Je crois que certaines personnes ne font toujours pas la différence entre le fansub et le téléchargement.
Le fansub est une activité légale dans la mesure où elle respecte le droit privé d’un utilisateur.
Exemple concret: Vous avez acheté un DVD de “La liste de Schindler” et vous en faites une copie de sauvegarde Divx que vous agrémentez d’une piste de sous-titres en kikoulol pour ne pas vous retrouver en larmes à chaque fois que vous regardez le film. Soit. Le dvd est à vous, vous n’en faites qu’une copie de sauvegarde, le sous-titre reste chez vous, vous en profitez en catimini, c’est votre vie privée.
Mais malheureusement, le lecteur astucieux aura remarqué que seule une seule des conditions citées dans l’exemple du dessus s’applique au fansub tel que nous pouvons généralement le rencontrer : oui, vous l’avez bien remarqué, il s’agit de la piste en kikoulol.
Le droit à la copie privée vous garantit de pouvoir faire une copie de vos films préférés, [/quote]dans la mesure ou ceux-ci vous appartiennent sous une forme légale comme un DVD acheté en magasin par exemple. Il ne garantit par contre pas du tout le droit à une copie de sauvegarde de la copie du film que votre voisin/ami/membre de la famille vous a prêtée.
De plus, le droit à la copie privée n’autorise la diffusion de ladite que dans un cercle très restreint (dont le nombre exact n’est pas fixé par la loi, mais au tribunal, le juge n’acceptera généralement pas plus de 7 – sept – personnes tierces).
Le fansub historique (celui qui fleurit dans les années 80 et qui meurt grosso modo en 1995) était conçu, dans les faits, dans le respect de la loi. La “Vente” d’un fansub, pratiquée mais illégale, ne servait qu’à tenter de renflouer le porte-monnaie du subbeur, qui avait déboursé des sommes astronomiques pour se procurer les Laser Discs originaux. Et entre nous, je n’ai jamais entendu un subbeur me dire que les ventes avaient remboursé la LD-Box, JAMAIS.
Le fansub actuel est conçu à partir d’une copie du matériel vidéo qui n’est pas la propriété légale du subbeur, qui (dans 99,99 pourcents des cas) se procure un enregistrement digital sur la toile.
L’enregistrement digital lui-même ne peut pas être remis en cause, c’est la distribution à une tierce personne qui, elle, est bel et bien illégale dans le cadre des lois régissant la propriété intellectuelle ET le droit à la copie privée.
Poursuivons.
Après avoir créé des sous-titres le plus rapidement possible pour une vidéo qui ne lui appartient pas, le subbeur balance le tout sur la toile, pour toucher le plus de monde possible. Il est en cela en infraction avec le droit à la copie privée ET avec les lois qui régissent les droits sur la propriété intellectuelle.
Dans cette optique, le téléchargement à proprement parler, est dans une position équivalente à celle du chat de Schrödringer : il est à la fois légal car le “donneur” autorise la diffusion des données téléchargées, et en même temps illégal car l’utilisateur sait dans 99,99 pourcents des cas pertinemment que le matériel qu’il cherche à se procurer n’est pas légal.
On pourrait penser que téléchargement et fansub vont aujourd’hui de pair, selon le principe de l’offre et de la demande.
Mais ce serait oublier l’existence (souhaitable) du téléchargement légal – gratuit ou payant – dont font usage par exemple certains éditeurs pour distribuer des mises à jour de programmes (Ubuntu, dernière MàJ de WoW, etc) et le téléchargement frauduleux -sciemment ou non – qui concerne, il faut malheureusement le reconnaître, la majorité des cas.
Pour ce qui est des prix du marché, ils sont extrêmement disparates.
En 1988, la seule manière d’obtenir une copie légale d’une série donnée était de commander la VHS ou le Laser Disc au Japon, car la vente de ce genre de produits sur le sol français était anecdotique, pour ne pas dire inexistante.
En 1995, les éditeurs commençaient à s’implanter. Les premières VHS contenaient 1 (un) à 2 (deux) épisodes pour un prix dont je ne me souviens pas car à l’époque, je n’avais aucun pouvoir d’achat.
La situation évolue ensuite rapidement, et l’on trouve jusqu’en 2001 d’un côté des imports hors de prix (1490FF pour l’édition limitée du film X de Clamp) et de l’autre des VF ou parfois des VOST à des prix à peines plus élevés que ceux des films “ordinaires”.
Puis c’est l’arrivée d’un éditeur qui commence enfin à vendre du dessin animé par séries complètes. Mais s’il fait du chiffre, c’est parce que le prix des licenses est encore relativement correct pour les nouvelles séries, et qu’il bénéficie d’un catalogue complet déjà amorti qui ne lui a pas coûté grand’chose ni à l’achat, ni à la production. Il pourra poursuivre son activité avec brio jusqu’au faux pas fatidique : on parle du “Goldogate”.
À tout cela s’ajoute la croissance exponentielle du cablâge ADSL en France. Une nouvelle génération de consommateurs émerge : pour eux, la gratuité des biens liés au divertissement va de soi, garantie par leur connexion haut-débit.
Ce qui nous amène à la situation complexe d’aujourd’hui : d’un côté, des éditeurs confrontés au réel de la production (les licenses coûtent cher, une bonne traduction coûte assez cher, un bon doublage coûte cher, une bonne campagne de publicité coûte cher) qui demandent donc en retour un prix adéquat, et de l’autre des consommateurs qui peuvent se procurer tout ce qu’ils veulent gratuitement, sans trop d’efforts, et qui refusent graduellement l’idée de devoir payer pour obtenir un article de pur divertissement.
Il ne faut pas perdre à l’esprit que la “japanimation” n’est qu’un passe-temps qui n’est pas nécessaire aux besoins existentiels de l’être humain.
Il existe un droit naturel à la nourriture, un droit à la dignité, un droit à l’information (votre poste principal de télévision ne peut pas être saisi par un huissier, par exemple) mais il n’existe pas un droit à regarder tous/tes les films/séries/dessins animés actuellement produits dans le monde pour pas un kopek.
Alors oui, une diffusion sur les ondes hertziennes serait plus que souhaitable, mais cela coûte très cher, et comme les consommateurs préfèrent acheter le minimum et visionner gratuitement sur Internet le maximum, les éditeurs n’ont pas l’argent nécessaire pour préparer une diffusion hertzienne, et donc les consommateurs se tournent vers Internet et dépensent moins chez les éditeurs, etcaetera, etcaetera, etcaetera.
Mais… et le fansub, finalement?
Le fansub sous sa forme actuelle n’a aucune existence légale, je l’ai démontré au début de ce message. Si vous en consommez sans aucune modération, ayez au moins la décence de ne pas vous en vanter, ce sera déjà un bon début. Ensuite, essayez d’acheter vos séries coup de cœur (ne seraient-ce que celles-là) pour que le marché puisse se développer. Pour le reste… ça reste du kikoulol traduit à la va-vite par de jeunes analphabètes, hein. Pas de quoi fouetter un chat…