Profitant de quelques trous dans mon emploi du temps, j’aimerais aborder le sujet “Otaku” : pour ceux qui ne voient pas de quoi je parle, il s’agit du magazine publié par FJM, à l’origine de moult magazines aux thèmes bien souvent plus vendeurs que mûrement réfléchis…
Pour mieux situer le mag’, disons qu’il est réalisé par la même équipe que le “fameux” Gameplay RPG, qui a suscité plus de polémiques (entendez par là : sanglants débats d’ados boutonneux plus allaités à l’insulte qu’à la dialectique construtive) au sein de la communauté RPG que le débat “insécurité” qui envahit aujourd’hui nos journaux télévisés, c’est pour dire…
Impossible donc de parler d’Otaku sans se référer au mensuel (ou bimestriel, selon l’humeur des rédacteurs) dont il est le parfait “spin-off” : Gameplay RPG.
Voyant l’équipe de Gameplay se faire assez régulièrement copieusement massacrer, en particulier sur les forums ezboard, en raison de leur manque de professionalisme, de l’aspect trop tape-à-l’oeil de leur produit, de leur manque d’objectivité chronique, je dois bien avouer qu’un sentiment de pitié m’a envahi à leur égard ; ce qui m’a jusqu’à présent conduit à relativiser, à me montrer finalement trop indulgent et trop passif dans mes propos les concernant.
Je pensais sans doute qu’il leur fallait plus de temps : le temps de se faire une place, de trouver un public stable, de réunir un staff compétent, au style écrit plus soigné et plus respectueux à la fois des lecteurs mais surtout du sujet abordé, qui est, il faut le rappeler, leur passion : le RPG.
Aussi les “je ne parlerai pas plus de ce jeu parce que c’est de la merde”, ou les “bon, je ne vais pas me lancer dans ce débat, vous n’en avez probablement rien à fouttre” (je cite de manière approximative, ne laissant pas non plus l’immense privilège à Gameplay ou Otaku de figurer sur ma table de nuit) ne m’amusent guère, et soulignent au contraire le manque de sérieux du staff.
“On veut être proche des lecteurs, des ados, parler comme eux, briser les frontières, ne pas les prendre de haut”, entends-je parfois à titre justificatif… Mais je ne savais pas que la proximité appelait la vulgarité, le je-m’en-foutisme, l’irrespect.
Car il est décidément nécessaire d’apprendre à ces pseudos-journalistes (“vous n’êtes pas à la place du journaliste, c’est facile de critiquer”, se plaint Jay, rédacteur en chef des deux canards) la différence fondamentale de perception et de portée qui existe entre un “je n’ai pas particulièrement aimé” et un “c’est de la merde”.
Je ne suivrai donc pas leur propre voie en brandissant exclusivement des flopées de propos négatifs à leur encontre. Non, j’admire leur tenacité, leur passion, leur esprit d’initiative.
Il y a de la volonté, du courage là-dessous, c’est indéniable.
Si leur talent ne s’exprime pas formellement, on ne peut occulter le coeur que ces jeunes gens mettent à l’ouvrage.
Mais cela s’arrête là, bien malheureusement. Toutes ces qualités atteignent rapidement leur limite lorsqu’il s’agit de sa placer dans une prospective évolutive, méliorative.
Car il faut bien avouer qu’autant Grpg qu’Otaku n’ont pas globalement fait montre d’une volonté nette de tenir compte des critiques, d’en tirer profit pour en ressortir grandi (contrairement à ce qu’en dit son rédacteur en chef).
Autant Animéland, dans des temps plus reculés, avait le don de mêler savamment (et savoureusement) le plaisir, la déconne et le professionalisme formel, autant Otaku et Grpg viennent trop souvent à s’enfoncer dans une médiocrité que l’on ne peut finalement que déplorer.
Je ne pense pas que se moquer ouvertement d’un jeu vidéo, sans concession, sans modération, soit digne d’un fan du genre. En comparaison, je ne peux donc que féliciter Animéland de ne jamais s’être adonné à ce genre de bassesses infantiles et gratuites.
En plus de cette puérilité de langage, de traitement thématique, il ne faudrait pas oublier l’aspect fourre-tout des deux magazines.
Otaku, ou le magazine de l’animation, du manga, des jeux vidéos, du cinéma HK et de la culture (!), selon ses propres intitulés. A quand l’étude sociologique des concombres de mer en période de pleine lune ?
