Je profite de l'ouverture du sujet pour y insérer deux précédentes critiques sur ''Les secrets de l'économie japonaise'' et la première série Tv de Cyborg 009 que j'avais publié dans d'autres topics du forum. Je ferai des critiques entièrement neuves prochainement.
Cyborg 009 la première série TV (1968)
J'en avais déjà parlé assez succinctement sur le forum en envisageant que cette série ait éventuellement été diffusée en France dans les années 60 (finalement, il s'est avéré qu'il s'agissait bien des deux premiers films uniquement découpés en épisodes de 1 à 3 minutes). Cette fois-ci, il s'agira d'une véritable rétrospective critique au sujet de cette adaptation du manga de Shôtaro Ishinomori et dont j'ai acheté l'intégral en juin dernier.
Un premier point à souligner, c'est que cette série cible principalement les enfants et les préadolescents, ce qui se remarque d'ailleurs dans le traitement de l'histoire et des personnages. Il ne faut donc pas s'attendre à un développement scénarique extrêmement poussé comme ce sera le cas dans le manga à partir du milieu des années 70. De plus, la qualité technique de l'anime a sacrément vieilli tant du point de vue du dessin, de l'animation, du doublage et des musiques. Néanmoins j'ai eu un certain plaisir à la visionner, probablement parce que la série propose un savant mélange d'action jouissive et de scénarii accrocheurs. J'ai eu l'impression de revenir à l'époque de mes jeunes années. Nul doute que quinze ans auparavant, si cette série était passée à la télévision française, elle aurait été l'un de mes programmes favoris.
De quoi parle Cyborg 009 pour les néophytes ? Tout d'abord, je rappelle que le manga est actuellement toujours publié par Glénat qui j'espère n'aura pas l'idée de stopper la série pour mauvaises ventes alors qu'on entre dans une période extrêmement intéressante point de vue scénario et surtout qu'on approche des chapitres publiés dans le Shônen Big Comic et dans le SF Anime Magazine (autant dire que je salive d'avance) ! Je n'aimerai pas commencer à commander les tomes manquants chez l'éditeur italien du manga (en espérant que la série soit complète) voire au Japon étant donné mon faible niveau dans ces deux langues.
Pour résumer rapidement l'histoire, Cyborg 009 débute lorsque Black Ghost, une mystérieuse organisation de marchands de la mort (d'armes de guerre donc) propose à différents pays de leur fournier une arme nouvelle : le cyborg programmé pour se battre. Pour cela, ils capturent différents humains à travers le monde dont ils modifient presque entièrement le corps pour les rendre plus résistants et capables d'agir en tant qu'arme. Mais un jour, les cyborgs se retournent contre leurs ''concepteurs'' et prennent la fuite. Joe Shimamura, jeune orphelin métis né d'une mère japonaise et d'un père inconnu (probablement américain), lui aussi transformé en cyborg, prend la tête de l'équipe et devient leur leader dans la lutte contre l'organisation Black Ghost.
La série qui nous intéresse ici date de l'époque des premières séries japonaises pour la télévision (la 53e plus précisément). Elle compte 26 épisodes en noir et blanc; à ce sujet, je me demande comme était produit ce type d'anime sans colorisation. Par une technique de trames ou bien les cellulos étaient vraiment coloriés avant de passer sous une caméra qui ne reproduisait pas la couleur ? La série reprend là où se sont arrêtés les deux premiers films de 1966 et 1967 (ceux justement sortis en France à la fin des années 60) : Joe et ses nouveaux potes ont détruit le repère de Black Ghost et poursuivent une vie relativement normale en essayant de dissimuler leur nature de cyborg, mais n'hésitent pas à se lancer dans la bagarre dès qu'un nouveau méchant/ennemi fait son apparition.
