Dans les confidences d’AnimeLand

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Dans la famille “10 ans d’AnimeLand”, déclinons la carte… souvenirs. Une plongée dans la mémoire collective de l’équipe nous livre pêle-mêle les délires, les grandes joies mais aussi les coups de bourre et les coups de gueule qui ont marqué l’histoire du magazine. Morceaux de choix.

Les coups de sang des débuts

Quand on débarque dans la profession, qu’on connaît l’animation pour avoir dévoré les oeuvres mais que les infos sont encore rares, on ne situe pas forcément de visu les grosses pointures du milieu. C’est ainsi qu’au festival de Corbeil-Essonnes en 92, la petite équipe d’AnimeLand se retrouve projetée sous les feux de la rampe, à la rencontre de grands auteurs. Yvan à l’époque va de surprise en surprise : “Comment ? Le type hier à côté de moi, c’était TAKAHATA ? Et l’autre au bout de la salle, c’était KOMATSUBARA Kazuo ?”. Ces heureux hasards permirent à AnimeLand de publier, dans le numéro 9, sa première interview de TAKAHATA.

Il y a toujours deux faces… à une bonne action : En 89, quand il faut déjà attendre trois à quatre mois parfois pour avoir un manga, il n’est pas encore question de trouver des produits dérivés dans les boutiques. Un après-midi comme les autres, à la boutique Junku, Erick NOUVEL et Yvan WEST LAURENCE restent saisis à l’écoute de la musique de Saint-Seiya : diffusé en fond sonore, le CD n’est pas disponible à la vente. Erick et Yvan se lancent alors dans une véritable plaidoirie pour réclamer l’import de CD de musique. Au vendeur qui demande combien il serait prêt à mettre, Erick lance un passionné… mais inconséquent “je sais pas moi, 300 F !” Et c’est ainsi que l’on pût trouver en France des CD de musique, mais à des prix prohibitifs pendant un certain temps…

Gros sujet de discorde dans les rangs d’AnimeLand à ses débuts : la réalisation des couvertures. Selon Cédric, “Yvan a toujours maintenu qu’il fallait qu’on fasse dessiner nos propres couvertures, et moi qu’il fallait prendre des couvertures avec des dessins originaux japonais. Ça a failli nous fâcher définitivement plusieurs fois”. La volonté d’Yvan fait force de loi pour les premiers numéros ; le numéro 14 quant à lui relève le défi de coloriser pour la première fois une image sur Photoshop, en l’occurrence un Sangoku personnalisé. “Ça devenait ensuite trop compliqué, se souvient Yvan. Réaliser un dessin original à chaque numéro prenait trop de temps. De plus, les sujets traités justifiaient d’avoir des documents japonais originaux en couverture” Jusqu’au numéro qu’AnimeLand vous propose aujourd’hui pour ses 10 ans : retour aux sources avec une couverture originale !

De la fabrication à la vente… les aléas de la réalisation

Les premiers participants d’AnimeLand se souviennent avec émotion de “l’époque de la rue de Phalsbourg”, de 92 à 96 : enfin, le fanzine bénéficiait de son propre local, mais il était situé dans une chambre de bonne… au cinquième étage. A la joie de boucler un nouveau numéro, succédait alors la hantise de devoir mettre chaque exemplaire sous pli, les porter à pied à la poste, remonter les cinq étages par l’escalier de service en colimaçon, et retour à la case départ. “Les jours de soleil, on pouvait faire le travail dans la cour de l’immeuble, ce qui évitait des aller-retour, nous confie Olivier FALLAIX ; mais la gardienne n’appréciait pas toujours les palettes qui traînaient. De plus, la main-d’oeuvre était limitée par la taille relativement petite du local : on ne pouvait pas être plus de cinq ou six à la fois”.

Autres temps, autres moeurs, Sabrina, assistante de direction d’AnimeLand magazine, se souvient avec émotion d’un retour de courrier faramineux pour la publication du hors-série numéro 3 : 500 lettres reçues en un jour, 500 CD de Mononoké et de Totoro à mettre sous pli et à acheminer aux abonnés… “Je ne veux plus jamais de CD offert avec AnimeLand !” espère pieusement Sabrina.