Et oui, à force de se diversifier à l’excès, sans modération, on finit par perdre de l’efficacité, de la rigueur, mais également son identité ; et à finalement sombrer dans le syndrôme du magazine qui traite de tout et de rien, sans réelle conviction. Le résultat est d’autant plus affligeant lorsque le staff n’est pas à la hauteur de ces innombrables tâches qui requièrent bien évidemment des informations fiables, un savoir-faire linguistique, une maîtrise correcte du sujet.
Du coup, on obtient des âneries comme celles qui se sont glissées dans un certain dossier Saint Seiya, qui s’est voulu tellement “m’as-tu vu ?” qu’il a sombré dans le chaos (des fonds de page trop colorés, qui masquent le texte, un fil conducteur d’article inlassablement entrecoupé par des encadrés qui n’en sont pas vraiment vu qu’ils occupent une ou parfois deux pages, des images tellement nombreuses et laidement disposées qu’elles saturent à terme la structure du dossier, un manque de cohérence dans le traitement des différents thèmes).
Sans oublier le dossier Dragon Ball, non seulement maladroitement cantonné à un résumé de l’animé (chose hilarante : le rédacteur en chef se met à résumer en 3 pages environ la première partie de la saga, puis, pris par le temps, il nous annonce en plein milieu de l’article qu’il s’est mal organisé et qu’il va devoir abréger la suite… du jamais vu ! Même dans le milieu d’un fanzinat qui est à mes yeux bien mieux côté que toutes les productions d’FJM réunies), mais surtout monstrueuse mine d’informations fallacieuses (c’est à se demander si le dossier n’a pas été fait uniquement de mémoire…).
Ne soyons pas de mauvaise foi, les dossiers Japanimation de Gameplay ou Otaku ont relevé le niveau, depuis (on pouvait difficilement faire pire, vous me direz) : plus sobres, plus littéraires, plus passionnés, plus ordonnés.
Mais toujours cette irréfragable tendance à surfer sur la mode (jamais Grpg ne se risquera à traiter d’un animé pas encore très connu dans le “milieu”… Mieux vaut attirer le lecteur à grands coups de dossiers Eva, Love Hina ou Escaflowne), à parler de tout et de rien sans réelle cohérence (une rubrique d’une page par numéro pour appendre le japonais: vous en avez rêvé ? Gameplay l’a fait…), et ces diables d’informations erronées.
N’oublions pas qu’Otaku nous prodigue son “merveilleux” CD rempli de goodies plus salvateurs les uns que les autres (le “magazine+CD” étant le cheval de bataille d’FJM). Mais combien sommes-nous à nous dire qu’il serait préférable pour le staff de se concentrer sur le magazine en lui-même, au risque de ne pas nous abreuver de génériques dopés au larsen, de fonds d’écran artisanaux, ou d’autres gadgets bien frivoles ?
Tout cela pour en venir à l’article du site d’Animéland (dans la rubrique des revues de presse) concernant Otaku, que je tenais à complèter.
Je suis ravi que les mêmes détails aient sauté aux yeux de son auteur autant qu’aux miens (preuve que je ne suis pas un agressif chevronné qui attente sans raison à la vie de toutes les publications estampilées FJM) : à savoir le gag au sujet d'”Hikaru no go” et la pub pour les armes factices.
Mais faut-il encore souligner le manque de clairvoyance qui caractèrise l’auteur de la première de ces maladresses ? Un animé qui a pour sujet principal un jeu aussi peu populaire que l’Othello serait-il réellement envisageable au Japon ? Est-ce que les rédacteurs d’Otaku réfléchissent avant d’écrire ? Parce que là, l’erreur est franchement de taille…
Bon, je ne veux pas non plus me lancer dans une opération tolérance zéro. Souhaitons à Gameplay et à son clône Otaku (car les deux magazines ayant tous deux tendances à étendre leurs attributions, on ne voit plus vraiment la différence de politique éditoriale entre les deux) un prompt rétablissement, une mutation prochaine (relativement aux défauts précités) ; souhaitons leur également de ne pas égarer leur passion, le coeur qu’ils ont jusqu’à présent mis à l’ouvrage.
Parce que répétons-le, même si ces magazines ne répondent pas à des attentes, si indispensables soient-elles, ils sont tout de même le fruit d’un labeur, d’une motivation qu’on ne peut qu’encourager à aller plus de l’avant encore.