Dans la foulée d’Astro le petit robot, Toei Animation se lançait il y a soixante ans dans la production de série animée hebdomadaire avec, à la réalisation de Ken l’enfant-loup, un certain Isao Takahata…
Dans la jungle himalayenne, le jeune Ken grandit, élevé par des loups. Tout bascule quand une météorite percute la forêt, causant une catastrophe écologique. Perturbés par la famine, les animaux sont contraints de quitter leur habitat, et de s’affronter entre eux. Ken veille particulièrement sur deux louveteaux, Chichi et Poppo, ce qui énerve particulièrement le vieux loup borgne Jack, méfiant envers cet humain. Pourtant, après s’être mutuellement sauvé la vie, Jack et Ken deviennent complices et unissent leurs forces pour protéger leurs congénères des dangers qui les menacent. À commencer par les prédateurs naturels (un ours balourd et un tigre rusé)… et les humains !
Quand, le 1er janvier 1963, est diffusé le premier épisode d’Astro le petit robot, c’est un choc sans précédent dans l’industrie de l’animation japonaise. Et en particulier aux studios Toei Animation, qui ne considéraient l’animation jusqu’ici que sous un spectre qualitatif, digne du grand écran. Or, le marché du cinéma est en déclin, et la société doit diversifier ses productions. Si Toei a commencé à s’intéresser à la télévision, c’est d’abord via des séries en prises de vues réelles. L’arrivée du dessin animé de Tezuka force les studios à investir, à leur tour, dans l’animation télévisuelle. Après un long temps de se décider et de monter le financement, le projet est initié quelques semaines seulement avant le début de sa diffusion ! L’équipe réduite travaille donc avec d’énormes contraintes d’écriture, d’animation, de réalisation… bref, de production ! D’autant plus que Ken l’enfant-loup est une création originale, et non une adaptation de manga. C’est un ancien disciple de Tezuka, Sadao Tsukioka, qui prend en charge la conception graphique de la série, dont il supervise l’animation avec Yasuo Ôtsuka. Il partage la réalisation avec Yugô Serikawa, et un jeune talent, Isao Takahata.
Alors que Tezuka s’est inspiré des méthodes de Hanna-Barbera et propose une animation limitée pour répondre aux exigences d’une diffusion hebdomadaire, les artistes de Toei cherchent à rester dans la philosophie du studio privilégiant l’animation. Les astuces sont multiples : la caméra se déplace (zoom, travelling…) sur des décors fixes, les valeurs de plan changent régulièrement et alternent entre gros plans sur des visages expressifs et figés et silhouettes en arrière-plan aisées à animer… Mais c’est avant tout le rythme de la narration qui, en collant à l’animation saccadée, permet à Ken l’enfant-loup d’imposer un nouveau critère dans l’animation télévisuelle, et de ne pas être un simple suiveur. Au final, entre le 25 novembre 1963 et le 16 août 1965, ce seront pas moins de 86 épisodes qui seront diffusés sur NET TV, ancêtre de TV Asahi. Mais surtout, les techniques de production initiées sur ce projet permettront à Toei de produire deux autres séries en parallèle, Kaze no Fujimaru et Uchû Patrol Hopper. Incontournable de l’histoire de l’animation japonaise, Ken l’enfant-loup n’aura pourtant jamais eu la chance d’être diffusée en France, alors qu’elle marque les premiers pas d’un artiste ô combien célèbre…
Vous devez vous connecter pour laisser un commentaire.