Aaaaaah, ça fait plaisir de lire un retour positif !! 😀
Je suis retournée voir Dark Phoenix mardi, et je l’ai encore plus aimé la 2e fois. Il faut dire que j’ai réussi à choper une séance en VO (chose fort rare ici hélas), et même si je ne nie pas le talent des comédiens de doublage français, c’est autre chose d’entendre le vrai jeu de Sophie Turner et de ses comparses !
D’autre part, j’y suis retournée en ayant lu entre temps ces déclarations de Tye Sheridan. Tout à coup, ma lecture du film s’est nettement enrichie, voire éclairée.
Je te rejoins aussi Akiko sur le fait que les méchants soient hélas très fades, et je n’ai pas été très convaincu par leur chef
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Ainsi donc, les ennemis prévus à la base étaient… des Skrulls !!! Ceci explique bien des choses. D’abord, la date (les années 90) identique avec
Captain Marvel. La volonté d’invasion de ces êtres métamorphes apparaît bien plus claire, contrairement aux Skrulls de
Cap Marvel qui s’avèraient être de gentils réfugiés. Vuk/Jessica Chastain a vu le potentiel destructeur de l’énergie brute que le Phénix aspire. Pas étonnant qu’elle veuille se l’approprier, maintenant qu’elle sait que l’énergie en question a été “scellée” dans une personne de chair et d’os manipulable !
L’infiltration des Skrulls dans les plus hautes sphères de l’humanité (l’ONU) explique aussi cette scène étrange où Charles Xavier, obligé de couper court à un gala, se retrouve raccompagné par des types en costard dont on sait que l’un d’eux est clairement un métamorphe. Dans le montage tel qu’il est à l’heure actuelle, on flippe un peu de le voir ainsi entouré, mais cette scène est classée “sans suite”. Quand on sait que l’ONU est infiltré, elle prend un tout autre sens : les Skrulls sont partout, même parfois au plus proche de Charlie X, et il ne s’est même pas aperçu de la menace. La scène où il appelle le président en vain prend une dimension supplémentaire : le président a-t-il réellement coupé les ponts avec les X-Men du jour au lendemain ? (ce qui démontrerait la fragilité/l’hypocrisie du rapport humains/mutants ?) Ou subit-il l’influence néfaste de conseillers Skrulls qui chercheraient à isoler et affaiblir les X-Men ? Pire : ne serait-il pas arrivé une bricole au président ? Ce qui force par la suite les X-Men à se rendre à l’ONU ?
Cela explique enfin la scène finale où, malgré tout le raffut créé par Jean, le gouvernement ne ferme pas l’école de Westchester. Peut-être que la “retraite” de Charles a aidé à rétablir de bons rapports. Mais surtout, si le gouvernement sait que Jean et les X-Men ont sauvé l’humanité d’une invasion extraterrestre, on comprend beaucoup mieux qu’ils décident de leur ficher la paix sur ce coup là.
Je note au passage qu’avec ce scénario, on se retrouve en effet avec de grosses similitudes entre les personnages de Carol Danvers et de Jean Grey :
– Elles ramassent une explosion d’énergie dans la gueule et l’absorbent, d’où un pouvoir quasi illimité
– Les souvenirs des deux sont manipulés
– On cherche à s’approprier leur pouvoir : Vers pour Carol, les Skrulls pour Jean. Et un peu Charles Xavier.
– On les saoule avec leurs émotions (mais ça, c’est un truc avec lequel on saoule toutes les femmes de manière générale). Jude Law gave Carol jusqu’à ce qu’elle lui dise “merde” et lui envoie un taquet dans la gueule. Jessica Chastain fait la morale jusqu’à la fin à Jean, laquelle la pulvérise en répliquant que ses émotions la rendent plus forte (et bim lâche-moi les baskets).
– Elles finissent toutes deux plus ou moins dans l’espace, comme des gardiennes supérieures. Parce qu’elles sont surpuissantes, et pas (tout à fait) de ce monde !
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Avec l’explication de Tye Sheridan, le scénario retrouve son unité. Pour autant, est-ce que je regrette la direction finalement prise par Simon Kinberg ?
Oui et non. Oui, parce que les méchants auraient eu un autre panache, l’action des X-Men une autre échelle, le récit aurait été beaucoup mieux ficelé et le film probablement grandiose.
