Devilman Crybaby
Réalisation: Masaaki Yuasa
En fait, je ne l’ai pas vraiment vu aujourd’hui, j’ai terminé le visionnage de cette série il y a trois semaines, mais il est temps que j’en parle !
Cette série télévisée réalisée par le talentueux Masaaki Yuasa adapte donc le chef d’oeuvre de Go Nagai, et, pour la toute première fois, le manga est adapté dans son intégralité !
En effet, la série TV de 1973 n’avait pratiquement aucun rapport avec l’oeuvre d’origine, quant aux superbes OAVs de 1987 et 1990 de Umanosuke Lida, elles n’ont adapté que les deux premiers tomes.
Alors mon bilan ? J’ai beaucoup aimé. 🙂
Le character design est de prime abord déconcertant, tant il est éloigné du trait de Nagai, toutefois, on s’y fait rapidement, tant celui ci est expressif et “vivant”.
Le premier épisode m’avait toutefois fait un peu peur: l’animation était minimaliste, et les décors trop dépouillés. De plus, le passage, capital, du manga et des OAVs où Ryo Asuka explique à Akira Fudô l’existence des démons a été trop expédié à mon goût.
Pour ma part, ça allait, mais je me demande si ce moment clé de l’histoire n’a pas été trop nébuleux pour les néophytes n’ayant pas lu le manga ou vu les OAVs.
Heureusement, le niveau s’améliore considérablement à partir du deuxième épisode.
Akira Fudô, à l’instar du manga, gagne en assurance et en charisme, le rythme narratif (à de rares exceptions près)est plus équilibré et n’est ni trop mou, ni trop précipité, et on retrouve l’ambiance sombre, horrifique et crépusculaire de l’oeuvre majeure de Go Nagai.
On y retrouve d’autres personnages majeurs comme Miki le grand amour de Akira, bien qu’elle ait un caractère un peu différent: elle est moins “combattive”, mais elle n’est absolument pas nunuche, préférant opter pour le sens du dialogue.
Elle est aussi d’une très grande beauté, et, fait original, est métis: sa mère est Japonaise et son père est un occidental. Elle a aussi de magnifiques yeux verts. Ce qui est mit en avant chez elle, c’est son caractère sensible, bienveillant, compréhensif et compatissant.
Ce que j’ai bien aimé dans l’animé, c’est qu’il développe certains personnages: par exemple la jeune Miko, personnage intéressant mais sous exploité dans le manga (elle fait partie des Devilmen recrutée par notre héros pour combattre Satan et son armée) est ici beaucoup plus importante et est la rivale de Miki.
Elle évolue beaucoup au fil de l’histoire, et, si au début, elle éprouve du ressentiment et de la rancoeur envers Miki (qui l’a involontairement éclipsé auprès de ses camarades de classe en raison de ses aptitudes exceptionnelles d’athlète), petit à petit, ses rapports avec elle change, et on sent qu’elle éprouve un grand respect envers elle.
Akira Fudô demeure un héros fascinant, et, il a des pulsions bestiales et éprouve une joie délectable à décimer les démons qui menacent les humains, à plusieurs reprises, son humanité refait surface et son but est avant tout de protéger ses pairs et ses proches ainsi que les êtres qui lui sont chers. Il sait éprouver de l’empathie envers autrui et être à l’écoute de son prochain.
On retrouve dans cette adaptation animée l’idéologie forte de Go Nagai lorsqu’il dénonce les crimes et les instincts les plus vils de l’humanité tels que le racisme, la guerre, le mépris et le crainte de ce qui est différent, ce qui rejoint l’expression célèbre de Hobbes: “l’homme est un loup pour l’homme”. De plus, tout comme le manga, l’animé n’est pas du tout manichéen et on en vient légitimement à se demander qui sont les plus fous et les plus monstrueux: les humains ou les démons ?
L’histoire est également replacé dans une contexte contemporain résolument plus moderne, on y montre l’ampleur des médias tels que la télévision, Internet et les réseaux sociaux et leurs répercussions sur les gens.
Il y a aussi quelques passages spécifiques et inédits à l’animé qui sont extrêmement poignants:
Spoiler
Par exemple, le père de Miki retrouve son épouse et son fils cadet Tarô dans un camp et il découvre avec horreur que celui ci a été possédé par un démon. Pire encore, celui ci s’est laissé consumer par sa faim insatiable et irrépressible et dévore sa mère, à son plus grand désespoir. Le père devient fou et ne sait plus que faire: il veut anéantir ce monstre qui a tué sa femme, mais il sait que c’est son propre fils et ne veut pas le tuer. Quant à Tarô, il est conscient de l’acte atroce qu’il a commis et verse une larme de désespoir. Tout se terminera hélas dans un bain de sang, Devilman arrivant trop tard pour les sauver. Je trouve la mort de Tarô encore plus horrible que dans le manga où il était décapité par les pillards !
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Miki quant à elle est une fille admirable:
Spoiler
elle découvre que son ami d’enfance Akira est un jeune homme ayant un corps de démon, mais, au lieu de se laisser aller à des préjugés, elle sait pertinemment qu’en son for intérieur, il est resté fidèle à lui même: un garçon gentil, doux et pensant davantage aux autres qu’à lui même. Elle a su lire dans son coeur et dans son âme. Et, bien que la destinée tragique de Miki soit inéluctable, on s’est tellement attaché à elle au fil de l’animé qu’on en vient à espérer qu’elle puisse s’en sortir, même si nous savons hélas que cela n’arrivera pas (surtout quant on a lu le manga au préalable).
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Ce qui est terrible aussi, c’est qu’un des personnages principaux exprime un message pacifiste et chaleureux sur les réseaux sociaux et cause l’effet inverse, cela stigmatise la haine et la rage des personnes les plus violentes.
Cela nous renvoie aux heures les plus noires de l’histoire de l’humanité quant des bienfaiteurs de l’humanité et des pacifistes tels que Gandhi et Martin Luther King furent brutalement assassinés.
En ce qui concerne l’animation, elle est inégale, tantôt moyenne, tantôt très très bonne.
J’aime particulièrement la gestuelle des Devilmen quand ils courent, très bestiale et animale.
Fait intéressant, le combat opposant Devilman à Satan est beaucoup plus développé (alors qu’il était suggéré dans le manga) donnant lieu à une confrontation épique d’anthologie.
Soyons clair, cette série TV ne surpasse pas le manga, ni les OAVs (la meilleure adaptation animée à mon humble avis).
Elle n’en demeure pas moins excellente, intelligente, très sombre, fort émouvante et empreint d’une certaine poésie. Elle aurait juste mérité d’avoir deux épisodes supplémentaires pour étoffer certaines thématiques et développer quelques personnages…
Néanmoins, elle vaut vraiment le coup.
Cependant, attention aux âmes sensibles, elle est extrêmement violente et il y a beaucoup de sexe, même si ces éléments n’ont globalement rien de gratuit et servent le propos de l’oeuvre.
Je conseille fortement Devilman Crybaby ! 😀