Tôshô Daimos (1978)
De gauche droite : Nana, Kyoshiro, Cairo, Dr. Izumi, Erika et enfin Kazuya
Parmi la liste des anime n'ayant fait qu'un passage clair en France, Daimos fait partie des séries n'avoir eu droit qu' quelques éditions sporadiques (sans parler du bidouillage américain Starforce/Starbird). Edité tout d'abord par DIA en 1982 aux côtés des Cygnes sauvages et des Aventures de Panda, Daimos a même eu l'honneur d'une petite page dans le magazine de prépublication Spirou la même année l'occasion d'un concours : une décision stupéfiante connaissant le peu d'intérêt du journal pour le Japon et surtout l'animation japonaise. Après deux VHS comprenant les épisodes 1 7 réunis sous forme de film avec un doublage français potable (les noms japonais ont même été conservés), les éditions se sont succédé entre Cartoon Junior, Scherzo et Fil Film avant de disparaître dans l'indifférence générale. Sans doute sa ressemblance avec Goldorak n'a-t-elle pas favoris sa réputation chez nous et encore moins une diffusion TV qui aurait pu faire connaître la série au grand public.
Bref, il est temps de réparer cette injustice et de revenir sur une série de robots gants qui sans être un chef-d’œuvre n'en reste pas moins assez tonnante. Daimos fait partie d'une trilogie un peu particulière mêlant robots gants et relations amoureuses (d'où leur surnom de Romance Robo Trilogy). La série est réalise par Tadao Nagahama, surtout connu chez nous pour avoir réalisé la première partie de Lady Oscar, mais il a également été réalisateur sur des classiques comme Kyojin no Hoshi ou les deux autres séries de la trilogie en question : Chōdenji robo Combattler V et Chōdenji Mashīn Vultus 5. Pour ce paragraphe, je me réfère à mes Animage de l'époque mais également la superbe fiche PJ d'Arachnée qui m'a d'ailleurs donné envie de m'intéresser de près à Daimos : http://www.planete-jeunesse.com/fiche-1909-daimos.html 😉
Daimos, go !
L'histoire pourrait se définir comme un mix entre Goldorak pour le robot géant et la lutte contre des envahisseurs extraterrestres et Romo et Juliette pour l'histoire d'amour entre les deux protagonistes. Kazuya Ryzaki est un jeune homme chargé d'empêcher les Bahamiens – des extraterrestres semblables à des anges qui ont dû fuir leur planète menacée d'explosion – en pilotant le robot gant Daimos, conçu par son défunt scientifique de père. Le prof. Ryzaki avait au départ tenté de fraterniser avec le roi des Bahamiens plutôt que d'entrer en guerre, hélas un inconnu provoque la mort du roi bahamien et en représailles, le père de Kazuya finit assassin par Richter, le propre fils du roi. Richter est bien moins pacifique que son père : persuadé que les humains sont mauvais, il leur déclare la guerre et projette la destruction des Terriens depuis un satellite artificiel créé autour de Jupiter pour accueillir les survivants de l’explosion. C'est ainsi que Kazuya entre en action et s'oppose aux premiers assauts des robots bahamiens (assez similaires aux Golgoths). Après un combat, il sauve la vie d'Erika, une jeune fille amnésique dont il tombe amoureux au premier regard. Hélas, il ignore qu'Erika est la sœur de Richter ! De plus, elle semble être mêlée la mort du père de Kazuya. Lorsqu'Erika retrouve la mémoire et découvre l'identité de Kazuya, elle décide de rejoindre son peuple et d'oublier le jeune homme. Kazuya se retrouve alors pris entre deux feux : protéger la Terre des Bahamiens tout en sachant qu'il combat le peuple auquel appartient sa fiance.
Cette série est particulièrement peuple, donc un petit topo sur certains personnages ne serait pas de trop :
Kazuya Ryzaki : notre jeune héros ! Fils du scientifique ayant construit Daimos, il est le seul pouvoir contrôler le robot grâce ses compétences en karaté : lorsqu'il pratique un mouvement, le robot fait de même. Il n'a absolument aucune envie de combattre (le principe du héros malgré lui) et tente plusieurs reprises d'y renoncer ou de s'opposer aux actions militaristes du commandant Miwa. Mais sa volonté de protéger la Terre et les siens finit toujours par le ramener au combat (un peu comme Actarus). Son caractère ''sanguin'' et obstiné s’oppose celui de sa fiance Erika, beaucoup plus douce et réservée.
