Voilà un film d'animation britannique jamais sorti en France malgré de grandes qualités. Probablement le thème très ''Guerre Froide'' et l'ambiance anglaise du récit suivi de la méconnaissance de l'oeuvre d'origine a-t-il fait fuir plus d'un éditeur de l'Hexagone.
Note: J'ai décidé de poster ici justement parce qu'il ne me semble pas que ce film ait été mentionné par un quelconque magazine francophone sur l'animation… J'hésitais avec le sujet ''Les Anime Occidentaux'', mais j'ai finalement opté pour ce topic.
Voici donc mon avis sur ce film vu il y a quelques mois déjà :
When the wind blows
Réalisateur : Jimmy T. Murakami (''Le bonhomme de neige'')
Date de réalisation : 1986
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''When the wind blows'' est à l'origine un roman graphique écrit par Raymond Brigg en 1982. Il nous conte la vie d'un couple de retraités – Jim et Hilga Bloggs – vivant tranquillement dans la campagne du Surrey en Angleterre. Mais la menace d'une attaque atomique plane sur la région. Ayant pris leurs précautions après de longues hésitations, les Bloggs deviennent les seuls survivants après que l'Union Soviétique ait lancé un missile atomique sur le pays. Sans nouvelle de leurs proches probablements morts, Jim et Helga doivent alors apprendre à ne compter que par eux-même et attendre dans leur abri que les choses reviennent à la norme sans se rendre compte qu'ils devront dans les heures à venir lutter contre une autre menace : les conséquences de cette attaque atomique…
Le film d'animation adapte apparemment très fidèlement le roman graphique d'origine. Ne l'ayant pas (encore) lu, je ne peux me prononcer là-dessus, mais le sujet est exactement le même. Au départ, nous suivons le quotidien tranquille du couple au rythme du ''Five o'clock tea'' et autres gâteaux typiquement anglais pendant que Jim s'informe sur la situation politique internationale. Tout semble aller pour le mieux et pourtant les relations tendues entre les Grands de ce monde vont bouleverser leur existence.
Prévoyant, contrairement à sa femme qui trouve ses angoisses exagérées, Jim décide de construire avec les moyens du bord un abri anti-atomique pour se protéger de l'explosion. Le film débute dans une ambiance calme et sereine où l'on voit Jim et Helga se préparer à affronter le pire… du moins comme ils l'envisagent. Mais la Catastrophe va mettre un terme à ce caractère gentillet du film. Alors que les Bloggs se terrent dans leur abri après l'annonce à la radio locale du lancement d'un missile, la région toute entière est dévastée dans une ambiance à la fois tourmentée et pesante mais bizarrement aussi très poétique. Une scène tragique où le titre trouve tout son sens : ''When the wind blows'' (Quand le vent souffle).
Alors que les Bloggs se trouvent toujours à l'abri, le ''vent'' envahit leur demeure, détruisant tout sur son passage et brisant leur photo de mariage – symbole de tous leurs souvenirs de jeunesse – comme si ce vent emportait également leur passé et leur existence. Une scène magnifiquement mise en scène où l'excellente musique composée par Roger Waters (Le thème du film est lui chanté par David Bowie) sublime davantage cet instant. Peu après, les Bloggs – sortis de leur abri – se retrouvent sous le choc devant leur cuisine dévastée. Désormais, seule compte l'attente insoutenable que les Bloggs essayent de supporter en s'aidant mutuellement jusqu'à la conclusion du film dont je ne révélerai rien.
Qui a dit que le dessin-animé occidental n'est destiné qu'aux enfants ? Ce film en est la preuve contraire. Bien que de nombreux enfants l'aient vu à l'époque, le thème sombre du film ne leur est pas de prime abord destiné. Même si la violence est évitée, la triste réalité des choses n'est aucunement édulcorée (Le langage employé par les protagonistes peut se montrer par ailleurs particulièrement cru). Les conséquences de l'attaque ne nous sont absolument pas cachées et ce même si la réalité politique reste floue. C'est à peine si nous saurons que le responsable de l'attaque est l'Union Soviétique.
Réalisé vers la fin de la guerre froide, ce film exprime encore l'angoisse des pays capitalistes face à la menace atomique de l'URSS. Si le thème a donc quelque peu vieilli, nul besoin cependant de trouver la situation des Bloggs dépassée. Au fond, leur quotidien aurait très bien pu aussi se terminer ainsi suite à l'explosion d'une centrale nucléaire… Le film peut donc parfaitement être apprécié de par son âge car ici l'important n'est pas le responsable dans toute cette histoire mais bien la survie du couple Bloggs.
Bien que pouvant nous paraître naïfs et quelque peu idéalistes, Jim et Helga parvienennt à nous émouvoir de par leur vision optimiste de la situation, persuadés que ce n'est qu'une question de temps et qu'ils vont s'en sortir. Ils nous racontent leurs souvenirs, nous dévoilent leur passé, leur relation qui semble-t-il ne s'est pas fragilisée avec le temps; en effet, il leur faudra beaucoup de courage et de soutien mutuel pour supporter cette longue attente jusqu'à la fin du film.
Le graphisme paraît simple et enfantin par son côté ''rondouillard'', mais ne nuit absolument pas au film. Quant à la réalisation, elle garde un certain charme pour son époque de part ses scènes purement poétiques ou contemplatives et le décor très réaliste avec des objets réels animés grâce à la technique du stop-motion. Autant le dire de suite : les meubles et autres ustensiles sont criants de réalisme. Quant à la bande-son, les musiques de Roger Waters et le générique chanté par David Bowie rendent honneur au film. Genesis, Squeeze et Paul Hardcastle ont également participé à la composition musicale. La bande-son comporte d'ailleurs pas mal de musiques très ''rock''.
L'humour n'est pas du tout absent du film contrairement à ce que l'on peut attendre et peut s'avérer même très drôle, notamment au début du film car il ne s'agit pas forcément d'humour noir. L'ambiance poétique aide également à supporter le thème sombre et tourmenté du film notamment dans des scènes de campagne ou dans la Nature pendant que les Bloggs essayent d'oublier les menaces qui pèsent sur leur existence.
En conclusion, voilà un film qui sait captiver le spectateur malgré son thème désespéré et tragique en apportant beaucoup de suspence, d'émotion (alors là autant le dire, l'émotion n'est pas ce qui manque dans ce film), mais aussi d'humour et de poésie. Une excellente histoire sur le thème de l'attaque atomique et la survie ''après la bombe'' version années 80 qui n'a pratiquement pas pris une ride. Il est tout de même dommage que le film soit uniquement sorti aux Etats-Unis, au Royaume-Uni et en Allemagne (et apparemment au Japon). Si vous parlez bien l'anglais, vous pouvez vous le procurer facilement, le film ayant été réédité en 2010 sur DVD.