Compte rendu du dimanche 07/12

Nouvelles Images du Japon, 3e édition

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Etonnement, peu de personnes étaient présentes dans la salle 300 pour écouter KON Satoshi nous parler des techniques utilisées sur son dernier film, Tôkyô Godfathers : l’horaire matinal (11h) pour un dimanche est-il à blâmer ?

Lire le compte rendu de la conférence.

Le serpent blanc

A 14h en revanche, la salle était bien pleine pour la projection du Serpent blanc, dans le cadre de la rétrospective sur L’âge d’or de la Tôei. « Un film qui, bien qu’il date de 1958, peut être qualifié de tout neuf, selon les dires de Xavier KAWA TOPOR, délégué général et co programmateur du festival. Tout neuf, car le film n’a pas été vu en France depuis longtemps ; et tout neuf aussi, car grâce aux efforts de la société Wildside Films, nous avons droit à une version restaurée, et doublée ! ».

Le film a été introduit, comme à son habitude, par une présentation fourmillant d’informations de Ilan NGUYEN, co-programmateur du festival. Il importe en effet de resituer Le serpent blanc dans son contexte historique : datant de 1958, il est le premier long métrage de la Tôei Animation, deux ans après la création de ce département au sein de la société Tôei. Son président, HIROSHI Okawa, prête alors attention aux longs métrages américains de l’époque (Pinocchio, Fantasia…), bien décidé à faire de la Tôei, à travers une formule restée célèbre, « la Disney de l’Orient ».
Pour ce faire, HIROSHI décidé d’exploiter le cadre culturel oriental : de fait, Le serpent blanc s’inspire de la légende chinoise éponyme très connue (1), multi adaptée en opéra, théâtre ou marionnettes (même Tsui HARK en proposa sa version, dans Green Snake, en 1993 !) : une histoire d’amour entre un jeune homme et une créature Femme-serpent aux pouvoir magiques.

Tout en poésie et rebondissements, le film s’adresse certes aux plus jeunes, mais les plus âgés y trouvent également leur compte. Techniquement, des séquences de foudre, de raz-de-marée, une animation fort gracieuse des mouvements : un tour de force pour l’époque. Le serpent blanc a été réalisé avec deux animateurs clés : DAIKUHARA Akira et MORI Yasuji, les deux seuls animateurs expérimentés de la Tôei, qui était alors surtout un vivier de talents en devenir. On retrouve d’ailleurs en tant qu’intervalliste un certain ÔTSUKA Yasuo au générique du Serpent blanc : l’une des premières recrues de la Tôei, il animera même seul certains plans vers la fin du film, notamment les séquences sous marines.

Avant de s’attaquer au Serpent blanc, YABUSHITA Taiji, son réalisateur, avait une expérience somme toute limitée du monde de l’animation : ayant travaillé essentiellement sur des films pédagogiques, il avait certes côtoyé de grands noms de l’animation, tels que MASAOKA Kenzo (lire notre dossier sur l’animation japonaise des années 1920 à 1950) ; la présence de DAIKUHARA Akira et MORI Yasuji sur le long métrage est donc primordiale, même si les différences de personnalité décelables dans leur animation donnent parfois des variantes au sein du film (2).

Au niveau du scénario, une épopée mêlant quête initiatique, amour impossible, animaux complices (bien que le message puisse prêter à caution : ainsi, le Panda ami du héros met à contribution les autres animaux   qui forment « la pègre »   par la seule imposition de sa force… la loi du plus fort ?), chansons émaillant le film à intervalles réguliers : Tôei avait bel et bien gagné son étiquette de Disney de l’Orient.

Treize ans plus tard néanmoins, abattue par la déferlante de séries TV issues notamment du studio Mushi Productions de TEZUKA Osamu Tôei jette l’éponge et cesse sa production de longs métrages, pour se consacrer exclusivement au format télé.

A noter : la société Wildside films les proposera certains films des débuts de la Tôei dans les salles françaises dès le début de l’année prochaine (premier arrivé : Horus, Prince du Soleil, prévu pour le 4 février 2004).

L’Arbre de Palme

A 17h dans un auditorium à moitié rempli, c’était au tour de L’Arbre de Palme de créer l’événement, en nous faisant découvrir le second long métrage de NAKAMURA Takashi, un an après sa sortie au Japon (déjà diffusé en France lors de l’Etrange Festival de Strasbourg, en octobre 2002).

Lire : la critique du film.

Trois fois plus d’Astro

Enfin, une fin de journée tout en liesse, puisque le Forum des Images organisait à 20h30 une soirée exceptionnelle en nous faisant découvrir les premiers épisodes de Tetsuwan Atomu, alias Astro le petit robot, dans ses trois versions : la 1e en noir et blanc, datée de 1963 ; la 2e, datée de 1980 ; et enfin, la 3e, la série anniversaire de 2003, Sony Pictures Entertainment ayant exceptionnellement autorisé la diffusion du premier épisode. Les épisodes furent présentés par Ilan NGUYEN, qui remit les trois séries dans leur contexte.

On découvrit par exemple que la série de 1963 fut un succès commercial (40% d’audience !), étalé sur 200 épisodes, alors que celle de 1980 fut un semi-échec. Ilan précisa aussi que la série produite en 2003 vit le jour en grande partie grâce aux Américains, qui ont également joué un rôle sur la direction scénaristique de la série. Ceci expliquant peut-être pourquoi cette dernière mouture s’avère aussi décevante et peu ambitieuse d’un point de vue thématique.

En tous cas, revoir à la suite les trois épisodes qui content la naissance d’Astro revient à se prendre une gifle visuelle détonante. Qu’il s’agisse de l’animation limitée de 1963 ou de celle plus mûre de 1980, pour finir par celle épanouie de 2003, on (re)découvre que l’oeuvre de TEZUKA est d’une inventivité visuelle remarquable, et qu’il cite aussi bien CHAPLIN, Superman que NIETZSCHE, et se permet d’offrir un concentré de philosophie humaniste appréhensible aussi bien par les grands que par les petits. Une façon de réaliser aussi qu’Astro est devenu une icône pop, un mythe dont on peut réécrire l’histoire sans en altérer le sens.

Remerciements à Nicolas “Astro Boy” PENEDO.

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