Personnalité de la semaine : Ryûtarô Nakamura

0

Pour les 25 ans de Serial Experiments Lain, un jeu vidéo remet la licence dans l’actualité… et nous offre l’occasion de revenir sur le parcours de son regretté réalisateur.

Né dans la préfecture de Chiba en 1955, Ryûtarô Nakamura souhaite dès son plus jeune âge travailler dans l’animation. Il intègre cette industrie en 1977, à 22 ans, au studio Madhouse. Il quitte ce studio trois ans plus tard pour la structure fondée par Osamu Dezaki et Akio Sugino, le studio Annapuru. Sous leur égide (Dezaki le décrit comme « le second Sugino »), il participe à des séries telles que Rémi sans famille, L’île au trésor, Cobra ou encore Ashita no Joe 2, mais également aux longs métrages de Jeu, set et match et Unico. Riche de cette expérience, il prend son envol en 1986 en devenant indépendant. Hélas, sa première réalisation sera chaotique ! Suite à l’explosion de la bulle spéculative, La grande aventure de Chibineko Tom est interrompue. Quand Nakamura peut enfin achever le long métrage en 1992, il n’est plus question de sortie en salles, juste de rares diffusions télévisuelles.

Il faudra donc attendre 1994 pour enfin découvrir sa première réalisation au cinéma. Budori, l’étrange voyage, adapte la nouvelle éponyme de Kenji Miyazawa, mais avec des chats anthropomorphes en guise de héros – il adaptera à nouveau l’auteur en 1996 avec un omnibus de trois courts métrages, Kenji no Trunk, après avoir signé La légende de Crystania. En 1998, Ryûtarô Nakamura impose son style mélancolique à travers le monde grâce à Serial Experiments Lain. La série désabusée anticipe l’apogée des réseaux virtuels, notamment parce que le réalisateur, mais également le chara-designer Yoshitoshi ABe et le scénariste Chiaki Konaka sont passionnés d’informatique. C’est d’ailleurs ce dernier (ainsi que le producteur Koyuki Ueda) qui impose Nakamura à la réalisation après avoir découvert son storyboard du premier épisode, alors qu’elle devait échoir à un autre artiste ! Nakamura privilégie en effet la mise en scène à l’animation, qu’il préfère confier à des personnes qu’il estime plus compétentes que lui.

On le retrouve ainsi pendant plusieurs années au storyboard, voire à la réalisation d’épisodes, sur de nombreuses séries aux thèmes variés : Mahou Tsukai Tai, Sakura Taisen, Ghost in the Shell : Stand Alone Complex… Mais, en 2003, Nakamura reprend les commandes d’une nouvelle série : L’Odyssée de Kino. Sa mélancolie se teinte de philosophie à travers les voyages de Kino et sa moto parlante, chaque épisode s’apparentant à une fable suscitant la réflexion du spectateur. Il reprendra le rôle de réalisateur pour le second long métrage issue de la franchise en 2007, avant de diriger Ghost Hound. Tirée d’une idée de Masamune Shirow, la série mêle beaucoup des obsessions de Nakamura (projection astrale et cerveau électronique). Il s’attaque enfin à une adaptation de Deux ans de vacances de Jules Verne, avec encore une fois des héros chats… mais ne parviendra pas au bout du projet, fauché en 2013 par un cancer du pancréas, à seulement 58 ans. Une perte cruelle pour le monde de l’animation japonaise, où il avait su imposer sa touche identifiable entre mille.

Parlez-en à vos amis !

A propos de l'auteur

Matthieu Pinon