2001 Nights Stories – Version d'origine
Il est enfin dispo !
Coffret en édition limitée, prix exorbitant, sortie repoussée d'une année entière, cela valait-il la peine d'attendre et d'investir ses deniers dans ce titre inconnu du plus grand nombre ?
J'en ai déjà lu les 2/3, et je pense qu'il est difficile d'apporter une réponse tranchée à cette question.
Tout d'abord, à qui s'adresse ce titre ?
Yokinobu Hoshino est un parfait inconnu du public manga chez nous. Si si. A part quelques connaisseurs qui trainent sur les forum, qui ont la chance d'avoir lu les comics traduits dans les années 90, ou qui sont tombés par hasard sur les scans de 2001 Nights, bien peu savent de quoi il s'agit.
Les plus vieux et les plus curieux se souviendront peut-être du Trou Bleu, série en deux tomes très sympathique parue au siècle dernier chez Casterman dans une édition plus que cheap et qui renouvelait intelligemment le vieux thème du "Monde Perdu".
Avec 2001 Nights, Glénat nous "offre" l'oeuvre la plus ambitieuse de ce mangaka : publiée en 1984 (oui oui : 2001… 1984… coïncidence ? ^^), il voulait ainsi (enfin lui et son éditeur…) rendre hommage à sa façon au film de Kubrick (et de Clarke !) en prolongeant son oeuvre (ce que Clarke avait déjà lui aussi effectué depuis 1982 avec son "2010", puis la sortie du film de 2010 en… 1984 ! tiens donc ! ^^).
2001 Nights Stories s'adresse à un public amateur de science-fiction, plus particulièrement à un public amateur de l'âge d'or, celui des grands cycles visionnaires comme Histoire du Futur de Heilein, Les Seigneurs de l'instrumentalité de Smith ou encore Demain les chiens de Simak.
De grandes fresques futuristes qui avaient pour ambition d'imaginer les grandes étapes que le genre humain aura à franchir dans les milliers d'années à venir.
2001 Nights relève du même principe : peindre le futur de l'humanité toute entière qui à terme colonisera la galaxie, une vision optimiste donc, comme à l'âge d'or.
Les pages couleurs sont somptueuses, la taille du livre leur confère une majestuosité digne d'un art book
2001 Nights est en effet très imprégné de cet état d'esprit suranné, de cette foi en l'Homme et en la Science propre aux oeuvres des années 50/60. Et en cela on peut dire que dès sa sortie au Japon ce manga était déjà "démodé", les thématiques messianiques post apocalyptique dominaient déjà un bon paquet d'oeuvres de SF parues à cette époque (Akira, Nausicaä, Ken le survivant…) – hors space opéra bien évidemment (Macross, Harlock, Gundam, Cobra), qui est parfaitement indémodable.
Un sacré décalage qui s'accentue d'autant plus en 2012, les jeunes générations actuelles étant plutôt sevrées au cyberpunk à l'état d'esprit encore plus pessimiste (Ghost in the Shell, Gunnm, Blame !, Eden…).
Reste que l'oeuvre en elle-même est de très grande qualité.
Chaque "chapitre" raconte une étape fondamentale de la conquête de l'espace.
Si les premiers chapitres seront familiers à la plupart d'entre nous, la suite, se projetant de plus en plus loin dans le futur, devient de plus en plus philosophique. tant mieux. ^^
Car l'essentiel de 2001 Nights consiste bien en une réflexion globale sur cette poursuite en avant de l'homme dans l'espace et chaque histoire illustre à sa façon un nouveau questionnement : l'individu et sa singularité face à l'infini et l'inconnu).
C'est d'ailleurs le gros point fort de cette oeuvre, qui ne sombre heureusement pas dans la hard science indigeste (encore que Hoshino est faible sur le point strictement scientifique. plus d'une fois j'ai levé les sourcils, mais bon, l'important n'est pas là. ^^).
Faut voir cette planche en taille A4 ! L'illusion d'optique n'en est que plus saisissante, une ingénieuse trouvaille de l'auteur
L'objet en lui même est très bien présenté : les deux livres sont vraiment grands, épais sans que cela n'altère le confort de lecture, au contraire, cela rend vraiment hommage aux grandes planches contemplatives de Hoshino. Les goodies sont à mon sens sans intérêt (un dessin original signé de l'auteur et un poster à détacher, perso je préfère des commentaires, des analyses, des dossiers…).
Le GROS point noir, décidément devenu la marque de fabrique de Glénat, c'est encore une fois la présence de coquilles impardonnables. Une HONTE.
A l'arrivée ça donne un coffret très imposant, qui fait son petit effet sur l'étagère (que j'espère solide pour vous).
Oeuvre de science fiction ambitieuse donc, puisant largement son inspiration chez les maîtres de l'âge d'or, véritable OVNI dans l'édition du manga, et de la BD mondiale, Glénat a donc fait le choix de la proposer au public français dans une version sacrément élitiste.
Une édition limitée luxueuse, chère, proposée en 2001 exemplaires, que déjà beaucoup de crevards imbéciles revendent sur certains sites à plus de 150, voire 250 €…
Alors cela vaut-il la peine de se précipiter sur les derniers coffrets disponibles avant la rupture définitive ?
Pour être franc, ceux qui étaient vraiment concernés par cette sortie doivent dans leur ensemble déjà posséder leur exemplaire. Le public visé est en effet hyper restreint et cette oeuvre surannée ne plaira très certainement pas au public actuel qui n'a jamais goûté aux spécificités des grands cycles de l'âge d'or de la science fiction, ni à sa naïveté rétrospective.
Il y a certainement de jeunes amateurs pour ce titre, mais personnellement je leur conseillerais plutôt Planètes, qui est plus en phase avec notre temps, tout aussi ambitieux dans ses questionnements et à la fois plus "grand public".
Pour les autres, les irréductibles fans hardcore de SF, à la recherche de la perle, foncez, vous ne le regretterez pas.