Non, parce que sacrifier la moitié spectaculaire de l’histoire l’a obligé à se recentrer sur les personnages, en particulier sur la psychologie de Jean et sur la thématique de la famille. Or, c’est cet esprit de famille qu’on aime chez les X-Men, leur solidarité, la profondeur qui les rend si attachants et mémorables.
J’espère que nous aurons la chance de voir quelques scènes de “l’autre film” dans les bonus du BR. Le top du top, ce serait un film de 4h, avec à la fois la partie psychologique et la partie spectaculaire ! 😆
Xavier est certes un homme qui a toujours aspiré à un avenir meilleur afin que humains et mutant co-existent en parfaite harmonie…
Néanmoins, il n’a pas toujours été franc envers ses élèves et leur a menti plusieurs fois pour parvenir à ses fins.
Et là, il en est de même dans ce film. Même si ce qu’il a fait à Jean partait d’une bonne intention (l’élever afin qu’elle soit heureuse, s’épanouisse et ne souffre pas), les techniques auxquelles il a recours pour le faire telles que ses manipulations et ses mensonges sont moralement très discutables. Ne perdons pas de vue qu’il a fait prendre des risques inconsidérés à l’équipe et qu’il a sciemment reconnu qu’il était prêt à les sacrifier pour sa cause et redorer le blason de l’image des mutants… Pourtant, on ne peut nier que, par la suite, il a tout tenté pour éviter le pire et a vraiment voulu renouer avec le dialogue et essayé de raisonner Jean.
McAvoy parlait dans une interview de son personnage et de son “complexe de Dieu”. J’avoue que j’aime beaucoup Charles Xavier, aussi j’ai trouvé sa lecture un peu dure, tout comme Dark Phoenix en général avec lui… Dans le sens où il a toujours essayé de faire au mieux, et qu’il a finalement offert à Jean une enfance “normale” et équilibrée.
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Et quand l’édifice s’est écroulé, Jean a tué des gens et a fini sacrifiée. Ça lui a pas hyper réussi. 😆
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Cependant, ses propos m’ont fait réfléchir.
Ce que je trouve fort intéressant avec ce perso, c’est que son pouvoir est très lié à sa personnalité. Ce n’est pas comme Raven/Mystique, par exemple : elle est métamorphe certes, mais psychologiquement parlant, elle n’est pas changeante. Elle suit ses convictions et elle est loyale. Idem pour Tornade, qui n’a pas une personnalité emportée qui balaierait tout sur son passage. Leur caractère n’a rien à voir avec leurs capacités.
Pour Charlie X, c’est tout à fait différent. Comme il l’avoue dans Days of Future Past, il a tenté de contrôler Raven dès l’enfance. On peut difficilement lui en vouloir : quel gosse ne tenterait pas de contrôler ses camarades ou ses frères et sœurs pour qu’ils jouent avec lui, par exemple ? Il s’est construit avec ça. Ça fait partie de lui. Ce pouvoir de lire les esprits, de les manipuler, l’a placé dans une posture supérieure au commun. Par chance, c’est un homme bon, pacifiste, sincère dans sa démarche d’aider les autres… Mais c’est vrai : il organise son petit monde, il est roi en sa demeure et se pose en référent moral. D’un côté, toutes ces mains tendues vers des personnes qui en ont besoin, qui lui seront redevables par la suite, on peut le lire comme un complexe de Dieu.
Mais jusqu’où peut-on lui reprocher cet ascendant, vu à quel point il fait partie de son ADN ?
Je pense ici à Days of Future Past. Quand il vit reclus, paumé, qu’il n’a plus foi en rien et que tout lui file entre les doigts (il est quasi toxico, perte de contrôle ultime), il a par la même perdu tout son pouvoir de télépathe.
Quand il retrouve l’espoir, un idéal à servir, il reprend sa vie en main et ses capacités lui reviennent. Il commence à se réentourer et finira par former l’école dont il deviendra directeur. C’est dire si son pouvoir, sa personnalité et sa nature forment un tout. Tu ne peux pas rejeter l’un sans rejeter l’autre. Mais c’est vrai que dans ce film, justement, on sent que cela peut être dur à vivre pour ses proches. Avec Raven, il est sans cesse dans le registre du “tu dois”, “il faut que tu”, ce qui a le don d’énerver cette dernière. Il n’y a que lorsqu’il cesse enfin ce champ lexical pour adopter celui du “je crois en toi” qu’elle accepte de revenir vers lui…
Dans Dark Phoenix, Raven est encore sur le point de mettre les voiles ; c’est un bon indicateur. Charles sert ses idéaux de toute son énergie… Or, quand on sert un idéal, les dommages collatéraux sont regrettables, mais acceptables. Lui-même l’a intégré en sacrifiant ses jambes à sa cause.
