Les 1001 Nuits (1969)
J’avais acheté le coffret “1001 Nuits + Cleopatra” à 30 euros, moins ruineux que le seul “Belladonna” à 50 euros (!!!) que j’ai zappé, ma curiosité pour l’ère psychédélique n’allant pas jusque là.
En fait ces deux premiers titres de Mushi Production furent regroupés au Japon sous le titre “Animerama”. Je viens de visionner le premier disque “Les 1001 Nuits” et aussi le bonus de près d’une heure, une passionnante interview d’Eiichi Yamamoto, réalisateur plus ou moins supervisé par Osamu Tezuka, et on reçoit un bon éclairage sur les conditions de travail auprès du maître dans les années pionnières 1960.
Le film a tout le cachet de ces années étranges, même si ça pique les yeux ô combien !
On y retrouve un certain nombre des épisodes célèbres du recueil de contes, tel l’Oiseau Roc, la Caverne des 40 voleurs, etc., mais oubliez Shéhérazade, au total il s’agit de suivre un vagabond qui au début sort du désert en souriant et découvre la grande Bagdad. Ce gaillard, Aldin (= Aladin), chaud lapin parfaitement amoral (mais chanceux) vivra maintes aventures, jusqu’à revenir richissime sous le nom du marchand Sinbad, puis calife de Bagdad, avant de retourner toujours aussi insouciant et irresponsable dans le désert d’où il sortit. L’idée est assez bonne narrativement, mais le personnage central n’attire guère la sympathie. La vois japonaise est rocailleuse et se veut vulgaire, le mec ne vise que son intérêt et devient même plutôt répugnant sur la fin. En effet, Yamamoto et Tezuka souhaitaient un héros “n’ayant aucune limite”, inspiré par Jean-Paul Belmondo dans “A bout de Souffle”, énorme succès de 1960 au Japon. Le visage d’Aldin est même une approche de celui de Belmondo.
De plus Tezuka avait la volonté clairement affirmée d’arriver au niveau international de Walt Disney, et se disait que le seul créneau qu’il laissait disponible était le film animé nettement pour adultes, anti-familial et érotique. De fait, le meilleur moment du film est celui de l’Ile des Femmes, illustré par une séquence visuelle tout à fait remarquable, où les lignes souples sur fond rose atteignent au surréalisme érotisé d’un Hans Bellmer !
Pour autant, le film a aussi des personnages “féministes”, ainsi la jeune archère et amazone aux cheveux frisés d’une part, et d’autre part le lutin femelle à métamorphoses affriolantes…
C’est un film typique de l’époque “contestataire”, avec personnage central sans foi ni loi, sans noblesse ni charme, simple trublion dans un monde normaté. Bien des choses se sont peut-être inversées depuis !