Cinéma de deux mains

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Un second livre, Du ring à la rue, traite en priorité de la boxe et des arts martiaux sur les écrans américains et du cinéma de Hong Kong dans les années 1985-1994. Enfin, Chevaliers et Samouraïs s’intéressera aux films de sabre chinois et japonais (chambara).

Dans Tigres et Dragons, De Tokyo à Hong Kong, Christophe CHAMPCLAUX fait partager sa passion et sa connaissance des techniques et de l’historique des arts martiaux asiatiques. Ceux-ci transparaissaient déjà dans ses nombreux articles rédigés pour des revues spécialisées comme Karaté-Bushido. L’auteur, par ailleurs cinéphile éclectique, s’est notamment occupé de l’édition vidéo de certains des fleurons du cinéma japonais et chinois pour Ciné Horizon. Dans une première partie, l’ouvrage débute par une évocation de l’incontournable Bruce LEE (1940-1973), à l’origine de la notoriété mondiale du cinéma kung-fu. En quatre films, le “Petit Dragon” impose au début des années 1970 son personnage de “Kung-Fu Héros” évoluant dans un contexte contemporain. Avant et après lui, les réalisateurs préfèrent se cantonner généralement à des sujets historiques. Son charisme à l’écran et ses impressionnantes techniques de combat le rendent inoubliable malgré la brièveté de sa carrière, abrégée par un oedème cérébral. Sino-Américain, Bruce LEE se révèle également un homme de double culture marqué par le métissage.

Christophe CHAMPCLAUX se concentre ensuite sur les deux grands personnages de combattants à mains nues du cinéma nippon. Il s’agit d’abord du Streetfighter incarné par Sonny CHIBA dans une série de trois films de karaté très violents dans les années 1975-1977. Dans un registre différent, le second fait son apparition dans Sugata Sanshiro (La Légende du Grand Judo I, 1943) d’Akira KUROSAWA. Ce film, qui prend des libertés avec la réalité comme le roman de Tomita TSUNEO dont il est tiré, est centré sur la relation entre le créateur du judo KANO Jigoro (1860-1938) et son disciple SAIGO Shiro (1868-1922).
Vient ensuite un récapitulatif de l’histoire du cinéma d’arts martiaux en Chine, depuis ses débuts à Shanghaï, dans les années 1920. Après 1949 et l’arrivée au pouvoir de Mao, les films de kung-fu connaissent un renouveau à Hong Kong. Les plus belles oeuvres du genre sont produites dans les années 1960-1970 par la Shaw Brothers, puis par la Golden Harvest de Raymond CHOW, dissident de la précédente firme et à l’initiative du retour de Bruce LEE à Hong Kong en 1971.

Dans une deuxième partie consacrée à l'”Age d’or” du cinéma kung-fu à Hong Kong, l’auteur brosse le portrait de grands héros cantonais comme Fang SHIYU et Hong XIGUAN. Leurs exploits réels ou imaginaires sont liés à la geste des moines de Shaolin, défenseurs de la dynastie déchue des Ming face aux envahisseurs mandchous Qing (1644-1912). Ils sont de multiples fois portés à l’écran des années 1920 aux années 1980. Idem pour Huang FEIi-hONG, fameux adepte de la médecine traditionnelle chinoise et pugiliste patriote de la fin du XIXe siècle, un rôle d’une vie pour l’acteur Kwan TAK-HING. La légende du “docteur Wong” est revivifiée grâce à la série des Il était une fois en Chine (1991) de Tsui HARK, avec Jet LI dans le rôle principal.

Ce patrimoine de traditions martiales a servi de matière aux deux cinéastes vedettes de la Shaw Brothers. Ainsi Chang CHEH, lettré accompli, mais sorte de Sam Peckinpah hongkongais, détonne en mêlant l’épique hérité de la Chine médiévale à des scènes d’action hyper-violentes. C’est dans son sillage que le jeune John WOO débute dans la profession. De même, Liu CHIA-lIANG se fait connaître en réglant les combats de ses films. Défenseur des valeurs ancestrales du kung-fu, il passe à la réalisation, soucieux d’un scrupuleux réalisme dans la représentation des affrontements, au sol, et des techniques de poing des écoles du sud de la Chine. Néanmoins, ses choix esthétiques passent de mode suite à la décision de Tsui HARK de recourir aux chorégraphies aériennes de l’Opéra nordique de Pékin dans les Il était une fois… Chang Cheh s’est montré aussi un véritable dénicheur de talents, découvreur des acteurs Lo LIEH, Ti LUNG, David CHIANG, Chen KUAN-TAI, Fu SHENG et Wang YU, le “mauvais garçon” du cinéma de Hong Kong, fauché en pleine gloire par l’irruption du météore Bruce LEE. Mais Angela MAO, tête d’affiche féminine de la Golden Harvest, ou le facétieux Jackie CHAN ne sont pas oubliés. Bref, on croise une belle galerie de stars asiatiques, prédécesseurs des Chow YUN-fAT, Michelle YEOH, Jet LIou Yuen WOO-PING, chorégraphe remarqué des scènes d’action de Matrix, qui font désormais briller leur cinéma musclé sous les cieux d’Hollywood.

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