Skyhigh, le film

Ça bastonne dans l’au-delà !

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Le manga Skyhigh a été publié fin 2001 au Japon, et devrait être bientôt disponible dans nos contrées. L’oeuvre du mangaka eut même les honneurs d’une adaptation télévisée en 2002, un drama de dix-neuf épisodes sur deux saisons, qui rencontra beaucoup de succès au pays du soleil levant. Plusieurs réalisateurs ciné participèrent à cette série. Citons par exemple TSURUTA Norio (Ring 0, Kakashi), NAKAHARA Shun (Lie Lie Lie) et… KITAMURA Ryuhei, que l’on ne présente plus.

Début des ennuis

L’inspecteur Kanzaki Kohei enquête sur une série de meurtres particulièrement violents. Trois jeunes femmes ont été retrouvées avec le coeur arraché. Mais il doit bientôt se marier avec sa fiancée, Mina. Le jour de la cérémonie, la mariée rejoint elle aussi la liste victimes. Fou de rage, Kanzaki va redoubler d’effort et remonter la piste de l’assassin. Pendant ce temps, Mina se retrouve dans une antichambre où l’accueil la mystérieuse Izuko, gardienne du portail de la colère. Izuko lui apprend qu’elle vient d’être assassinée, et par conséquent, lui propose trois choix : aller au paradis y attendre la réincarnation, errer à jamais dans le monde des vivants en tant que fantôme, ou alors tuer une personne de son choix, puis aller en Enfer y subir mille souffrances. Mina a douze jours pour se décider. Elle demande alors à la gardienne de lui montrer son assassin…

Drôle de préquelle

KITAMURA Ryuhei livre ici une histoire originale, basée sur l’univers imaginé par TAKAHASHI. Le réalisateur japonais avait déjà contribué à la série en mettant en scène un épisode. Réalisé en 2003, Skyhigh le film se déroule chronologiquement avant le drama, il n’est donc pas nécessaire d’avoir vu ce dernier (ou même lu le manga) pour bien suivre le récit.

Disons-le tout de suite, le film se révèle assez différent du manga, et est loin d’avoir sa substance. Alors que la BD raconte des histoires plutôt simples ou les choix et motivations (notamment la vengeance) des protagonistes sont véritablement mis en avant, KITAMURA embarque sans complexe le spectateur dans un récit mêlant policier, fantastique (avec une bonne louche du Ghost de Jerry ZUCKER), gore et arts martiaux ! Ce qui n’est finalement guère étonnant, connaissant les états de service de l’auteur de Versus. Cependant, la mayonnaise a bien du mal à prendre !

Histoire à dormir debout

Parlons un peu plus de ce scénario, et en particulier du mobile de notre méchant de service certes compréhensible, mais dont la méthode reste abracadabrante. Si vous voulez garder le (relatif) suspense entier, il est recommandé de sauter au paragraphe suivant.
Kudo (le méchant donc) désir retrouver sa bien-aimée, plongée dans un coma profond. Les démons se trouvant de l’autre côté du portail de la colère peuvent l’y aider, en échange de la domination du monde (rien que ça !). Pour ce faire, il doit retrouver les six réincarnations des précédentes gardiennes du portail, leur arracher le coeur à des endroits bien précis afin de former un sceau de Salomon (1). Une fois cela accompli, il pourra rejoindre le portail, affronter Izuko et libérer les démons. Le sale boulot est confié à Rei, sa ravissante secrétaire qui fait office de garde du corps. Car il faut savoir que si l’on tue soi-même, on gagne un aller simple pour la damnation éternelle, sans passer par la case portail de la colère. Il en va de même pour le suicide, considéré comme un meurtre. Il est loin le temps où il suffisait de sacrifier un poulet au milieu d’un hexagramme, et psalmodier quelconque incantation afin de pactiser avec le Malin…

Du rififi chez Ryuhei

Difficile d’adhérer à un tel récit, surtout quand les acteurs eux-mêmes n’y croient pas ! En effet, l’interprétation générale ne brille guère, et les comédiens ne parviennent pas à donner vie à des personnages inconsistants. Malgré sa plastique, l’actrice SHAKU Yumiko (incarnant Izuko dans le film, mais aussi la série), reste loin de la représentation de TAKAHASHI, beauté mystérieuse au visage impassible. OSAWA Takao (Kudo) cabotine dans son rôle de bad guy, et TANIHARA Shozuke (l’inspecteur Kanzaki) semble attendre de toucher son chèque de fin de tournage. Seule la jolie UTOAMI Kanae (Rei l’assistante de Kudo) parvient à dégager un certain charisme à l’écran, en dépit d’un rôle plutôt réduit. Pas de trace de ses deux acteurs fétiches que sont SAKAGUCHI Tak et SAKAKI Hideo, mais les familiers du cinéaste reconnaîtront quelques têtes vues dans ses précédentes production.

Concernant les fameuses séquences d’action, elles déçoivent plus qu’autre chose. Même si elles sont tout de même moins ratées que ceux d’Alive, on reste loin de la virtuosité de Versus ou d’Azumi. En plus des chorégraphies peu inspirées et assez sommaires, le montage très « cut » sert visiblement à masquer les carences martiales des comédiens. Bref, les combats se résument généralement à quelques beignes apathiques, où les combattants n’hésitent pas à prendre la pose entre deux coups de katana. Le pire est qu’ils ont tendance à décrédibiliser certains personnages, notamment Izuko qui se prend une véritable déculottée. Un comble pour une soi-disant gardienne…

Globalement, la mise en scène reste de facture correcte, n’échappant pas à quelques effets de réalisation branchés et pas toujours des plus judicieux (on notera tout de même une séquence en flash back assez sympathique et bien trouvée). Mais comme toujours chez KITAMURA, un des gros problèmes vient du manque de rythme de ses films. Entre des scènes de combats mollassonnes, une intrigue qui a du mal à se mettre en palce, des dialogues longuets et peu captivants, le spectateur a tout le temps de bâiller pendant les deux heures de métrage.

On ira tous au paradis ?

Il est drôle de constater que KITAMURA Ryuhei répète les mêmes erreurs que sur Alive. Le matériau de départ dispose d’un fort potentiel cinématographique, mais semble pourtant incompatible avec le style du cinéaste. On se retrouve alors avec une relecture superficielle, minée par des séquences « spectaculaires » d’utilité discutable, et un traitement des personnages rapidement expédié. Amputé des qualités intrinsèques au manga, Skyhigh ne fait pas honneur à son grand frère papier et constitue un divertissement bâtard à peine acceptable. Trois propositions s’offrent au spectateur : passer son chemin comme si de rien n’était, (re)découvrir les manga de TAKAHASHI Tsutomu, ou alors jeter un coup d’oeil au film de KITAMURA, au risque de se retrouver devant le portail de l’ennui.

Lire notre article sur Skyhigh, le manga

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