"Un grand doute sur le sens de mes phrases" ?
Il me semble, Tom, que tu as parfaitement compris pourtant, quand tu parles toi-même de Napoléon, dont on peut parler de l'envergure sans nullement approuver sa politique (et j'ai déjà dit tout le mal que je pensais de la politique poutinienne) ! alors pourquoi insistes-tu ? pourquoi dire que tu ne comprends pas ? (et quand j'écris "qui sait lire ?" je ne m'exclus pas forcément, il m'est arrivé de mal lire).
Soutiens-tu que Hollande est un homme d'Etat d'aussi grande envergure que Poutine ? ou qu'Obama ? j'en doute, mais pourquoi pas ? eh bien argumente donc ! tu peux très bien me convaincre, tu sais ! un forum c'est là pour ça, et pas pour autre chose, puisque tu es sensible à ses règles.
Alors l'Ukraine, son histoire :
Comme le souligne implicitement Bub, c'est une zone géographique aux confins assez mal définis, même à l'Ouest avec ces curieux semi-Etats (car pas reconnus de tous les autres) à la frange des Balkans, et tout cela est très explosif et prometteur de bordel tragique.
Un premier vaste "empire slave" de Kiev a existé dans toutes les régions ethniquement russes vers le 9ème siècle ; mais au 12ème siècle il s'effondra sous les coups des nomades asiatiques appelés Petchénègues et Koumanes. Jusqu'au 15ème une immense Lituanie dominait tout l'Ukraine et la Biélorussie, puis se joignit à la couronne de Pologne. Cette gigantesque Pologne engloba même Moscou au 17ème siècle, mais recula petit à petit devant la Moscovie. Fin 18ème, Catherine II réussit enfin à s'emparer du Sultanat de Crimée et de l'Ukraine, mais voilà : en Crimée on était musulman (Tatars), et en Ukraine on était catholique (convertis par les Polonais, lesquels ne possédèrent jamais la Crimée).
La "russification" consista en Crimée à massacrer périodiquement les Tatars à l'aide des fameux cosaques. Plus tard Staline (et ses successeurs pas plus cool, mais on les oublie tout le temps) déportèrent cette ethnie en Sibérie pour faire place à une foule de marins, de soldats, de colons russes protégeant la vitale flotte de la Mer Noire. Il en reste donc très peu, mais beaucoup de Russes du Nord en Crimée. Ce qui explique le résultat du référendum.
En Ukraine, on chercha à convertir à l'orthodoxie, y compris sous le communisme qui avait passé un accord de soumission de cette Eglise. Mais les Ukrainiens réfugièrent leur identité dans une confession différente : les Uniates. Cela consiste en certains rites orthodoxes (l'iconostase par exemple) mais en non-reconnaissance du Patriarche de Moscou, au profit du Pape. Il est bon de le savoir, si vous reconnaissez l'autorité du Pape vous êtes catholique et cessez de l'être dès que vous contestez certains points qu'il affirme (des quantités de jeunes en particulier qui se croient cathos ne le sont donc pas). La Saint-Pétersbourg du tsar et la Moscou des soviétiques persécutèrent à qui mieux mieux les Uniates, considérés comme inféodés à Rome, donc à l'étranger, mais cela ne servit à rien, les Ukrainiens le sont toujours. Le quasi-conflit actuel a donc une dimension religieuse très ancienne.
Quand les Allemands envahirent une première fois tout l'Ouest russe en 1917 / 18, ils s'empressèrent de déclarer et de soutenir une Ukraine indépendante pour la première fois. Lénine signa l'armistice mais ne reconnut point cet additif, et l'Armée Rouge avala l'Ukraine en 1920 lors de la Guerre Civile. En 1941, rebelote : les Allemands réenvahissent, redonnent l'indépendance à une Ukraine alliée (d'abord "collabo", ensuite quelque peu forcée) du Grand Reich. Puis en 1943 / 44, le pays est à nouveau liquidé par l'Armée Rouge. Inutile de dire donc que le point de vue russe sur les Ukrainiens est que ces "traîtres" sont capables de s'allier avec n'importe qui pourvu de nuire à Moscou ! et que le point de vue des Ukrainiens tout aussi compréhensible est que les Russes sont des occupants et oppresseurs systématiques.
Je ne milite ni pour les uns ni pour les autres, notamment en l'absence de certitudes sur la nature du pouvoir à Kiev.
Tout cela prend une tournure inquiétante, sinistre même… toutefois si mon hypothèse n'est pas fausse, Poutine a pour plan de calmer le jeu après avoir bien menacé. Je peux me tromper tout à fait.