Les changements par rapport au manga sont également repris des films, principalement le physique de 007 qui passe de celui d'un adulte de 45 ans à celui d'un gamin d'environ 3-4 ans sans qu'on ne sache pourquoi Black Ghost a perdu son temps à capturer un enfant immature pour en faire une arme de guerre ! En fait, cette idée de 007 gamin est déjà présente dans le manga, mais elle ne dure qu'un seul chapitre et surtout, cette transformation en gamin a lieu après que 007 ait été changé en cyborg. En gros, dans le manga 007 prend lui-même la décision de devenir un enfant après être devenu un cyborg et non pas l'inverse. Visiblement, les concepteurs de l'adaptation animée ont flashé sur cette mini apparition de 007 enfant et en ont fait un personnage récurrent, quitte à trahir le personnage. Certes, 007 était déjà dans le manga l'élément comique du groupe et la version animée a conservé ses facultés de métamorphose, mais le voir en gamin sur 2 films et 26 épisodes devient rapidement lassant, d'autant que 007 est loin d'être attachant avec son physique de bébé sur pattes. Les autres par contre sont restés fidèles à eux-mêmes, y compris Joe qui a tout du héros shônen des sixties mais avec un petit côté leader pas désagréable, ce qui fait qu'on a vraiment plaisir à suivre ses aventures. Ce n'est pas pour rien d'ailleurs s'il est rapidement devenu mon personnage favori, tant dans l'anime que dans le manga. Même 003, la seule fille du groupe, n'est pas aussi cruche que la majorité des personnages féminins de l'époque; certes elle est loin d'avoir la force de ses partenaires mâles, mais elle n'est pas inutile et agit de manière réfléchie et intelligente.
Le scénario de cette série est relativement basique au départ et les épisodes ne se suivent jamais. Le schéma un épisode = un ennemi est surexploité jusqu'à la fin, ce qui est assez dommage car certains épisodes auraient mérité un développement plus approfondi. Si les épisodes s'inspirent beaucoup du manga au niveau des personnages employés et des situations, ils sont loin de suivre l'histoire d'origine à la lettre. Souvent le scénario est original et les personnages repris ont des rôles très différents par rapport au manga. Le manga, qui a débuté en 1964, est au départ clairement ciblé pour les jeunes (du moins pour les deux premiers volumes) et la série animée n'y échappe pas. Les premiers épisodes sont très enfantins et la présence constante de 007 ne fait qu'augmenter le côté puéril des histoires. Néanmoins, plus la série avance, moins le côté manichéen des personnages est présent et les histoires abordent des thèmes mieux travaillés et la violence se fait plus présente (présence de sang, accumulation de cadavres, défigurations, etc.). On a enfin droit à des adversaires plus humains qui prennent peu à peu conscience de leurs erreurs et non des ''ennemis qui agissent mal parce qu'ils sont méchants''. Certains épisodes pourraient ne pas convenir à tous les enfants de par les thèmes abordés : seconde guerre mondiale (avec une réflexion étonnante pour l'époque sur le désir de vengeance d'un vétéran japonais face à l'armée américaine), armes de destruction massive, radioactivité… Là où les premiers épisodes se terminaient toujours de manière positive, ceux de la seconde partie sont plus proches d'une ambiance douce-amère. Le dernier épisode, s'il voit les héros s'en sortir indemne, s'achève sur une note pessimiste puisque les cyborgs ne sont finalement pas venus à bout de leur adversaire et que celui-ci est encore capable de nuire. La série ne cache pas les moments de faiblesse des protagonistes et surtout ne les montre pas tout-puissants.
Le but premier du mangaka était de dénoncer le trafic d'armes. Si cette critique est absent dans les premiers épisodes de la série, qui sont plus proches de la science-fiction, il revient en force dans la seconde partie et plusieurs épisodes ont pour trame de fond un adversaire ayant conçu une arme redoutable menaçant l'avenir de l'humanité. Certes, le thème n'est pas aussi poussé que dans le manga, mais il n'est pas non plus traité à la légère (les conséquences sont crûment explicitées). En ça, la série se rapproche pas mal du manga à ces débuts.