Arrivée début 2000 en tant que secrétaire de rédaction, Céline a contribué à ce qu’AnimeLand sorte à l’heure en kiosque et arrive plus tôt chez les abonnés, même si c’est parfois… au prix de gros coups de fatigue. Ainsi, un matin, arrivée à 8h pour récupérer les pages du journal qui devaient partir l’après-midi même à l’imprimerie, elle trouve Yvan dormant, étalé de tout son long sur trois chaises, tandis qu’Eric et Sabrina parlaient à mi-voix pour ne pas le réveiller…

Les risques du métier

Les sueurs froides ne sont pas toujours dues aux retards de bouclages. Arrivant un matin dans les locaux actuels du journal, situés dans le XXe arrondissement, quelle ne fut pas la surprise de Sabrina de voir que les meubles avaient disparu… En instance de déménagement, la société voisine n’avait pas fait de demi-mesure, et avait fait enlever les meubles d’AnimeLand avec les siens ; lesquels ont heureusement pu être récupérés grâce aux caméras de surveillance.

Monter un journal avec des passionnés, c’est la porte ouverte à certaines surprises. Ainsi, à l’époque où AnimeLand avait ses locaux Cité Griset, dans le XIe, Eric et Yvan étaient en réunion avec le rédacteur en chef de Pro-Game. Quand Cédric LITTARDI déboule dans la salle en… armure médiévale. “Ah ben tiens Cédric, justement, on parlait de… toi…”
Cédric assume complètement : “Je venais de mon école de commerce, située avenue de la République ; je n’avais pas eu le temps de me changer. Des copains préparaient un reportage sur “le look à l’ESCP” après, ils ont fait un montage avec des scènes du film Monthy Python Sacré Graal.”
Trêve de coquetterie, on est fan ou on ne l’est pas : Tibor CLERDOUET se souvient de ce rédacteur de Joypad qui s’était fait dessiner une Lamu sur l’avant-bras lors d’un Cartoonist Paris. Et ce n’est rien encore face à ce lecteur qui dévoila son… Albator tatoué sur l’épaule à Eric et Sabrina, lors d’une manifestation à Brest. Comme quoi les vertus d’AnimeLand sont multiples : c’est la couverture du numéro 49 qui lui avait servi de modèle…

Morceau d’anthologie que cette convention de l’IDRAC en décembre 92, considérée comme le premier grand rassemblement d’animefans à Paris. Que faire quand les organisateurs se sont enfuis avec la caisse, et qu’il faut canaliser une horde de rôlistes endiablés ? Et bien on fait preuve de sang-froid, on entasse dans les coins, les couloirs, les recoins, là où il y a de la place. “Je me souviens d’une grande pièce où on avait entassé des kilos de baguettes pour pouvoir nourrir tout le monde ; au bout du deuxième jour, ça puait le pain rassis et mouillé, nous confie Yvan avec une once de lassitude, encore perceptible huit ans après”.
“C’était géant ! rétorque WALO. 72h quasiment sans dormir, entourés de passionnés : on retrouvait la même euphorie que dans un concert. J’essaie maintenant de retrouver un peu de cette émulation dans les quizz que j’organise”.

Trouve un métier qui te plaît… et tu ne travailleras jamais.

Aujourd’hui encore, tous les rédacteurs parlent de leur joie de rencontrer des grands auteurs ou de découvrir des oeuvres en exclusivité. “On se dit parfois que pour nombre d’animefans, notre article sera peut-être la seule référence pour juger de la qualité d’une oeuvre, estime KARA. On se sent alors sacrément fier, mais aussi investi d’une mission envers le public. Quand par exemple j’ai parlé de Lain en 99, seul AnimeLand à ma connaissance en avait parlé ; il ne fallait pas que je me plante. Idem pour Blue 6 ou Cow-Boy Bebop.”

Mais la vie à AnimeLand ne va pas aussi sans quelques petites frustrations…ainsi WALO s’est-il senti quelque peu muselé pour son dossier Akira, paru dans le numéro 53 : diantre, quatre pages sur Akira, mais le sujet en méritait au moins deux fois plus ! ! Cette petite déconvenue a alors incité notre rédacteur prolixe à prendre OTOMO comme sujet de sa maîtrise de cinéma.

10 ans d’existence n’ont pas eu raison de la foi de l’équipe d’AnimeLand : le défi de proposer un nouveau numéro chaque mois est toujours relevé avec autant de passion. Et encore, on ne vous parle pas des coups de bourre particulièrement pernicieux pour ce numéro 70, des infos perdues sur le disque dur, des ordinateurs qui plantent, des papiers qui n’arrivent pas, de la pression qui repose sur les épaules de Diane la Super Maquettiste… sans oublier la mise en ligne du site qui n’a pas été sans histoire ! Comme quoi, nous aurons encore beaucoup d’histoires à vous raconter… dans 10 ans.

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