Entretien avec Daiju Koide, producteur de Shin Kamen Rider

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Attendu sur Amazon Prime ce vendredi 21 juillet, le film Shin Kamen Rider  – basé sur l’œuvre imaginée par Shôtarô Ishinomori et qui s’offre parfaitement aux non initiés de la licence – est la dernière réalisation en date d’Hideaki Anno. C’est au festival de cinéma le Nifff situé dans la ville de Neuchâtel en Suisse que nous avons pu interviewer l’un des producteurs du film, Daiju Koide.

AnimeLand : Comment est-ce que le projet Shin Kamen Rider  est-il venu à vous ?

Koide Daiju : Le projet m’a été proposé en 2019. Muneyuki Kii, qui était en charge du planning et de la production, m’a invité à le rejoindre alors qu’il préparait un nouveau film Kamen Rider avec le réalisateur Hideaki Anno. Jusque là, j’étais producteur sur Kamen Rider ZI-O au département télévisé de Toei, en compagnie de Shinichirô Shirakura, également producteur exécutif de Shin Kamen Rider. Il m’a contacté après la fin de la série.

AL : Quelle est la particularité de ce projet en terme de production ?

DK : En termes de production de ce film, nous ne sommes pas passés par notre compagnie de production subsidiaire (TOEI TV PRODUCTION CO., LTD., ndlr) qui produit la plupart de nos séries TV, mais par une société nommée Cine Bazar Inc., qui est aussi la société de production qui s’est chargée de Shin Godzilla et Shin Ultraman de Monsieur Anno. Cela ne signifie pas seulement que le staff allait être différent, mais cela allait être aussi le cas sur le planning de production et les idées concernant le budget. Nous faisions face à des modes de production totalement différents des routines employées pour les tournages de nos séries TV habituelles. Pour les séries, nous devons assurer des partenariats pour diffuser notre merchandising. De fait, le character design et l’histoire sont imaginées et conditionnées par ces relations avec les équipes du merchandising. Mais pour Shin Kamen Rider, nous devions focaliser notre travail créatif sur la collaboration avec M. Anno.

AL : Quel était le cahier des charges ? 

DK : Premièrement, Shin Kamen Rider est basé sur les expériences personnelles de MAnno, quand il regardait la toute première série Kamen Rider en 1971. Le projet n’était pas seulement construit sur la base de la série originelle, sinon sur la sensation que les jeunes garçons, dont M. Anno, ressentaient lors de sa diffusion. Les stratégies de relations publiques étaient notamment influencées en fonction de ça. Par exemple, nous avons relancé les « Kamen Rider Cards », qui étaient très populaires à l’époque. Mais pour cette production, le point crucial était que notre acteur principal, M. Sosuke Ikematsu, réalisait la plupart de ses scènes d’action sans « suit actor » ou doublure cascade. Cette philosophie provient de M. Hiroshi Fujioka, qui était l’acteur principal de la série Kamen Rider originelle. Il faisait également ses propres scènes d’action lui-même, sans « suit actor » ni cascadeur. Mais cela nous demandait d’être vigilant.

© 石森プロ・東映/2023「シン・仮面ライダー」製作委員会

AL : Comment travaille-t-on avec Hideaki Anno ? Quelles sont ses exigences ? Son niveau de perfectionnisme a-t-il était problématique ou au contraire une force pour la production ? 

DK : Travailler avec M. Anno était véritablement stimulant pour moi. Il déteste les « routines » et il prend les meilleurs chemins possibles pour ses projets, et sans faire aucun compromis. C’est en cela qu’il est incroyable. Bien entendu, cela implique de multiples retouches, des tournages additionnels et cela provoque des dépassements de budgets, du retard de planning. Mais je voyais cela d’un œil positif. Pour un producteur unique, c’était un projet riche en défi et j’ai vécu une belle expérience en menant le projet de front en compagnie de M. Anno.

AL : Le héros subit une transformation corporelle, à l’instar de Shin Kamen Rider Prologue (1992) de Makoto Tsuji. Quel a été votre rôle lors de la création de cette nouvelle créature ?

DK : M. Anno avait essentiellement trois designers, à savoir M. Yutaka Izubuchi (réalisateur de RahXephon, qui avait participé à Kamen Rider : The First et Space Battleship Yamato 2199), M. Mahiro Maeda (habitué d’Evangelion et designer sur Mad Max : Fury Road) et M. Ikuto Yamashita (mecha-designer de Neon Genesis Evangelion), qui était aussi costume designer. M. Isao Tsuge a aussi contribué au character designs. Nous avons envisagé plusieurs directions mais, au final, nos designs ont fini par rejoindre les modèles de la série Kamen Rider de 1971. Vous avons discuté sur quels designs étaient populaires ou impopulaires au sein de la série TV et quels étaient selon les problèmes de la série (comme la dégradation des masques ou des costumes pendant les tournages, ndlr). Mais je faisais totalement confiance dans son équipe de designers. Quand les designs ont été décidés, ils étaient finalement assez proches des originaux et surtout convaincants pour nous.

© 石森プロ・東映/2023「シン・仮面ライダー」製作委員会

AL : On sait que l’ami de Hideaki Anno, Shinji Higuchi (Godzilla, Hisone to Masotan) est un amoureux d’effets spéciaux et ils ont collaboré ensemble sur Shin Ultraman. Il a même réalisé les FX de la dernière série Kamen Rider Black Sun, mais concernant Shin Kamen Rider qui a produit les FX  ?

