comme dans la vie se prendre un coup de sabre fait mal, les personnages peuvent mourir de façon “débile” dans un endroit aussi quelconque que glauque, sans connaitre de destinée flamboyante et leur sacrifice s'avère parfois bien peu utile. De même les héros poursuivent moins des idéaux que des buts personnels, portent une part d'ombre et de souffrance plus importants.
    Dit comme ça, j'ai un peu envie de comparer l'évolution de ces shônen à l'évolution des héros de western. Au tout début du western, les héros sont habillés en blanc (La chevauchée fantastique) et incarnent toute une batterie de valeurs, il sont nickels et propres sur eux. Mais on constate au fil des films et des années que l'image du héros se ternit, de cowboy/chevalier solitaire il devient un type à la limite de la loi, brisé, associable, opportuniste, n'agissant plus que pour son intérêt, dans un monde où règne la violence et où rien ni personne n'est complètement moral.

    On pourrait presque se demander : le réalisme est-il opposé aux idéaux ?

    Feanor-Curufinwe
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    Feanor-Curufinwe le #246471

    Heureusement que les shônen, et le manga de manière générale, évoluent avec le temps. C'est quelque chose d'assez cyclique, finalement. La remise en question des acquis se fait toujours avec le public, elle découle toujours d'une lassitude, voire d'un ras-le-bol des lecteurs de lire sans arrêt la même chose. Même s'ils ont tous deux déjà plus de dix ans d'existence, on peut porter l'évolution actuelle des shônen au crédit de One Piece et de Hunter X Hunter. Chacun a su apporter au bon moment une fraîcheur et de l'originalité à un genre qui justement se cherchait de nouveaux repaires.

    One Piece fonctionne sur une structure à-priori basique du shônen, voyage-découverte-ennemis-combats-victoire-voyage, dans un schéma qui, au regard extérieur, se répète inlassablement. Mais c'est dans ces rails bien établis, à travers cette contrainte qu'il s'impose, qu'Oda se démarque, se concentrant sur les personnages hauts en couleurs et se détachant complètement du groupe de base dans un Shônen classique.
    Ce qui ressort de dix ans de One Piece, c'est un rejet complet du cynisme, des personnages décalés et refusant les conventions que leur monde leur impose pourtant (même au travers de leur personnalité facilement reconnaissable, ils trouvent encore le moyen de faire un bras d'honneur à leur auteur), une furieuse envie de liberté et d'aventure, et beaucoup de bras cassés quand même.
    En clair, Oda semble avoir tout fait pour enclaver son récit et ses personnages, et là où d'autres seraient facilement tombés dans le piège (Nobuyuki Anzai par exemple), il les encourage constamment à franchir les barrières.

    Hunter X Hunter se libère d'un schéma narratif redondant en faisant de son univers un monde absolument dangereux où la mort vous attend à chaque coin de rue. Togashi pervertit totalement les codes du shônen, il garde le concept du groupe d'amis du héros, mais juste le temps que l'on s'attache à chaque personnalité pour ensuite les séparer brusquement lorsque le destin les emmène vers d'autres horizons.
    Togashi se plaît à détourner les idées préconçues que l'on s'était faites sur ses personnages, basées sur le peu de chose que l'on connaissait d'eux finalement. "Tout pour la narration" semble être le credo de l'auteur, préférant étaler des pages pleines d'explications sur le Nen (pouvoir dans HXH) ou sur le concept d'un jeu mortel (véritablement mortel), dilatter une poignée de secondes sur une vingtaine de pages, dériver du récit en cours pour raconter l'histoire d'un personnage dont l'importance n'est toujours pas révélée plusieurs volumes après, raconter ce qui se passe dans la tête de tel personnage en pleine action (une tournure propre au maître Hirohiko Araki), allant même jusqu'à frustrer volontairement le lecteur en le privant, lui et son héros, d'un combat attendu…

    Quand Oda comprime son récit pour le forcer à exploser, Togashi le fait imploser. Bizarrement, le résultat est le même, on se trouve face à deux oeuvres majeures.

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