#TBT : Si tu tends l’oreille

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Réalisée par un autre nom que Miyazaki ou Takahata, jamais sortie dans les salles française, la plus méconnue des productions Ghibli fête ses 25 ans – l’occasion rêvée de (re)mettre en lumière Si tu tends l’oreille.

Lectrice compulsive, Shizuku Tsukishima nourrit sa passion aussi bien dans le CDI de son collège qu’à la bibliothèque municipale où travaille son père. En regardant les fiches de prêt, l’adolescente de 14 ans constate que les ouvrages qu’elle a choisis ont tous été empruntés auparavant par un certain Seiji Amazawa ! Puisqu’elle aime la littérature et la poésie, ses camarades musiciennes se tournent vers elle pour adapter en japonais les paroles de la chanson Country Road… qu’elle oublie sur un banc. Le jeune inconnu qui les lui rend en profite pour se moquer de son style ! Quelques jours plus tard, en suivant un gros matou, Shizuku découvre la boutique d’un antiquaire où trône une somptueuse statuette de chat, le Baron. Surprise ! Elle y retrouve également le jeune goujat qui avait critiqué ses paroles : le petit-fils de l’antiquaire n’étant nul autre que le (pas si) mystérieux Seiji !

La sortie de Si tu tends l’oreille au Japon, le 15 juillet 1995, marque un tournant pour le studio Ghibli. Tout d’abord, le film se déroule intégralement dans le Japon contemporain, plus précisément en proche banlieue de Tokyo, dans la ville de Tama. Mais surtout, c’est le premier à ne pas être dirigé par l’un des deux fondateurs du studio ! Fidèle lieutenant, directeur de l’animation et chara-designer sur Le tombeau des lucioles (qu’il a aussi storyboardé) et Souvenirs goutte à goutte de Takahata, Yoshifumi Kondô atteint pour la première fois le poste de réalisateur. Il peut néanmoins compter sur l’aide de ses mentors, notamment Miyazaki qui signe le script adapté d’un shojo manga d’Aoi Hiiragi et fournira un clip musical présenté en introduction, On your mark,  afin de rassurer le public avec son nom « bankable ».

Teinté d’un bref passage fantastique qui fait appel au talent du peintre impressionniste Naohisa Inoue, Si tu tends l’oreille décrit à merveille les atermoiements de l’adolescence à travers son duo de héros affirmant leurs choix de carrière (elle veut devenir autrice, lui luthier) même s’ils sont anticonformistes. Le public japonais ne s’y est pas trompé, puisque le film domine le box-office de l’année 1995 sur l’archipel. Il restera pourtant longtemps inédit à l’étranger, la distribution internationale étant alors obnubilée par les seuls noms de Takahata et Miyazaki. On en arrivera à une situation ubuesque au début des années 2000, avec la sortie en France du Royaume des chats, vraie-fausse suite à Si tu tends l’oreille ! Petit bijou brillant par sa modestie et sa tendresse, le film sera hélas l’unique réalisation de Yoshifumi Kondô, qui décède en 1998 d’un anévrisme dû à la surcharge de travail durant la production de Princesse Mononoké. Ce qui n’en rend Si tu tends l’oreille que plus précieux.

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A propos de l'auteur

Matthieu Pinon