Intéressant parallèle, Bub ! et très bon post de Darthantos sur l’élection.
Mais sur le “capitalisme” (posts du 30 octobre), là je quitte ce cher Darth’ et trouve plus lucide “quelque part” la vision d’Owa ; que j’ai appris à estimer d’ailleurs, bien que partageant rarement ses développements (prémisses trop différentes).
Donc rectification : moi je n’ai pas parlé des rapports entre morale et “capitalisme”, mais entre morale et “riches”. Et à la différence de ce qu’a affirmé Darthantos pour faire simple et par hâte je suppose (car il le sait bien) le “capitalisme” ne consiste pas à être le plus riche possible. Les termes de “capital” et de “capitalistique” ont un sens en économie – j’ai même fait un cours de SES là-dessus à des élèves – en revanche celui de “capitalisme”, néologisme créé par Karl Marx à propos de la structure de l’entreprise et du travail humain, n’a de sens qu’à l’intérieur du système philosophique marxiste. Owa a raison : pour Marx il est immoral d’être capitaliste, pas simplement amoral. Mais ce point ne m’occupe pas, moi je soutiens qu’il n’est pas immoral d’être riche, et je n’adhère pas au marxisme donc je n’accepte pas ses grilles d’étude.
Je m’étais promis de ne pas le faire, mais crise oblige, je vais prétentieusement faire un cours. Je crois qu’il faut, juste pour poser un ou deux fondements peu douteux, et quand je ne suis pas guide j’enseigne philo, histoire, art…. Donc, cours (il n’y aura pas de mots difficiles et vous êtes libres de quitter la classe).
Epistémologie de l’économie : QU’EST-CE QUE L’ARGENT ?
Il y a deux réponses.
1) L’argent n’est pas de la matière.
Ce n’est pas un bout de métal jaune, ni un rectangle en papier, ni une carte en plastique, vous en serez d’accord. C’est une virtualité, une projection mentale opérée sur une comptabilité garantie. Garantie uniquement par des institutions humaines, elles-mêmes abstraites. Ex. : une banque n’est pas un bâtiment en pierre ou béton, mais un ensemble d'”emplois” et de “clients” en interaction sur une comptabilité.
Alors l’argent, n’est-ce que de la fumée ? peut-être, quand on voit que les gouvernements américain, européens, puis chinois viennent d'”injecter” dans l'”économie” plusieurs centaines de milliards et que probablement aucun déplacement de liasses de billets ni de lingots ne matérialisera cela. C’est le déplacement d’une convention comptable, venue de la zone (déficitaire !) “réserves”, “budget” et au bout du compte “PIB”, et arrivée dans la zone “économie actualisée”. Qu’a t-on alors déplacé ? de la confiance, donc à la limite rien du tout, l’Etat a donné seulement une garantie, celle qu’il existe et qu’il a un gros PIB. Avec lui, du PIB, sans lui, fini, et cela tout le monde le sait. Ex. : la Somalie n’a pas de PIB mesurable vu que ce n’est plus un Etat. Le risque : qu’un jour les gens réalisent que l’Etat n’est pas un solide, que ce n’est lui aussi qu’une projection mentale.
Ce qui fait que certains raisonnements humanitaires actuels n’ont pas de sens, hélas ( vous savez, “Avec seulement dix milliards d’euros on sauverait de la famine 200 millions de gens, et la Chine vient d’en gaspiller 650 milliards”), c’est que ces sommes sont de la charité et pas de la confiance (au contraire, même) et seraient “pure perte”. Malheureusement on est dans un calcul fondé uniquement sur la psychologie des masses “développées”. Si tout rate, ce ne sera pas la “libération des prolétaires des chaînes du capitalisme” : ce sera la Somalie. Partout.
2) l’argent est une deuxième entité, virtuelle autant que réelle puisque les représentations mentales constituent la réalité de l’Homme. C’est le pouvoir.
Tout le monde le sait. Ainsi l’ado meurt d’envie de toucher ses premiers salaires parce qu’avec, explique t-il “Je vais POUVOIR partir sur la côte, je vais POUVOIR aller en boîte, je vais POUVOIR m’acheter une chouette bagnole”. Con, mais humain. L’adulte n’est en rien différent de l’ado. Le riche, c’est quelqu’un qui a du pouvoir, dans nos sociétés. Si l’on veut, on peut même soutenir avec Bub “argent = pouvoir = argent”. Mais qui ne veut aucun argent, c’est à dire aucun pouvoir ? et avec quel pouvoir vaincre le pouvoir ? Besancenot a dit que le seul moyen sera “un jour, un soulèvement armé”. Je le lui laisse. Car si vous supprimez l’argent-pouvoir, c’est le flic rouge au service de l’Etat qui a du pouvoir. Et combien plus ! car dans ce système-là il ne reste aux autres RIEN en termes de pouvoir. Il est sûrement utile, intelligent, démocratique de limiter le pouvoir-argent avec le pouvoir-Etat, mais restons modérés !
Vivre sans pouvoir, ce n’est pas vivre.
Dans le monde libéral, il peut arriver qu’on n’ait que très peu d’argent, mais avoir une bonne idée peut tout changer. Qui ne le sait ? les désespérés d’Amérique du Sud ne risquent pas leur vie sur des barcasses pour rejoindre Cuba, mais bien pour rejoindre les Etats-Unis.
Voilà. Que l’on accepte ou non mes conclusions, j’espère (on peut rêver) avoir en tout cas convaincu certains que l’argent n’est nullement une grosse cassette pleine de louis d’or où tout ce que puisent les riches est “donc” retiré aux pauvres. Vision manichéenne et cartoonesque à mon avis. Et pas la peine de m’opposer les textes de Marx sur le capitalisme : je les ai lus.
Edité par Lord Yupa le 11-11-2008 à 22:55
Edité par Lord Yupa le 11-11-2008 à 23:18
Edité par Lord Yupa le 11-11-2008 à 23:37
Edité par Lord Yupa le 11-11-2008 à 23:46
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Edité par Lord Yupa le 12-11-2008 à 00:04