Je n'ai pas le même avis concernant le traitement des personnages ou plus exactement leur utilisation. Malheureusement, si les cyborgs sont bien neuf dans la série (en plus du professeur Gilmore qui les a conçu avant de se révolter contre Black Ghost et fuir avec ses ''créations''), seuls quatre sont vraiment exploités : Joe bien sûr, Françoise (003) sa fiancée et enfin 006 (le cuisinier chinois) et 007 (le gamin farceur d'origine anglaise) qui font office de duo comique récurrent pour le grand malheur du spectateur plus âgé. De temps à autre (ré)apparaissent 004 (le chauffeur de camion ayant fui l'Allemagne de l'est) et 008 (l'ex-esclave congolais) lorsqu'on a besoin d'eux, mais sinon les histoires tournent toujours autour de ce quatuor au détriment des autres personnages. À noter que la seconde série reprendra le même schéma, mais cette fois-ci avec une récurrence Joe/002 (l'ancien voyou new-yorkais) au point de faire exploser le nombre de dôjinshi mettant ces deux-là en scène dans des situations plus que suggestives.
En y repensant durant le visionnage, je n'ai pas hésité à comparer cette première série à celle de Lupin III (datant de 1971) : toutes les deux sont très proches de l'ambiance du manga d'origine et reprennent des éléments de la version papier tout en proposant des histoires très différentes du matériau de base. À la différence que si Lupin III était plutôt ciblé adulte, Cyborg 009 lui est clairement pour un jeune public. On peut d'ailleurs faire le même constat pour les deux autres séries animées : dans la seconde série Tv, Cyborg 009 et Lupin III s'éloignent beaucoup du manga tant dans les histoires que dans l'ambiance et s'adressent mutuellement à un public familial alors même que Lupin III était toujours destiné aux adultes et Cyborg 009 commençait dans les années 70 à cibler un public un peu plus âgé. De plus, dans les deux séries, on retrouve l'adversaire qui colle aux fesses du héros durant la majorité des épisodes : l'hilarant (et touchant) inspecteur Zenigata pour Lupin, les trois chefs sans classe de Black Ghost pour Cyborg 009. Enfin, la troisième série Tv de Cyborg 009 (comme pour Lupin III) se concentre davantage sur le manga et reprend l'ambiance de la seconde partie de la version papier; version sérieuse pour Cyborg 009, version parodique pour Lupin III. Voilà pour cette petite comparaison amusante…
Côté technique, inutile d'y chercher du Ergo Proxy; on en est bien loin. Les personnages sont figés, les décors ramenés à une simplicité stricte, les plans se répètent fréquemment durant trente à quarante seconde lors d'un mouvement… Pourtant, je n'ai (contrairement à ce que je craignais) pas vraiment été dérangée par cet aspect. Pour une série Toei, j'ai même trouvé l'animation correcte ! En dehors des plans fixes ou réutilisés jusqu'à l'excès, les scènes d'action sont plutôt bien animées pour l'époque et assez dynamiques. J'ai vu bien pire dans des séries animées datant des années 70 ! Le dessin est de bonne qualité et relativement homogène, mis à part les expressions des personnages qui ne sont pas toujours raccord au sentiment qu'ils sont censés exprimer à l'instant. Chose étonnante, même la synchronisation des lèvres est assez convenable ! Certes, le mouvement n'est pas toujours conforme à ce que dit le seiyû, mais lorsque le personnage a cessé de parler, le seiyû a également terminé son boulot. Je n'aurai jamais cru voir ça dans une série des années 60 lorsqu'on voit le massacre pratiqué dans les années 80 sur Dragon Ball ou Saint-Seiya (pour ne citer qu'eux) !
À propos du doublage, voilà une bonne occasion de mettre à bas les idées reçues sur la qualité du doublage japonais par rapport au doublage français. Ce ne fut pas toujours le cas, chers fans, et cette série le montre bien ! Si la synchro lèvres/paroles est assez correcte comme dit plus haut, Cyborg 009 n'est pas une série extrêmement bien doublée. Si les voix des différents cyborgs collent plutôt bien à leur personnalité (sauf celle de 007 qui est horripilante), les voix des autres personnages apparaissant dans la série se répètent au fil des épisodes (les filles par exemple ont toutes la même voix) et le jeu n'est pas toujours conforme à la situation. Il sonne même souvent faux ! Lorsque ce n'est pas sur joué à outrance… Une raison de plus pour regretter de ne pas encore avoir découvert le trop rare doublage français des deux premiers films, histoire de découvrir comment nos comédiens nationaux de l'époque se sont débrouillés pour retranscrire les dialogues à l'écran à partir de la VO.