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J’ai trouvé Hank très injuste lors de la scène dans la cuisine. Cependant avec le recul, je pense qu’il cherchait un mot d’excuse, de réconfort. Pas forcément que Charles change du tout au tout, mais juste qu’il accepte de reconnaître son erreur avec Jean, qu’il se place à une échelle humaine. Or, pendant l’enterrement de Raven, Charles n’a guère parlé de la personne ni de ses propres sentiments. Il a plutôt évoqué son sens du devoir, les X-Men, un discours qui visiblement a laissé Hank très amer… Alors qu’on se doute bien qu’au fond, Charles est très affecté par la mort de sa sœur. Il domine ses propres émotions et préfère voir plus haut. Il est bien différent d’un Magnéto qui pleure immédiatement et surréagit en mode “je vais la tuer” alors que dix minutes avant, il déclarait que tuer ne calmait pas sa douleur, donc qu’il ne tuait plus ! 😆
Charles prend une claque dans Dark Phoenix, mais la fin me paraît très intéressante. Il a reconnu avoir merdé, Jean a pu le comprendre et l’excuser. Même si ces événements l’ont poussé vers la retraite, son apport à la cause mutante est indéniable et son héritage toujours vivant à Westchester. Pour la première fois, c’est lui qui se retrouve face à une main tendue. La proposition d’Erik rééquilibre leur rapport. Il n’y a plus d’ascendant moral, d’aide non remboursée. Peut-être que Charles comprend qu’il s’est fourvoyé des années durant avec sa position supérieure. Il est descendu du trône de Dieu, mais il est désormais plus libre. Peut-être qu’être juste un homme est appréciable. Parce que pouvoir lire à travers les autres, tout en restant hors de leur portée, c’est une position très solitaire.
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J’éprouvais de l’empathie, de la compassion envers Jean, complètement désespérée et qui ne savait plus ou en était.
Comme j’en suis déjà à un post de 600 km, je vais aussi rebondir sur cette phrase, tant qu’à faire. 😆
Je trouve le parcours de Jean très intéressant :
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1) Elle perd ses parents. Sa mère est morte. Pas son père, mais elle l’ignore.
2) Elle se construit avec un père adoptif. (Xavier)
3) Déçue par son père adoptif, elle court retrouver son père biologique. Lequel l’a rejetée depuis 20 ans, en fait. Jean confirme sa vision d’élément destructeur : elle tue sa sœur adoptive.
4) Traumatisée, dégoutée par ses pères x2, elle court en dernier recours voir Magnéto. C’est là que tu vois la différence de “paternité” entre Charles et Erik. Le premier a accepté Jean de façon fort optimiste, mais quand il a mesuré son potentiel de dangerosité pour elle-même et pour ses autres élèves, il a trafiqué son esprit à son insu.
Erik met fort peu de temps à comprendre de quoi elle est faite. Il la rejette cash pour protéger les mutants de l’île et les droits qu’ils ont acquis.
5) Après avoir tenté toutes les figures paternelles disponibles, Jean seule tombe sur Jessica Chastain. Qui se comporte comme une mère, faut bien l’avouer. Prête à montrer la voie, à soulager sa fille de sa souffrance… Mais la vraie mère de Jean est morte et Jessica Chastain n’est qu’un leurre.
6) Après avoir rejeté ses deux padre adoptifs successivement (et leur avoir mis la misère), Jean finit par entendre les excuses de Charles et comprend où est sa vraie famille.
7) Elle s’affranchit de tous, décide de sauver les X-Men et l’humanité par la même, détruit la fausse figure maternelle qui tentait encore de la maintenir sous sa coupe. En paix avec elle-même, elle s’envole.
La phrase “Mes émotions me rendent plus forte” peut paraître téléphonée, mais elle ne l’est pas : Jessica Chastain pense réellement que pour épargner sa famille d’une explosion d’énergie, Jean ne va pas oser la détruire. Mais parce qu’elle a effectué tout ce parcours, exploré les possibilités, cerné, pardonné, Jean est au contraire prête à aller bien plus loin que la métamorphe ne l’imagine. Elle l’embarque ailleurs, dans l’espace, et la prend de cours en se sacrifiant.
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C’est beau ! 😀