Courts métrages : programme 1

Courts, programme 1

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Disons-le d’entrée, notre coup de coeur de ce premier programme, c’est Le Parc. S’apparentant à un conte de sagesse chinoise minimaliste, le court de Nicolas MAHLER s’attache à la destinée de Waldemar, l’arbre immuable qui regarde le monde depuis son parc, assistant avec fatalisme à la disparition des amis qui constituent son univers dépouillé… Animation très sommaire (“il doit y avoir 80 dessins dans mon film !, s’amuse le réalisateur autrichien), voix off pleine d’humour, amour du non sens d’où pointe une certaine philosophie de la vie… Beaucoup de charme obtenu avec peu de moyens, une jolie expérience pour cet artiste qui vient de la bande dessinée “j’ai décidé d’arrêter la bande dessinée, parce que c’est un peu ennuyeux de dessiner toujours le même dessin. Mais je ne sais pas si l’animation était la meilleure alternative… ça ne change pas tellement !“. On l’aura compris, Nicolas MAHLER manie allègrement nonchalance et second degré. Au point d’avoir déstabilisé la commission autrichienne de films expérimentaux devant laquelle a été présentée son oeuvre : “Mon film a été refusé pour trois raisons : premièrement, il a été considéré comme sexiste, deuxièmement, il a été considéré comme un film sexiste… pour enfants ; et troisièmement, on m’a dit… que ce n’était pas un film !“.

Au rayon humour toujours, Jérémy CLAPIN est venu nous présenter Une histoire vertébrale, un court qui s’apparente déjà à un classique de l’année 2005 (mentions à AniFest, à Auch…). Cette jolie histoire d’un monsieur qui vit sa destinée comme une fatalité – par un curieux coup du sort, sa colonne vertébrale formant un angle droit à hauteur du cou le condamne éternellement à vivre les yeux rivés au sol… jusqu’à rencontrer sa dulcinée – évite l’écueil de la simple romance sur le mode “à chacun sa chacune” : “On peut en avoir plusieurs lectures, explique le jeune réalisateur. Je ne voulais pas que le scénario soit basé sur un seul gag ; le film parle aussi de la dictature des images des vieux films d’amour hollywoodiens, ces affiches où l’on voit deux persos s’embrasser dans des poses très torturées…“. La sélection du court à Annecy est en quelque sorte un retour aux sources, puisque c’est là que le projet a démarré : “J’avais remporté le Concours de Projet d’Annecy il y a 3 ans. Depuis, j’ai obtenu des aides de la part du Centre de la première oeuvre, puis une aide région Poitou Charentes – j’ai réalisé le film à Angoulême -, et aussi une aide aux nouvelles technologies“, détaille le réalisateur. Car malgré le rendu très traditionnel du film – qui porte une patte très vintage : “je voulais une animation qui fasse penser à du papier découpé, jusqu’aux bruitages : on peut imaginer que les personnages ont des articulations en bois…” –  tout a été réalisé en 3D : “plus simple, moins cher, plus rapide. Le travail a été réalisé en 3 mois par 3 personnes !“.

Au rayon des grands écarts chers aux programmes d’Annecy, notons enfin la présence de deux réalisateurs aux univers éloignés en tout points : le Néerlandais ROSTO, qui signe avec son Jonas/Tomberry une oeuvre sombre, fortement influencée par les expresionnistes allemands – un court difficile à cerner, voire indigeste par moments, qui a divisé le comité de présélection – et à l’opposé, le timide Gaël BRISOU, qui livra Sucré, le premier court Folimage de la cuvée 2005 : une relecture du mythe d’Adam et Eve à la sauce africaine, des images colorées, comme sorties d’un songe. Deux univers diamétralement opposées, comme le résume le provocateur ROSTO : “le cinéma est un médium un peu satanique, c’est une vaste escroquerie : les gens se rassemblent pour regarder finalement quasiment rien, juste un peu de lumière sur un écran… La force des festivals, c’est de se rendre compte qu’il n’y a pas de vérité au cinéma, mais plutôt une succession de mensonges individuels.

Enfin, coup de chapeau au court Un conte de nuit, qui nous a doucettement noué les tripes : sur une 3D au rendu rotoscopique, une famille s’escrime à tenter d’accepter la disparition annoncée de la maman, qu’on devine frappée d’une maladie incurable… Entre déni et acceptation, onirisme et âpreté de la réalité, le court de la suédoise Maja LINDSTROM fait partie de ces oeuvres qui choisissent l’animation pour mieux faire passer une réalité très crue, et rendre tangibles des sentiments durs à exprimer. On pense à Signes de vie, de Arnaud DEMUYNCK, qui l’an dernier abordait aussi le thème du deuil de manière onirique et mature.

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