DK : Vous le savez sans doute déjà, mais M. Shinji Higuchi n’était pas impliqué sur Shin Kamen Rider. Les VFX de ce film ont été produits par Shirogumi Inc. et Khara Inc., la société de M. Anno. Il y a différents types de VFX et ce film a demandé trois procédures. Premièrement, ajouter des éléments comme du sang et l’allumage des yeux des masques. Deuxièmement,  créer les effets comme les « bulles » ou le prana (une source omniprésente d’énergie qui maintient toute vie, un terme surtout utilisé dans Shin Kamen Rider). Et enfin, produire les scènes d’action en full CGI, ce qui demande des étapes de prévisualisation. Le process allant de 1 et 3 était géré par Shirogumi Inc. et M. Atsuki Sato, le superviseur des VFX, s’en chargeait. M. Hiroyasu Kobayashi de chez Khara Inc. avait fait les VFX de la série Evangelion. Il était en charge de la phase 2, à savoir la création des effets. Enfin, M. Daisuke Onizuka (qui avait aussi fait les VFX de Evangelion), se chargeait des scènes d’action. Vu qu’ils étaient tous très expérimentés car ils avaient déjà travaillé avec M. Anno, le film ne pouvait pas être finalisé sans leur support.

«Le manga de Shôtarô Ishinomori a joué un rôle majeur dans ce projet. »

AL : Est-ce que Hideaki Anno veut continuer à travailler sur d’autres super héros japonais, ou Shin Kamen Rider 2 serait son nouvel objectif ?

K D : Lors d’une rencontre publique, M. Anno a évoqué la possibilité d’une suite (plus précisément Masked World, en référence au chapitre final du manga de Shôtarô Ishinomori, ndlr). Si l’équipe technique et les acteurs peuvent se réunior pour le projet, nous pourrions voir ce film arriver dans le futur.

AL : Le manga original Kamen Rider de feu Shôtarô Ishinomori apportait une violence graphique similaire à Shin Kamen Rider, est-ce un hommage au maître ? Que reste-t-il de Shotaro Ishinomori dans Shin Kamen Rider ?

DK : Le manga de Shôtarô Ishinomori a joué un rôle majeur dans ce projet. Le manga ne précédait pas la diffusion de la série. Il s’agissait d’une stratégie de franchise multimédia : le manga était publié de manière presque simultanée à la diffusion de la série. C’est pour cela que lorsque M. Hiroshi Fujioka s’est blessé et a dû quitter temporairement le tournage de la série, ils ont dû inventer Kamen Rider 2 (Nigo) pour poursuivre la série. Par conséquent, cela a impacté la trame du manga. La version manga de Kamen Rider, qui a été influencée par le dynamisme de la série, est aussi considéré comme le Kamen Rider originel. C’est pour cela que nous respectons la série, mais également le manga de Shotarô Ishinomori, dont nous avons utilisé de nombreux éléments dans le film. Dans le manga Kamen Rider, il y a un chapitre où les protagonistes confrontent 11 Kamen Riders ennemis. Et nous sommes enfin arrivés à matérialiser ce passage dans notre film. Mais vous constaterez que le film est influencé par d’autres œuvres de Ishinomori telles Kikaider, Robot Detective et Inazuman.

AL : Kamen Rider a connu un grand nombre de séries et de films qui rendent la licence intemporelle, Qu’est-ce qui différencie ce film par apport aux autres films Kamen Rider ?

DK : C’est une question difficile. Ce n’est pas une œuvre sur laquelle nous avons ajouté des extensions ou des supports supplémentaire, notamment pour en améliorer la compréhension, mais elle poursuit plutôt l’expérience du Kamen Rider d’origine – dont la série et le manga – ainsi que le monde crée par M. Ishinomori. Le film peut sembler soit nostalgique ou totalement nouveau.

AL : Le film sortira dans de nombreux pays sur la plateforme Amazon le 21 Juillet. Est-ce que d’autres séries Kamen Rider auront la chance d’être disponible sur la plateforme ?

DK :  A l’heure où Godzilla et Ultraman connaissent une renommée mondiale, nous, chez Toei Company Ltd., souhaitons travailler plus dur pour que les spectateurs au-delà du Japon, et ceux qui vivent en Europe, puissent connaître Kamen Rider à l’avenir. En procédant ainsi, nous souhaitons initier les spectateurs à nos anciennes séries au bon endroit et au bon moment.

AL : En quelques phrases comment décririez-vous Shin Kamen Rider pour donner envie au public de regarder le film ?

DK : Peu importe ce que vous avez regardé par le passé ou ce que vous connaissez de M. Anno, notamment Neon Genesis Evangelion, nous voulons que vous regardiez Shin Kamen Rider d’abord. Vous constaterez que ces personnages viennent du Japon et découvrirez le chagrin qui leur est propre.

 

Remerciements au NIFFF, à la personne en charge de la Relation Presse Marie Wanert, à Fabien Mauro pour la traduction française, à l’interprète Sayaka Smith et au producteur Koide Daiju.

Propos recueillis par Guillaume Lopez

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