Alors, Akira c’est avant tout un récit initiatique dont Kaneda est le “chevalier errant”. Il a en effet toutes les qualités nécessaires pour prétendre à l’initiation :
-Il est guidé par des idéaux nobles : l’Amour (même si originellement c’est plus la partie basse de son corps qui le guide), et l’amitié (il pardonne sans ciller le meurtre de Yamagata à Tetsuo).
-Il est désintéressé.
En fait, Kaneda et Tetsuo sont 2 faces d’un même personnage : la lumineuse (Kaneda) et la ténèbreuse (Tetsuo).
D’ailleurs tous 2 auront une mort symbolique, qui marquera pour chacun une “traversée du désert” dans le récit, et ils seront absents pendant 1 tome complet chacun.
-Tetsuo perdant son bras,
-Kaneda aspiré par Akira.
Kaneda est celui qui obtiendra le savoir au prix d’efforts et saura en faire usage, tandis que Tetsuo est celui à qui le pouvoir est donné sans efforts et qui l’utilisera pour assouvir son besoin de reconnaissance et ses besoins égoistes.
En face de ce personnage à 2 facettes, il y a le Colonel, figure évidente du Père, à qui il faut se mesurer, et le tuer symboliquement pour devenir adulte.
On voit d’ailleurs bien qu’il y a changement dans l’attitude du Colonel vis-à-vis de Kaneda, et l’on peut voir dans le fusil qu’il donne à ce dernier une passation d’un symbole phallique : Kaneda a su devenir un homme.
En revanche, Tetsuo, en ne sortant pas du monde des désirs enfantins, fait le chemin inverse : il régresse, au point de redevenir un (très gros) bébé.
Cependant, tout n’est pas aussi noir pour Tetsuo. Il est évident qu’il a eu, tout autant que son alter-ego, accès a une connaissance suprème au cours de son voyage à travers l’espace-temps (au cours duquel son autre facette, Kaneda, revient par ailleurs).
Qui plus est, il y a Akira, véritable messie d’une religion à venir.
Et qu’est-ce qu’Akira ? L’innocence préservée dans le monde clos d’un cerveau autiste, un véritable éveillé au sens bouddhique du terme. Il est aussi, par la destruction qu’il engendre, la promesse pour les générations futures qu’elles peuvent faire leur trou (c’est le cas de le dire) dans un monde qui semble les étouffer.
Donc, en retournant en Enfance, Tetsuo va vers Akira et vers l’Eveil. Mais encore une fois il échoue, et reste prisonnier de ses désirs.
Là où Akira devient Esprit pur, Tetsuo reste prisonnier de sa chair, et perd sa conscience alors qu’Akira accède à une super-conscience.
Akira est une oeuvre avec de multiples messages. Un récit initiatique, de science fiction, avec un message philosophique presque religieux qui se tient.
Neo-Tokyo est un enfer sur terre, qui passe d’une prison fasciste à grande échelle à une anarchie déshumanisante. Et pourtant, Ôtomo nous donne toujours un message d’espoir : sur les ruines d’une cité qui s’est effondrée sur elle-même, peut encore se lever le soleil d’un avenir radieux…