Erika : fille du roi bahamien et sœur de Richter, elle perd la mémoire au début de la série avant de rencontrer Kazuya et de vivre un temps avec lui. Durant la première moiti de la série, elle est régulièrement ''récupérée'' par les hommes de Balbas ou laisse pour morte (au grand désespoir de Kazuya). Dans les premiers épisodes, elle paraît assez gourde vis–vis des situations dangereuses, mais la suite montrera une Erika plus entreprenante puisqu'elle prendra en charge le sort de plusieurs réfugiés bahamiens sur Terre.
Richter : le frère d’Erika et le principal adversaire de Kazuya. Depuis la mort de son père, c’est désormais lui qui commande les Bahamiens. Il déteste les humains et particulièrement Kazuya bien entendu. Durant la deuxième moiti de la série, il sera présent sous un aspect plus ambigu et finira par devenir un héros la fin de l’histoire (je n’en dirai pas plus ^^).
Kyoshiro Yzuki : le meilleur ami de Kazuya, il s’oppose totalement au jeune homme par son flegme et son humour un peu pince-sans-rire. Alors que Kazuya est un adepte du karaté et de la baston mains nues, lui manie le katana la perfection. Sous des dehors paisibles, Kyoshiro peut cependant se montrer tout aussi redoutable et violent avec son adversaire. Dans un épisode, on découvre qu’il n’a pas eu une enfance facile, ce qui expliquerait peut-être son caractère.
Nana Izumi : la petite-fille du professeur Izumi, cette (très) jeune adolescente est un peu l’élément comique et joyeux de la série (avec la cuisinière Okane et le robot Cairo). Elle a un caractère assez revêche, mais adore Kazuya qu'elle considère comme son grand-frère.
Le prof. Izumi : ancien ami et collègue du père de Kazuya, il a repris le projet Daimos et est désormais le mentor de Kazuya. Il dirige le centre de recherche Daimobic où vivent Kazuya et ses amis.
Commandant Miwa : il dirige l’arme terrienne contre les Bahamiens. Sans aucune nuance de psychologie et de tolérance, il considère les Bahamiens comme des envahisseurs exterminer jusqu’au dernier. Il ne supporte plus Kazuya avec le temps cause de sa relation avec Erika et devient aussi de plus en plus brutal, n’hésitant pas jeter le jeune homme en prison ou torturer Erika pour qu’elle livre des informations sur les projets de son peuple.
Balbas : un peu comme Hydargos dans Goldorak, c’est lui qui intervient la plupart du temps contre Kazuya en envoyant des robots bahamiens ou est chargé de retrouver Erika. Cet homme très laid et brutal se montrera finalement sous un autre jour dans un pisode.
Gnralissime Olban : responsable de la mort du roi bahamien, il prend un rôle de plus en plus important dans la série après le repli de Richter sur la Terre et tentera même de s'approprier Erika et d'en faire sa reine. Le dernier adversaire acharné de Kazuya et aussi le principal fragiliser leur amour, puisqu'Erika décide finalement de le suivre pour sauver les réfugiés bahamiens.
Le premier épisode ne se détache pas beaucoup des productions de l’époque. Le scénario est typique des séries animes de robots gants depuis Mazinger Z et certains éléments rappellent beaucoup Goldorak : les robots envoyés contre Kazuya, le conflit extraterrestres/Terriens, le jeune héros qui pilote un robot gant mais qui ne veut pas combattre, etc. Cette série ne puise pas son intérêt dans son script de base ni dans ses combats, mais bien dans le développement des personnages. Tout d’abord, l’histoire d’amour entre Kazuya et Erika n’a rien d’une petite intrigue l’eau de rose sans relief. Elle sert vraiment le scénario jusqu’au dernier épisode et surtout, elle ne reste pas fig dans un même schéma. Certes leurs sentiments n’évoluent pas vraiment puisqu’ils sont définitifs ds leur rencontre, mais leurs situations opposes les empêchent de s’aimer comme ils l’aimeraient. Erika est considère par ses semblables comme une traîtresse et Kazuya comme un espion allié aux Bahamiens. L’opposition devient si forte dans les derniers épisodes que le jeune homme finit même par être condamné pour trahison par les dirigeants politiques et envoyés dans une cellule un temps. De plus, si Kazuya est convaincu durant la majorité de l’histoire des sentiments d’Erika son gardé, celle-ci préfère oublier son bien-aimé la fois pour le protéger mais aussi pour protéger son entourage (sa nourrice Margarete par exemple avec qui elle est très proche) et ne sait plus quoi choisir entre sa fidélité envers son frère et son amour pour Kazuya. Enfin, l’un des derniers épisodes amorce un rebondissement qui aura un impact important tant sur l’histoire et les personnages.
