Chronique Cinéma – Godzilla II : Roi des Monstres

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Godzilla II : Roi des Monstres
Long live the king

Le premier retour occidental de Godzilla, initié par Gareth Edwards en 2014, jouait très efficacement sur la retenue. Godzilla se montrait peu durant tout le métrage et les points de vue étant à hauteur d’humain, les beignes entre monstres finissaient souvent hors champ. Une façon de faire monter la tension avant le grand final, qui adoptant un point de vue plus objectif, montrait enfin l’ampleur des combats.

Un parti pris courageux qui n’aura toutefois pas convaincu tout le monde, entraînant parfois plus la frustration que la mise en appétit. Il faut aussi reconnaître que l’écriture quelque peu paresseuse des personnages-témoins humains (que l’on voit beaucoup en revanche) n’aidait guère à s’accrocher à la narration. Godzilla II prend donc le contre-pied, qui se justifie d’autant plus par son intention de base. A savoir confronter Godzilla à ses confrères kaiju les plus prestigieux pour un battle royale tout en démesure. Il n’est plus question ici de mystères (ou si peu) mais de grosse baston.

Les personnages humains sont toujours très présents mais plus pro-actifs cette fois, et l’histoire autour d’eux est légèrement plus développée. On est encore très loin de l’aspect gestion de crise post-fukushima (à l’instar du tout premier Godzilla de 1954 qui était un film post-Hiroshima) du sublime et « Evangelionesque » Shin Godzilla de Hideaki Anno de 2016, mais on est tout de même plus au cœur des enjeux stratégiques et globaux cette fois. Les ficelles restent très (trop) classiques, et il faudra là encore pas mal de suspension d’incrédulité devant certains effets de mise-en-scène et dialogues qui confinent au grotesque. Même le sous-texte écologique tombe un peu à plat car trop forcé. Toutefois, l’émotion finit par pointer son nez dans le dernier tiers du film, grâce au climax des enjeux émotionnels et aux interprétations très justes et sensibles des acteurs, avec une mention spéciale à Millie Bobby Brown qui confirme que son talent ne se limite pas à froncer des sourcils dans Stranger Things. Mais n’oublions pas que les stars du film sont avant tout les kaiju – ou plutôt les « titans » comme ils sont nommés présentement – et de ce point de vue-là, difficile de faire la fine bouche.

Les scènes où ils apparaissent offrent des tableaux aussi cauchemardesques que magnifiques (même si on n’atteint pas la poésie visuelle de la scène des parachutistes dans le film d’Edwards, la mise en scène de Dougherty étant plus frontale). On peut reprocher beaucoup de choses au script de Godzilla II mais sa cinématographie en fait une expérience d’esthète, sensitive, brutale et intense, qu’il faut définitivement découvrir sur grand écran pour lui rendre honneur. Et ceux qui étaient frustrés de ne pas voir assez Godzilla en auront pour leur argent ici. Parfaitement iconisées et spatialisés, chacune de ses apparitions est un moment d’anthologie. Le bestiaire de la licence n’est pas en reste non plus. Jamais King Ghidorah, Mothra et Rodan n’ont étés aussi impressionnants.

 

La dose de fan service est bien là à travers quelques clin d’oeils aux films originaux, dont le mythique theme de Godzilla qui manquait au film précédent. Le rythme soutenu (qui fait si cruellement défaut aux récents Godzilla : La Planète des Monstres par exemple…) entraîne bien son lot des raccourcis narratifs et spatio-temporels, mais cette générosité en rebondissements fait qu’on ne voit pas passer les 2h12 du film au moins. Mieux, on en redemande. Car en fin de compte, on pardonne assez facilement le traitement nanardesque des héros humains et le manque de finesse de l’ensemble pour ne garder en tête que le spectacle dantesque de ces monstres géants – les véritables héros – et la beauté singulière de la vision d’apocalypse qui les accompagne.

 

Pa Ming Chiu

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A propos de l'auteur

Bruno

Défendre les couleurs d'AnimeLand était un rêve. Il ne me reste plus qu'à rencontrer Hiroaki Samura et je pourrai partir tranquille.