Il y a un demi-siècle, une petite fille suisse allait bouleverser l’animation nippone et changer la perception de cet art par les Japonais, sous l’impulsion d’Isao Takahata.
Voilà déjà quatre ans que Heidi a perdu ses parents et a été recueillie par sa tante maternelle, Dete. Mais cette dernière vient de trouver un travail à Francfort et ne peut emmener la petite orpheline de sept ans avec elle. Dete la confie donc à l’unique autre membre de sa famille, son grand-père paternel, un homme rustre et bourru vivant en ermite dans les Alpes Suisses. Ce vieil ours s’attendrit peu à peu au contact de l’adorable fillette, qu’il traite comme son propre enfant. Heidi, elle, se lie d’amitié avec un jeune gardien de chèvres, Pierre. Mais ce quotidien idyllique prend fin quand Heidi doit rejoindre Dete à Francfort ! La vie dans cette grande ville de l’Europe du 19e siècle ne lui convient pas : malgré la rencontre avec Claire, jeune handicapée qui devient sa meilleure amie, Heidi dépérit. Elle rejoindra heureusement la verdure des alpages, où elle sera rejointe par son amie qui, dans cet environnement, retrouvera ses facultés pour marcher !
L’origine de Heidi remonte à la fin des années 60. Shigeto Takahashi envisage d’adapter le roman de Johanna Spyri, mais doit attendre d’avoir trouvé le réalisateur adéquat. C’est grâce à Yasuo Ôtsuka que le producteur est mis en relation avec Isao Takahata, qui rejoint son studio Zuiyô sous garantie de conditions de travail confortables. Il y retrouve Hayao Miyazaki et Yoichi Kôtabe, avec qui il avait réalisé Horus, prince du soleil en 1968. Les trois larrons partent en 1973 en repérage en Suisse et en Allemagne, tant pour les décors que pour la population locale. Sous l’impulsion de Takahata, l’équipe produit 52 épisodes d’une qualité technique inégalée pour l’époque. Il peut compter, pour cela, du soutien de Miyazaki au layout et de Kotabe au character design, mais également de Masahiro Ioka, directeur artistique qui offre des décors splendides à Heidi. Enfin, comment ne pas citer les partitions de Takeo Watanabe, notamment le générique d’ouverture qui reste aujourd’hui encore connu de tous les Japonais ?
Diffusée à partir du 6 janvier 1974 sur Fuji TV, Heidi se démarque immédiatement dans le paysage audiovisuel animé nippon. À l’époque, les productions prennent essentiellement en compte les garçons en leur proposant des séries d’action, de sport et d’aventures, avec une propension de plus en plus forte pour la science-fiction (Mazinger Z, Gatchaman, Yamato…) : les personnages féminins y tiennent souvent le rôle de la demoiselle en détresse ou de l’intérêt amoureux. Les rares séries destinées aux jeunes Japonaises sont souvent juste un miroir genré avec des sportives (Jeu, set et match) ou des magical girls, pendant féminin des super héros. Heidi bouleverse donc ce paradigme en leur offrant une héroïne à leur image : une petite fille qui vit, rit, pleure, animée avec soin et réalisme. Leur adhésion est sans appel : Heidi tient la dragée haute à Yamato, les deux séries affichant un audimat de 15% ! Il faudra attendre Noël 1979 pour que débarque en France cette série, aujourd’hui disponible en toute légalité sur YouTube : un régal à partager avec la jeune génération actuelle !
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