Kei Toume est une mangaka touche-à-tout ayant abordé des thèmes aussi variés que les histoires de capes et d'épées avec Kurogane, les intrigues policières avec Les Mystères de Taisho ou le pur récit du quotidien avec Sing "yesterday" for me. Avec Les Lamentations de l'Agneau, l'auteur aborde de fort belle manière la thématique des vampires ou plus précisément les thématiques associées aux histoires de vampires.
Ca commence un peu comme beaucoup de manga : Kazuna est un lycéen ordinaire, il discute de son orientation scolaire avec ses parents adoptifs, est amoureux de Yaegashi, sa camarade du club d'arts plastiques, bref les préoccupations d'un adolescent de son âge. Jusqu'au jour où…
Pris d'un malaise en présence de Yaegashi, il revoit en rêve des souvenirs de sa lointaine enfance, quand il vivait encore avec ses vrais parents et sa soeur aînée. Intrigué, il retourne sur les lieux de son enfance et rencontre une mystérieuse jeune fille qui n'est autre que Chizuna, sa grande soeur, qui lui révèle le terrible secret de leur famille : les Takashiro sont ateints d'une maladie orpheline qui leur donne soif… de sang humain.
Kazuna comprend fatalement qu'il est aussi ateint de cette maladie et par peur de blesser quelqu'un, s'isole petit à petit du monde extérieur en ne gardant pour seule compagnie que Chizuna et Minase, un jeune médécin proche de la famille qui s'avère être le seul à pouvoir soulager temporairement les crises de Chizuna.
Les Lamentations de l'Agneau n'est pas une histoire de vampires bien que l'apêtit du sang y fait immanquablement référence. Les rapports d'amour-haine, dépendance, possession, incestes font immanquablement penser aux relations troubles entre les personnages d'Anne Rice (Entretien avec un Vampire) mais là ou d'autres auteurs (je ne parle pas de Rice) auraient pu tomber dans du racoleur ou de la vulgarité, Toume dresse un drame psychologique d'une grande finesse.
Par exemple, Chizuna, la grande soeur, est un personnage d'une grande complexité ; sous des airs distants voir parfois vénéneux qu'elle utilise surtout pour se protéger, on découvre au fil des pages un personnage dans un état de grande détresse, condamnée par sa maladie à vivre isolée du monde et utilisée comme substitut affectif par son père après la disparition de sa mère (le manga reste très évasif sur la nature exacte des rapports entre Chizuna et son père dans cette relation de "substitut", ce qui contribue beaucoup au malaise ambiant). Elle se montre parfois dure mais c'est son seul moyen de maintenir les autres à l'écart et de cette façon – pense-t-elle – de les protéger.
Vous vous en doutez, les Lamentations de l'Agneau n'est pas un manga très gai mais malgré son ambiance parfois lourde, je n'ai pas souvenir de l'avoir trouvé déprimant. Même si le rythme est très lent, l'auteur parvient à maintenir l'attention en dévoilant par petites bribes le mystère entourrant les Takashiro et leur maladie. En focalisant certains chapitres sur les proches de Kazuna et leurs tentatives pour maintenir le contact avec lui, le manga maintient jusqu'au bout une lueur d'espoir en laquelle on a envie de croire.
Les Lamentations de l'Agneau (Hitsuji no Uta)
Kei Toume
ed. Delcourt, 7 volumes
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