Outre Kazuya et Erika, le scénario a la bonne ide de se focaliser sur d’autres personnages, parfois même secondaires, et de dévoiler un peu de leur passé. Il sait aussi se renouveler assez régulièrement, amenant dans l’histoire de nouveaux personnages qui apportent un peu de fraîcheur (Genta, le neveu de la cuisinière, un sosie d’Erika, une ancienne petite-amie de Kyoshiro…). Si au départ les adversaires du héros paraissent bien manichéens, il n’en est presque rien par la suite. Certes des deux côtés on trouve encore des ''méchants'' qui ne pensent qu’ la victoire et vaincre le camp opposé, en particulier le généralissime bahamien Olban et le commandant Miwa. Tous deux partagent comme point commun leur volonté insensible de détruire leurs adversaires sans distinction et de ne pas faire confiance ceux tentant en vain de les raisonner et parvenir un accord de paix entre les deux peuples. Peut-être faut-il y voir une critique d’officiers enfermés dans leurs préjugés et prêts au sacrifice au mépris de la vie de leurs hommes ?
Néanmoins, parmi les autres protagonistes, beaucoup échappent ce schéma et démontrent peu peu un caractère très différent de ce qu’ils laissent entrevoir dans les premiers épisodes. De plus, leur rôle évolue au fil de l’histoire : Richter par exemple doit fuir sur Terre avec la scientifique Raiza (secrètement amoureuse de lui) et quelques soldats restés fidèles et c’est le fourbe Olban qui prend le pouvoir, ce qui a le mérite de relancer l’intrigue dans une toute autre direction. Plus l'histoire avance et plus les Terriens se rendent finalement compte que les Bahamiens n'ont rien d'envahisseurs pour la plupart et qu'il faudrait enfin mettre un terme cette guerre absurde (on verra dans les derniers épisodes des manifestations entre Terriens et Bahamiens pour la paix). Enfin, Erika – après avoir passé plusieurs épisodes être enlevée puis considérée comme morte – se retrouve confronte Kazuya. Je n’en dirai cependant pas davantage la concernant, au risque de gâcher le plaisir des derniers épisodes.
Sous des aspects classiques, Daimos est suffisamment attractif et rempli de rebondissements durant ses 44 épisodes. La série met en place des thématiques assez adultes sans les traiter superficiellement ni même les édulcorer. Les épisodes se finissent régulièrement sur une note amère (Kazuya a vaincu le méchant de la semaine, mais le conflit est loin d'être résolu) et certaines scènes sont loin d'être anodines, en particulier lorsque des civils ou des enfants sont touchés par le conflit. A la fois passionnante et très travaille au niveau de la psychologie des personnages, la série propose de bons moments riches en motion et un final très réussi. Dans le domaine des séries de robots gants, elle s’impose comme une œuvre bien plus complexe que ce qu’elle laissait entrevoir au début.
Ne vous fiez pas cette scène, le drame n'est jamais loin
La réalisation technique n’est pas particulièrement originale, mais l’animation est mon goût un poil meilleur que celle de Goldorak durant les combats (trois ans séparant les deux séries). Je suis tombe sous le charme des musiques de la série, que l’on doit au grand Shinsuke Kikuchi tout de même !
Si cette critique vous a donné quelque peu l’envie de découvrir cette série très sympathique, il faudra hélas vous tourner vers un très beau coffret japonais pas donné au niveau du prix qui traîne encore sur CD Japan ou Amazon. L’intégral est apparemment sorti en Italie, mais sans la VO (espérons une réédition deluxe un de ces jours); c’est bien dommage sachant la qualité de cette version japonaise avec un Akira Kamiya (ça s’entend d’ailleurs !) impeccable sur Kazuya.