Les musiques employées sont dans le ton de l'époque, mais remplissent parfaitement leur rôle et gardent un certain charme. Je suis particulièrement fan du générique de début, bien mieux rythmé que le générique italien de la seconde série (diffusée en 1982) !
Thème de la série de 1968
Un dernier point à souligner et qui a beaucoup compté dans mon appréciation de la série : le chara-design de la série. Le dessin reprend celui du manga et correspond au style d'époque du mangaka. Les cyborgs sont physiquement stéréotypés par rapport à leur pays natal (notamment 006 qui vient de Chine et 008 d'origine congolaise), mais sans pour autant tomber dans la caricature, leur personnalité (bien moins stéréotypée) y aidant pour beaucoup. En revanche, Joe/009 est très différent de celui du manga dans les deux premiers films, il revient dans la série à un design plus proche du manga sans s'en rapprocher pour autant. D'autant que le design se permet de trahir un point pourtant crucial dans le manga : Joe n'a plus les cheveux bruns, mais noirs. Or, c'est bien cette couleur de cheveux étonnante pour un Japonais qui va intriguer ses camarades et révéler son passé d'orphelin métis haï par ses semblables. Ici, rien de son passé ne nous est expliqué et d'ailleurs, ses origines humains ne sont pas les mêmes entre les films et le manga. Pourtant, j'ai toujours un faible pour ce design, tant celui du film que celui de la série. Joe y gagne un côté sombre voire badass (souvent tourné en dérision dans les fanarts d'ailleurs) qui renforce son côté leader. Les adaptations animées suivantes se rapprocheront davantage du manga, malheureusement si son design du troisième film et de la troisième série est très réussi, celui de la deuxième série en fait un blondin émotif et timide au point qu'on a l'impression qu'il est passé de l'âge de 18 ans à 13 ans !
Alors que dire de cette première série de 1968 ? Qu'il s'agit d'une ''bonne'' adaptation d'époque qui a son originalité propre puisqu'elle ne reprend pas le manga à la lettre sans pour autant le trahir et qui reste agréable à regarder même 45 ans après si on apprécie les vieux anime et si l’on n’est pas trop regardant sur le côté technique qui lui a pris un sale coup de vieux. Les personnages sont sympas (sauf 007 !) et l'ambiance mélangeant humour, action et mystère apporte une touche particulière à l'anime. Une curiosité à découvrir pour tout fan du manga, à condition d'avoir conservé son âme d'enfant ! Par contre, il vous faudra faire une croix sur une VOST (ne prenez pas en compte les quelques images que j'ai posté, il s'agit d'une traduction amateur sur quelques épisodes très difficile à trouver), car la série n'est disponible qu'au Japon et n'a jamais été exportée. Le coffret est assez cher, mais bien moins que les deux autres séries qui dépassent facilement les 400 à 500 euros pour un nombre équivalent d'épisodes !
Japan INC
Auteur : Shôtaro Ishinomori (Cyborg 009, Sabu et Ichi, Kamen Rider)
Le premier manga édité en Occident… destiné aux étudiants en économie de l'université de California (y a-t-il une seule université en France qui ait eu la même initiative ? Je ne le pense pas…) en 1988 !
Bref, dans ce manga nous suivons le parcours d'une entreprise japonaise composée de quelques membres récurrents, jeunes ou plus âgés, face à d'autres universités du même pays ou américaines. Il ne faut pas y chercher de l'aventure ou de l'action ici : le scénario se contre sur diverses rencontres entre entreprises, parfois plombées par des crises ou la faillite d'une entreprise, entre-coupées de longues explications des protagonistes sur l'économie mondiale ou japonaise. L'édition américaine propose d'ailleurs des explications supplémentaires sur un grand nombre de pages en guise d'annotations : aucun doute, cette édition a clairement été conçue pour avant tout mieux comprendre l'économie japonaise mais avec un ouvrage plutôt amusant (l'humour influencé par Osamu Tezuka étant encore prépondérant dans ce manga).
Apprendre en s'amusant : une bonne initiative, non ?
Les informations données par le manga ne sont certes plus valables aujourd'hui, mais ce manga reste très plaisant à lire ne serait-ce que pour son ambiance plus adulte et réaliste et son thème original. Joli travail, M. Ishinomori ! 😉